Le statut de l’auto-entrepreneur a été conçu, en Tunisie, comme un outil de formalisation des travailleurs indépendants du secteur informel. Il a été introduit en 2020, suite à la promulgation du décret loi N°2020-33 et ce n’est qu’avec la loi de finances 2023 que les contours de ce nouveau régime se sont précisés.
La question de l’auto-entrepreneur a été récemment débattue lors d’un webinaire qui a été organisé par l’Iace sous le thème «Qui doit bénéficier du statut d’auto-entrepreneur ?», auquel ont pris part des représentants de la société civile et de l’administration. Lors de ce débat, il était question de mettre en lumière les apports de ce nouveau régime mais aussi les écueils de la loi sur le statut de l’auto-entrepreneur. Selon les intervenants, ce nouveau régime permet aux opérateurs économiques informels de s’affranchir des verrous administratifs et financiers qui les empêchent d’obtenir une patente ou de créer une entreprise à part entière, et ce, en ayant accès à des avantages financiers et sociaux.
Les travailleurs indépendants informels, 17% de la population active
«La phase d’implémentation du statut de l’auto-entrepreneur est désormais finalisée. Le gouvernement s’est penché sur la prochaine étape, à savoir la mise en place de la plateforme d’auto-entrepreneur qui va permettre aux opérateurs concernés de s’inscrire à ce nouveau régime», a affirmé Jihène Gaza, chargée du suivi du travail gouvernemental.
Revenant sur le processus de mise en place du nouveau statut, la responsable a rappelé que le projet a réellement démarré en 2016 à l’initiative de la société civile et a pu finalement voir le jour en 2020, grâce à un décret-loi qui introduit pour la première fois le concept de l’auto-entrepreneur.
De son côté, Asma Ben Hassan, présidente de l’Institut tunisien pour l’emploi inclusif (Tili), a souligné que le régime de l’auto-entrepreneur est un outil de migration de l’économie informelle vers l’économie formelle. Selon elle, il s’agit d’une alternative qui permet aux travailleurs indépendants du secteur informel (qui représentent plus de 17% de la population active) de contourner les procédures administratives dissuasives et d’échapper au coût de financement excessif que peut avoir la création d’un projet. «Contrairement à ce que la majorité pense, les travailleurs de l’informel veulent changer de statut. Le régime de l’auto-entrepreneur peut être une solution pour les intégrer dans le secteur formel puisqu’il va leur permettre de bénéficier d’une couverture sociale et d’échapper à la stigmatisation sociale qui leur pèse», a-t-elle ajouté.
Pourquoi certains métiers sont exclus ?
Ombre au tableau : les «freelancers» qui exercent certains métiers créatifs se trouvent exclus du régime de l’auto-entrepreneur. C’est ce que déplore le président de l’association des «freelancers» dans les secteurs créatifs, qui estime que ce nouveau statut peut résoudre une partie des problèmes auxquels sont confrontés les «freelancers». Abondant dans ce sens, Mohamed Rahmani, chef du projet «l’auto-entrepreneur», a souligné que le régime de l’auto-entrepreneur peut offrir plusieurs avantages aux «freelancers» étant donné le processus digitalisé et rapide d’octroi du statut (15 jours), l’accès à la couverture sociale et les avantages fiscaux dont il peut bénéficier.
Évoquant l’importance du registre de l’auto-entrepreneur qui verra bientôt le jour, Adel Chouari, directeur général du Registre national des entreprises (RNE), a indiqué que ce nouveau régime devrait permettre, entre autres, de reconnaître les nouveaux métiers qui ne sont pas encore classés dans la nomenclature des activités.
De son côté, Hanen Marzouk, directrice à la Direction générale des études et de la législation fiscales au ministère des Finances, a expliqué que le régime de l’auto-entrepreneur concerne tous les secteurs d’activité à l’exception de l’agriculture et les métiers non commerciaux. Ainsi, toute personne physique exerçant individuellement dans un de ces secteurs d’activité et dont le chiffre d’affaires annuel ne dépasse pas les 75 mille dinars peut bénéficier de ce statut sur une durée maximale de 7 ans. D’après la responsable, cette démarche de choix des activités concernées par le régime de l’auto-entrepreneur s’inscrit dans le cadre de la mise en adéquation entre le nouveau régime et le système fiscal en vigueur.