Festival de Cannes | Kaouther Ben Hania, réalisatrice de « Les filles d’Olfa » : « J’espère que mon film offrira à la Tunisie la Palme d’or »

Après sa première projection le 19 mai dans le cadre de la compétition officielle de la 76ème édition du Festival de Cannes, le long-métrage « Les filles d’Olfa » de Kaouther Ben Hania, seul film arabe cette année en lice pour la Palme d’Or, a suscité d’énormes réactions au niveau de la presse internationale avec des analyses, lectures et critiques, dans la majorité, positives.

L’envoyée de l’agence Tunis Afrique Presse (TAP) a eu un entretien avec la cinéaste et scénariste dans lequel elle revient sur les raisons qui l’ont poussé à faire ce docufiction inspiré d’un récit réel.

L’idée remonte exactement au 14 mars 2016 lorsque la chaîne TV privée « El Hiwar Ettounsi » a diffusé une émission où une femme au nom d’Olfa Hamrouni, une mère de quatre filles, donnait un témoignage douloureux et bouleversant en parlant de ses filles Ghofrane et Rahma qui se sont jointes au mouvement « Daech » en Libye.

Cette scène ô combien forte, se rappelle-t-elle, a été l’une des principales raisons qui ont suscité son intérêt à suivre cette histoire tragique, pour pouvoir comprendre ce phénomène et d’ailleurs tout ce qui s’est passé en Tunisie durant les dix dernières années. C’est de là qu’est né le film « Les filles d’Olfa ».

Face aux énormes critiques adressées à la mère qui a fait objet d’une virulente campagne d’insultes et d’injures sur les réseaux sociaux, « j’ai réalisé à cet instant que les médias ne vont pas l’aider dans son affaire. Ainsi je l’ai contacté en 2016. Croyant au début que j’étais journaliste, je suis arrivée, petit à petit lorsqu’elle a su que j’étais une cinéaste, à intégrer le monde d’Olfa et de ses filles, sur fonds d’une relation de sympathie qui s’est tissée de jour en jour ».

De la théorie au concret, le tournage à peine commencé en 2016 a été interrompu durant cinq ans pour se poursuivre avec la période du confinement. Une période où elle a repris l’idée du projet pour le finaliser et faire en sorte que le film soit vraiment à la hauteur de l’affaire d’Olfa et ses filles avec lesquelles elle a vécu une certaine période.

Commencé en 2016, elle l’a poursuivi cinq ans après une période de réflexion. Elle voulait réaliser le film différemment car l’histoire est vraiment intime et d’une grande sensibilité en même temps. Et d’ajouter « Il fallait créer un environnement qui les protège en premier lieu. Ainsi, il fallait tout d’abord délimiter le lieu du tournage dans un seul espace et réduire l’équipe technique et de tournage le maximum car ce qui m’intéressait est ce voyage intérieur et le dialogue avec les personnages. D’ailleurs, le film a créé une sorte de « Thérapie » nourrie par une certaine complicité entre les actrices et les personnages. « Les filles d’Olfa sont mes filles adoptives » a-t-elle confié.

Pour exprimer sa grande joie de voir le film en course à Cannes, Kaouther Ben Hania s’est prononcée par ces mots « Ma joie était au grand complet quand Olfa et ses filles ont foulé le tapis rouge », et ce, raconte-t-elle, après un voyage de Tunis à Cannes qui n’était pas sans désagréments, à cause de la procédure S17 imposée aux deux autres filles d’Olfa à cause de leurs soeurs Ghofrane et Rahma.

Pour son mot de fin, Kaouther Ben Hania a adressé un « appel humain » aux autorités tunisiennes pour sauver une fille de huit ans de la prison. Et c’est d’ailleurs avec cet appel que la cinéaste signe la scène finale de son film, qui espère-t-elle, offrira à la Tunisie la Palme d’Or du festival cannois, où son aventure a commencé en 2014.

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