Accueil Economie Ftdes – Aleca : Refus de l’arbitrage entre investisseurs et Etat

Ftdes – Aleca : Refus de l’arbitrage entre investisseurs et Etat

Dans le cadre des négociations de l’Accord de libre-échange complet et approfondi ( Aleca) l’Union Européenne a proposé à la Tunisie de mettre en place un mécanisme d’arbitrage entre investisseurs et Etat, sous l’appellation « système judiciaire pour l’investissement » (Investment Court System ou ICS en anglais).
Selon le Forum tunisien des droits économiques et sociaux (Ftdes), «ce système permettrait à un investisseur européen d’attaquer directement l’Etat tunisien devant un tribunal privé, sous le prétexte qu’une décision, une loi ou une mesure menacerait ses investissements et même ses profits futurs».

«Mesures d’intérêt public»
Cette proposition porte une atteinte grave à la souveraineté de l’Etat tunisien et à la démocratie. Nous la rejetons dans sa totalité car les cours d’arbitrage pour les investisseurs ne sont pas tolérables. Elles posent, en effet, plusieurs problèmes inacceptables :
les investisseurs peuvent attaquer des mesures d’intérêt public, comme les mesures sanitaires, de protection de l’environnement, d’intérêt social… Même lorsque les Etats gagnent les (longues) procédures, ils peuvent être freinés dans leur régulation par peur d’être poursuivis. C’est donc totalement antidémocratique.
L’ICS permet aux investisseurs étrangers d’attaquer des Etats sans passer par la justice nationale, à laquelle ils devraient pourtant être soumis.
C’est une justice à sens unique puisque l’Etat ne peut pas attaquer les investisseurs. Ils ne sont pas soumis à la même procédure pour des cas de violations des droits humains par exemple.
L’ICS est par nature en faveur des investisseurs. De nombreux « arbitres », qui rendent les décisions, sont aussi des avocats d’affaires, des lobbyistes… Pour être à nouveau engagés, ils ont intérêt à ce que les entreprises gagnent, pour qu’elles continuent de poursuivre des Etats et qu’il y ait plus de procès.

«Frais d’arbitrage»
L’arbitrage profite à des entreprises ou des individus déjà extrêmement privilégiés, puisqu’il faut avoir des moyens financiers considérables pour initier l’ICS.
Cette procédure a déjà coûté des milliards de dollars à de nombreux Etats. Même lorsque l’Etat « gagne », il doit engager des frais d’arbitrage exorbitants : en 2013, l’Equateur avait ainsi dépensé au total 155 millions de dollars, seulement pour sa défense.
Des milliards de dollars collectés auprès des contribuables sont reversés aux entreprises avec ce système, y compris pour compenser la perte éventuelle de profits futurs escomptés (la Libye a par exemple été condamnée à payer 905 millions de dollars à une entreprise n’en ayant investi que 5).
Ainsi, cette proposition européenne doit être refusée, car elle n’apporte rien au développement socioéconomique, elle est antidémocratique et contraire à l’intérêt général. Elle pourrait coûter cher à l’Etat tunisien et l’empêcher de prendre des mesures d’intérêt public.
Nous interpellons donc la société civile et les pouvoirs publics pour que l’arbitrage entre investisseurs et Etat soit catégoriquement refusé.»

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