Forum économique tuniso-libyen : Ambitions et opportunités

Les recommandations de la troisième édition du Forum économique tuniso-libyen portent sur des objectifs très ambitieux qui pourraient, une fois concrétisées, consolider les économies des deux pays.

Les relations tuniso-libyennes dans le domaine économiques datent depuis l’indépendance des deux pays. Ces relations ont concerné les échanges commerciaux et les investissements. Ainsi, la Tunisie a toujours fourni son soutien à la Libye en période de crise en lui expédiant notamment des produits alimentaires pour satisfaire les besoins des consommateurs, notamment lors de la période d’embargo qui a touché le pays frère quelques années plus tôt. En outre, la Libye constitue une source d’approvisionnement du marché tunisien en dives produits de consommation qui sont écoulés dans différents points de vente.

Les échanges commerciaux sont donc le cheval de bataille de la coopération économique qui ne cesse d’évoluer au fil des jours entre les deux pays. Dans le domaine de l’investissement, la Tunisie a également toujours répondu à l’appel des autorités libyennes en dépêchant des entreprises opérant dans divers secteurs, y compris dans le conseil et l’étude pour la construction et l’aménagement de l’infrastructure de base qui a été fortement endommagée lors du conflit armé qui a ébranlé ce pays au cours de la dernière période. Actuellement, avec l’apaisement de la situation, les relations devraient retrouver leur cours normal pour le lancement de nouveaux projets communs au profit des deux pays frères.

Le retour à la normale

Ainsi, la troisième édition du Forum économique tuniso-libyen qui s’est tenue jeudi 11 mars 2021 à Sfax peut être considéré comme le déclencheur de la nouvelle coopération entre la Tunisie et la Libye. Organisé par Tunisa-Africa Business Council (Tabc), l’événement a réuni plus de 120 personnalités libyennes, principalement des officiels, des chefs d’entreprise et des responsables de structures économiques, et un grand nombre d’hommes d’affaires, d’experts en économie et de ministres tunisiens.

A l’issue de ce forum, les responsables de la Tabc ont adressé aux trois présidents un rapport synthétisant les diverses recommandations des travaux effectués, parmi lesquelles :

— Faciliter le mouvement de transit via les postes frontaliers reliant la Tunisie à la Libye, notamment Ras Jedir et Dhiba-Wazen, et d’œuvrer à l’ouverture de nouveaux passages comme celui de Mashhad Salih-Tiji pour développer les échanges avec la région de Jebel Gharbi.

— Etudier la possibilité d’ouvrir un quatrième passage entre Borj Al Khadra et Ghadamès, qui permettra de créer une dynamique dans la région et qui sera un portail vers l’Afrique subsaharienne via la Libye.

— Réouverture des financements du côté libyen pour un commerce terrestre et ne plus se contenter des échanges maritimes.

— Réouverture des lignes aériennes de Tunisair reliant Tripoli et Benghazi.

— Installer des lignes maritimes permanentes reliant les deux pays, à des prix préférentiels

— Achever les travaux de l’autoroute Médenine-Ben Guerdane-Libye.

— Lancement de la zone logistique frontalière, dont les travaux sont presque achevés

— Permettre aux entreprises tunisiennes de réactiver les contrats signés depuis 2001 avec une révision financière adaptée à l’évolution des prix sur le marché

— Permettre aux entreprises tunisiennes et libyennes de recevoir leur dû, dans le cadre d’un règlement global

— Mettre en place un PPP pour la réalisation de projets immobiliers à l’arrêt à cause des événements survenus en Libye

— Faciliter les mesures administratives et financières pour que les entrepreneurs tunisiens investissent en Libye, tout en leur accordant des avantages spéciaux et des facilités pour l’hébergement par exemple

— Faciliter les opérations financières et bancaires et permettre l’ouverture de comptes en devises pour les investisseurs libyens.

— Lancer une initiative législative pour permettre aux entreprises tunisiennes et libyennes de participer aux appels d’offres avec les mêmes avantages en Tunisie ou en Libye.

— Réutiliser le dinar tunisien et le dinar libyen dans les transactions entre les deux pays et ne plus recourir à l’usage de monnaies étrangères.

— Revenir aux anciens échanges avec la Libye des matières premières et marchandises tunisiennes contre de l’énergie libyenne.

— Activer l’accord de libre-échange entre les deux pays (2001), le réviser et l’améliorer.

Pénétrer le marché de l’Afrique subsaharienne

Les intervenants ont aussi mis en relief le destin commun des deux pays, vu leur emplacement commun sur le continent africain. Ils ont discuté des possibilités d’ouvrir des routes, de mettre en place des zones logistiques et d’étendre des voies ferrées pour accéder aux marchés de l’Afrique subsaharienne, et que le partenariat tuniso-libyen devienne un véritable portail pour l’Afrique. Sur le plan pratique, un accord préliminaire a été conclu avec la Chambre de Sabha (le centre historique de la région du Fezzan) pour créer une zone logistique tunisienne à Sebha pour pénétrer les marchés de l’Afrique subsaharienne.

Ainsi, à la faveur des recommandations formulées, il est prévu que les relations économiques entre les deux pays soient consolidées et dépassent les résultats enregistrés par le passé d’autant plus que les deux économies se distinguent par leurs similitudes. L’économie tunisienne ne pourra survivre à la crise que par l’économie libyenne qui peut apporter un souffle nouveau aux échanges commerciaux dans le cadre des relations bilatérales mais aussi dans un contexte plus large qui englobe l’Union maghrébine arabe.

Cette coopération économique entre les deux pays est en mesure de faire face et de résister aux chocs extérieurs dans la mesure où la Tunisie et la Libye seront régulièrement approvisionnées en produits de consommation de diverses natures. Le voisin libyen a toujours favorisé la Tunisie en tant que fournisseur et partenaire qui est capable de satisfaire tous les besoins exprimés en termes de produits, d’équipements, de conseil et d’accompagnement.