La hausse continue du nombre de contaminations et de décès expose notre pays au même scénario qu’a connu la Grande-Bretagne et n’exclut pas l’éventualité que l’on repasse par la case confinement afin d’endiguer la propagation de l’épidémie même si les catégories sociales les plus sévèrement touchées par les effets de la crise économique due au coronavirus y sont formellement opposées.
Malgré la hausse inquiétante du nombre de contaminations, ces dernières semaines, et la situation sanitaire critique dans plusieurs régions du pays, les citoyens s’abstiennent de respecter les mesures barrières (port du masque, distanciation physique…) qui permettraient pourtant de freiner la propagation de l’épidémie
La barre des 5.000 morts par le Covid-19 et des 2.000 contaminations en 24 heures vient d’être franchie. Un chiffre flippant et angoissant mais qui est somme toute prévisible au regard du relâchement total au sein de la population qui a été observé au cours des deux derniers mois. Alors qu’à la fin du mois de mai, la Tunisie faisait figure d’élève modèle en affichant zéro décès après un confinement de deux mois rigoureusement respecté par une bonne partie de la population, celle-ci a rapidement dégringolé dans le classement des pays où des mesures ont été adoptées et des restrictions imposées pour freiner la propagation de la pandémie, en figurant aujourd’hui parmi les nations qui enregistrent le plus grand nombre de décès et de contaminations par nombre d’habitants et dont la moyenne est aujourd’hui comparable à celle de pays européens sévèrement touchés par la pandémie du coronavirus.
Augmentation du taux de contagion
Pourtant, le ministre de la Santé n’a eu de cesse de le répéter au cours de ces derniers mois. Le non-respect des mesures barrières par la population risquerait d’accélérer la courbe des contaminations et des décès et d’entraîner un pic plus tôt que prévu alors que les autorités sanitaires ont tout entrepris pour maintenir un plateau (stabilisation du nombre de contaminations en 24 heures pendant plusieurs jours) et retarder ce dernier le plus longtemps possible afin de garder la situation sous contrôle et d’éviter l’explosion du nombre de contaminations et l’apparition de clusters. Mais peine perdue. En dépit de la volonté du gouvernement de vouloir appliquer fermement la loi en cas de violation du couvre-feu et du non-respect du protocole sanitaire et des mesures barrières dans les lieux et les espaces publics, le port de la bavette et le respect de la distanciation physique ne sont plus respectés depuis belle lurette par la majorité des citoyens. Ces derniers ne prêtent plus attention ni à l’annonce quotidienne du nombre de contaminations et de décès ni aux recommandations et aux avertissements de Nissaf Ben Alaya, directrice générale de l’Observatoire national des maladies nouvelles et émergentes de plus en plus inquiète et préoccupée par l’augmentation du taux de contagion dans les régions et par la situation épidémiologique critique dans le pays.
Eviter le scénario catastrophe de la Grande-Bretagne
Le retour de la promiscuité et des accolades dans des espaces clos et mal aérés comme les cafés et les salles de sport, les longues files d’attente devant la Sonede, la Steg et les points de vente des bonbonnes de gaz dans les villes du sud du pays, les bousculades dans les marchés hebdomadaires, les mouvements de protestation et les rassemblements récents dans les tribunaux après la reprise de l’activité des magistrats sans le respect du port de la bavette et de la distanciation physique ont contribué à l’apparition de foyers dans certains gouvernorats et à l’explosion du nombre de contaminations dans plusieurs régions et villes, notamment à Sfax, Tozeur et Gabès qui sont aujourd’hui durement touchés par la pandémie.
Dans un post qui a été publié, hier, sur les réseaux sociaux, le médecin urgentiste Samir Abdelmoumen pointe du doigt la nonchalance des citoyens, le relâchement dans les décisions, le manque de fermeté dans l’application des sanctions qui risquent, selon lui, d’aggraver davantage la situation sanitaire dans les prochaines semaines, en entraînant une flambée de l’épidémie.
Aujourd’hui, les répercussions de l’aggravation de la situation épidémiologique se font surtout sentir dans les hôpitaux qui sont quasi saturés alors que l’épuisement guette un personnel médical et paramédical qui a de plus en plus de mal à faire face au manque de moyens et à un volume de travail de plus en plus lourd découlant de l’afflux incessant des malades dans leurs services.
Sans nul doute, la hausse croissante du nombre de contaminations et de décès expose notre pays au même scénario qu’a connu la Grande-Bretagne et n’exclut pas l’éventualité que l’on repasse, à nouveau, par la case confinement afin d’endiguer la propagation de l’épidémie même si les catégories sociales les plus sévèrement touchées par les effets de la crise économique due au coronavirus y sont formellement opposées.