Commerce, distribution, approvisionnement en denrées de base, contrôle économique…. : Tout est à refaire

Le désespoir de voir les choses s’améliorer est à la hauteur de la désillusion des citoyens face à l’impuissance de l’autorité publique de mettre un terme aux agissements des réseaux de spéculateurs qui sont à l’origine des pénuries devenues de plus en plus fréquentes 

L’ODC a bien voulu tranquilliser les consommateurs en ce qui concerne la disponibilité des produits de base en prévision du mois de Ramadan. C’est à enregistrer, et le commun des mortels voudrait la croire sur parole. D’ailleurs, le consommateur qui, très tôt le matin, est à l’affût pour dénicher un kilo de sucre ou de farine (curieusement la farine pour certaines spécialités est disponible, mais…coûte plus cher) n’attend que cela.

Il n’en demeure pas moins que personne, jusqu’à présent, n’a voulu nous dire de quelle manière on allait contrôler la distribution et assurer un ravitaillement régulier des revendeurs, aussi bien au niveau des grandes surfaces que des épiciers et autres petites échoppes d’alimentation générale.

En effet, cette question de distribution demeure la grande inconnue de ce labyrinthe que les services de contrôle économique, la garde nationale, les douaniers et autres autorités compétentes sont chargés d’explorer pour remonter aux sources du mal.

Questions légitimes

Les produits et les marchandises saisis, et dont la valeur marchande équivaut à des milliards, donnent une idée de l’immensité de la tâche. Ces produits saisis   ont bien été soit importés (ou entrés illégalement sur le territoire) soit fournis par des usines.

Deux   questions se posent : la première semble avoir une réponse facile, étant donné qu’il s’agit de savoir comment a-t-on importé ces fruits et quelles sont les étapes  franchies pour que ces tonnes de bananes (les ananas sont venus renforcer ce fruit tropical), se retrouvent dans un frigo quelque part ?

La seconde concerne les opérateurs qui ont commandé puis  pris en charge ces tonnes de farine, de semoule ou de sucre, d’huile et autres produits de grande consommation pour les stocker ensuite dans des dépôts clandestins.

Absence de traçabilité

En l’absence de traçabilité,  presque à tous les niveaux, avec les complicités mises en place et qui continuent de fonctionner en l’absence de rigueur et de lois coercitives, il devient difficile  de remonter rapidement une filière pour limiter les dégâts. En tout état de cause, ces milliards perdus par les spéculateurs seront récupérés à la prochaine alerte de pénurie que l’on a appris à orchestrer pour affoler le consommateur, provoquer le désarroi du père de famille et le pousser dans les bras de ceux qui n’attendent que cela pour se refaire une santé et récupérer ce qu’ils ont perdu.

Il faudrait signaler que, depuis l’ouverture des routes face aux transporteurs qui ont acquis le droit et la liberté de transporter ce qu’ils veulent à travers tout le territoire, ces problèmes de pénuries ponctuelles et ciblées ont commencé à fausser les prévisions. Les produits pris en usine ou à leur sortie de la douane, se perdent dans la nature. On ne sait plus où ils atterriront pour assurer aux spéculateurs leurs larges bénéfices au prix d’un étouffement progressif qui a fini par pousser   les consommateurs vers le désespoir.

De lourds soupçons

Le désespoir de voir les choses s’améliorer est à la hauteur de la désillusion des citoyens face à l’impuissance de l’autorité publique de mettre un terme aux agissements de ces réseaux bien en place et qui continuent d’agir, alors que les soupçons sont de plus en plus lourds envers ceux qui tirent les ficelles.

En fin de compte, il semble que le fait de laisser en place trop longtemps des personnes directement impliquées dans la production, la distribution et la décision est une erreur monumentale.

Ces personnes finissent par se faire noyauter par des spéculateurs qui ont le don de savoir pousser ces responsables vers la faute pour ouvrir le jeu et agir à leur guise dans un marché qui souffre de l’absence totale de contrôle soigneusement mis en place et obéissant à des règles strictes.

Indépendamment de cet aspect, le fait que les producteurs ne pensent qu’à vendre leurs produits à tous ceux qui se présentent, n’aide en rien ceux qui essaient de mettre de l’ordre dans ce secteur. Les centaines de milliers de transporteurs qui sillonnent les routes pour ravitailler les dépôts, réguliers ou  clandestins, et les revendeurs, dont la majorité écrasante ne possède ni adresse fixe ni patente, contribuent à entretenir le flou et à rendre plus difficile et plus délicate l’intervention des équipes du contrôle économique.

En exigeant la présentation d’une patente, en veillant à ce que ces opérateurs aient une adresse fixe  pour pouvoir se ravitailler auprès des usines et producteurs, on pourrait commencer par mettre en place une traçabilité sans laquelle toutes les futures mesures à prendre seront vaines.

Perdus dans la nature

A leur  sortie, ces tonnes de produits, souvent compensées, se perdent dans la nature. Les spéculateurs, qui travaillent en free-lance, sont autant responsables que les grandes surfaces ou autres opérateurs des pénuries qui génèrent une ambiance propice à la confusion et à l’affolement.

Nous avons   souvent rappelé que les grandes surfaces ont un rôle régulateur à jouer. En voyant les prix qu’elles pratiquent souvent au niveau de la majorité écrasante des produits, nous sommes tentés de conclure qu’elles ne méritent pas cette confiance. Et alors que certaines d’entre elles ont l’outrecuidance de proposer à leur clientèle le remboursement de tout produit qu’elle trouvera moins cher ailleurs, nous sommes confrontés à une envolée de prix incroyable, alors qu’elles se ravitaillent auprès des mêmes fournisseurs.

« Une marque connue » a été coupable d’avoir traficoté des dates de péremption, emballé des produits impropres à la consommation et autres reproches que les services de contrôle ont relevés. Pourquoi ne pas dénoncer le nom de « cette marque connue » ? On est, certes au stade de la présomption, puisque la condamnation n’a pas encore eu lieu, (ira-t-on au bout de cette affaire ?), mais le consommateur a  bien le droit de savoir qui se joue de sa bonne foi et de sa santé.

On a annoncé la promulgation d’une loi pour reprendre en main ce secteur de la distribution. Espérons qu’elle tiendra compte de tous ces facteurs et qu’on mettra en place des hommes et femmes décidés à contribuer à l’effort déployé pour mettre un terme, sinon limiter au mieux, ces agissements irresponsables dont sont victimes des consommateurs poussés à bout et complètement désorientés.

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