Déjà souffrant de problèmes structurels et chroniques, l’économie tunisienne a vu son cas s’aggraver par les effets du Covid-19 qui a imposé de nouvelles dépenses à honorer dans divers domaines comme celui du développement régional, de la compensation et de l’infrastructure de base. D’où la nécessité de continuer à s’endetter sur les marchés intérieur et extérieur.
Le gouvernement tunisien a un besoin pressant de ressources financières pour financer les différents projets dont certains n’étaient pas prévus initialement. Le gouvernement est appelé ainsi, au cours de l’année prochaine, à continuer son effort en matière de développement régional.
Il s’agit notamment d’accorder plus d’importance à l’emploi pour apaiser un tant soit peu la tension sociale qui est constatée dans plusieurs régions de l’intérieur du pays. A l’instar de ce qui a été fait dans la zone d’El-Kamour, des postes d’emploi pourraient être identifiés dans de grandes entreprises avec éventuellement la mise en place d’un fonds d’investissement dans le cadre de l’encouragement des jeunes à créer leurs propres projets.
L’autre dossier qui devrait bénéficier d’un intérêt particulier de la part des pouvoirs publics au cours de l’année à venir concerne l’infrastructure de base, les équipements et les commodités, et ce, dans le but d’améliorer les conditions de vie des citoyens habitant les zones intérieures qui se trouvent dans une situation précaire, notamment dans le Nord-Ouest, le Centre et le Sud. Même les zones situées au niveau du littoral ont besoin également d’une mise à niveau de l’infrastructure. Des investissements devraient être prévus également dans le secteur de la santé pour mieux équiper les hôpitaux, notamment en cette période marquée par la propagation du Covid-19.
Le recours à l’endettement
Pour pouvoir financer tous ces projets sans oublier la masse salariale, les dépenses pour le fonctionnement et l’équipement des différents ministères et des entreprises publiques, dont plusieurs sont déficitaires, l’Etat a besoin de s’endetter au niveau national et international. D’ailleurs, l’endettement a atteint actuellement un taux élevé frôlant les lignes rouges. En effet, l’année 2021 s’annonce très difficile pour la Tunisie, comme le laisse entrevoir le projet de loi de finances 2021 (PLF). Outre les dépenses, le gouvernement a tablé sur un service à la dette de 15,7 milliards de dinars, dont un principal de 11,501 milliards et des intérêts de 4,2 milliards de dinars.
A noter que la marge de manœuvre de la Tunisie sur le marché financier international est fort limitée compte tenu des indicateurs économiques et financiers faibles enregistrés au cours des dernières années et qui se sont aggravés par le Covid-19. En effet, la saison touristique a été marquée par un fléchissement inquiétant suite au nombre fort limité des arrivées et des nuitées des touristes, ce qui a causé un manque à gagner aux hôteliers et une diminution des recettes revenant à l’Etat. Les exportations ont été également en deçà des ambitions des exportateurs et n’ont pas réalisé de vraies performances. Les dépenses sont donc plus importantes que les recettes et l’Etat est appelé à continuer à alimenter la Caisse générale de compensation pour préserver le pouvoir d’achat des couches à revenu limité. A cela, il faut ajouter les subventions fournies aux sociétés publiques déficitaires qui ne peuvent pas continuer leur activité sans cette subvention qui leur permet d’alléger la pression sur leur trésorerie.
Des conditions rigoureuses imposées
A noter que le déficit budgétaire a atteint un taux de 7,3% du PIB, selon le gouvernement, ce qui équivaut à 8,8 milliards de dinars (14,9 milliards en 2020). Dans ce contexte, l’Exécutif compte emprunter 19,5 milliards de dinars en 2021, dont 2,9 milliards auprès du marché intérieur. Enfin, concernant la dette publique, elle atteindra 92,7% du PIB en 2021 (90% en 2020 et 72,5% en 2019).
Certains bailleurs de fonds internationaux sont réticents quant au financement de l’économie tunisienne vu les résultats négatifs enregistrés dans presque tous les secteurs et la lenteur manifestée par les autorités tunisiennes dans l’application des réformes convenues dans un ensemble de secteurs. Ces bailleurs de fonds imposent désormais des conditions rigoureuses pour pouvoir accepter d’octroyer des crédits et débloquer les fonds dans les délais impartis.
Certaines banques, comme le Fonds monétaire international (FMI), par exemple, accordent des financements par tranches en fonction de l’avancement des réformes de l’économie. Parmi les réformes prévues, celle qui concerne la compensation. Il est question de pratiquer dans ce cadre, la réalité des prix et de fournir une subvention aux personnes démunies qui figurent sur le registre des familles nécessiteuses détenu par le ministère des Affaires sociales et qui est régulièrement mis à jour pour intégrer de nouvelles familles touchées par la pauvreté. Le niveau de la classe moyenne est en baisse constante vu le revenu modeste de cette catégorie et la cherté de la vie.
Le gouvernement se trouve ainsi dans un vrai dilemme car, d’une part, les dépenses sont devenues plus consistantes alors que les recettes ne suivent pas une tendance ascendante. Heureusement que la Banque centrale de Tunisie a, enfin, accepté de financer une partie du budget de l’Etat qui est soumis à de fortes pressions de toutes parts. Sous l’effet des mouvements sociaux qui ne cessent de s’amplifier dans toutes les régions, le gouvernement est tenu de répondre aux appels des citoyens qui réclament de nouveaux postes d’emploi, un meilleur cadre de vie et une maîtrise des prix, notamment des produits alimentaires.