Accueil A la une Instalingo : Une affaire hors norme qui n’a pas révélé tous ses secrets

Instalingo : Une affaire hors norme qui n’a pas révélé tous ses secrets

 

C’est en septembre 2021 que le dossier a été révélé au grand public, à la suite de l’ouverture par le ministère public d’une enquête visant ladite entreprise, dénommée Instalingo et implantée à Kalâa Kebira, dans le gouvernorat de Sousse, depuis 2015, spécialisée dans la création de contenu et la communication numérique.

Dans le cadre de la lutte contre la corruption sous ses diverses formes, on constate une multiplication des affaires en justice.

Parmi les dossiers qui ne cessent de s’accumuler sur les bureaux des procureurs, théoriquement de grande importance, mais dont les soubassements sont souvent méconnus, on citera, particulièrement, celle évoquée sous l’appellation d’Instalingo dont l’instruction a été clôturée, il y a un mois, jour pour jour, le 19 juin dernier, après décision du juge d’instruction près le Tribunal de première instance de Sousse 2.

Avant de passer en revue les différentes péripéties de cette affaire, prenons le temps d’abord de jeter un coup d’œil sur les tenants et aboutissants de ce dossier qui fait couler beaucoup d’encre et a fait tomber plusieurs « grosses » têtes.

C’est en septembre 2021 que le dossier a été révélé au grand public, à la suite de l’ouverture par le ministère public d’une enquête visant ladite entreprise, dénommée Instalingo et implantée à Kalâa Kebira, dans le gouvernorat de Sousse, depuis 2015, spécialisée dans la création de contenu et la communication numérique.

Or, l’instruction a porté sur l’implication de cette société dans la mise en place de pages publiques sur les réseaux sociaux considérées comme étant à l’origine de troubles «ayant pour but de changer la forme du gouvernement, d’inciter les gens à s’armer les uns contre les autres, à provoquer le désordre, le meurtre et le pillage sur le territoire tunisien, conformément aux articles 67, 68 et 72 du Code pénal…». L’heure est grave !

Plusieurs cadres sécuritaires seraient impliqués, ainsi que le chef du mouvement Ennahdha, Rached Ghannouchi. Quant à son fondateur, Haithem Kehili, il est en fuite, et aurait élu domicile en Turquie. Cette «fuite» ne plaide guère en sa faveur, mais renforce, logiquement, les soupçons qui pèsent sur lui.

Huit mandats d’amener internationaux

Après deux ans d’enquêtes sécuritaires et judiciaires, voilà ce à quoi a abouti le parquet, selon une déclaration toute récente du premier substitut du procureur de la République et porte-parole du tribunal de Sousse, Rochdi Ben Romdhane. Au terme d’un processus judiciaire fleuve marqué par une longue série d’investigations, le juge saisi de l’affaire s’est prononcé pour la clôture des enquêtes menées dans le cadre de cette instruction.

On mentionnera, dans ce cadre, le classement des chefs d’accusation portés contre 15 suspects, dont une journaliste, et émission de mandats de comparution devant la Chambre de mise en accusation près la Cour d’appel de Sousse contre 36 accusés. Certains sont restés en détention, donc, alors que les autres mis en cause sont en liberté.

Le porte-parole du tribunal précise encore que la décision du juge prononçant la clôture des enquêtes et investigations, de fait et de droit, sans empêcher, toutefois, la poursuite du procès qui est due, selon la même source judiciaire, au fait que le parquet conteste la décision de l’instruction de classer les charges contre 15 suspects, d’où «son empressement d’interjeter appel…»

A rappeler que, depuis juin 2022, le parquet avait ordonné une information judiciaire contre 28 personnes, dont le chef du mouvement Ennahdha, Rached Ghannouchi, sur fond d’implication dans cette même affaire, faisant porter le nombre de suspects à 51 personnes.

A noter également que dans le cadre de cette même affaire, huit mandats d’amener internationaux ont été émis contre des accusés en cavale à l’étranger.

A souligner aussi que le chef du parti Ennahdha, Rached Ghannouchi, qui comparaît, dans le cadre de l’affaire Instalingo, a déjà été condamné à un an de prison et une amende de 1 000 dinars par la Chambre correctionnelle spécialisée dans les affaires de terrorisme de Tunis ; et ce pour «apologie du terrorisme» dans une affaire qui remonte à 2022, pour des mots jugés extrémistes et dégradants selon un syndicat de police qui avait porté plainte.

Ce n’est qu’une affaire de règlement de comptes

Parmi les derniers noms cités dans cette affaire, on mentionnera celui de Hichem Mechichi, apparu après de longs mois d’investigations. Hichem Mechichi a, rappelons-le, été désigné chef de gouvernement le 25 juillet 2020 et limogé un an plus tard, le 25 juillet 2021, dans le cadre du processus engagé par le Chef de l’Etat.

Parmi les personnes connues et impliquées dans cette affaire hors norme, on citera Mohamed Ali Aroui, Rached Ghannouchi, Mouadh Ghannouchi, Soumaya Ghannouchi, Rafik Abdessalem, Adel Daâdaâ, Lamia Jendoubi, Mariem Daâdaâ, Mohamed Hajfi, Abdelkarim Ben Slimane, Riadh Bettaïeb, Syyed Ferjani, Lotfi Jendoubi, Haythem Kehili, Yahya Khili, Karim Kehili, Rania Zouari, Sabrine Laâtiri, Safinez Ben Ali, Rania Belâfia, Mohamed Béchir Arrouj, Hilel Kourachi ainsi que trois autres personnes dont deux de nationalités étrangères.

De son côté, l’avocat, Me Mokhtar Jmaii, présente la version du collectif de défense, déclarant, tout récemment, lors d’une conférence de presse, que «le dossier de l’affaire manque d’éléments de  preuves concrètes». Et qu’il s’agit d’une affaire de «propagande médiatique et de règlement de comptes», a-t-il encore déploré.

L’avocat a, en outre, tenu à préciser que la société Instalingo ne traitait pas avec des régimes politiques, mais avec des parties commerciales, médiatiques et administratives, et ce, dans le monde entier.

Ainsi, affirme-t-il, il n’y a aucun accord liant Instalingo au parti Ennahdha, tout en reconnaissant, cependant, l’existence «d’un accord, et un seul, conclu par Instalingo avec Abdelkrim Zbidi, candidat à la présidentielle de 2019 pour sa campagne électorale». L’instruction étant achevée, le dossier se trouve, donc, dans l’attente du dernier verdict.

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