Alors que le marché tend vers une légère accalmie pour ce qui concerne un ensemble de produits, les grandes surfaces jouent les prolongations.. Elles proposent des prix sans comparaison.
Le dictionnaire est clair : attrape-nigauds «c’est une ruse grossière à laquelle seules les personnes peu réfléchies, les personnes sottes se laissent prendre ». Alors que le marché tend vers une légère accalmie pour ce qui concerne un ensemble de produits, les grandes surfaces jouent les prolongations et inondent les boites aux lettres de prospectus en couleur qui proposent des prix «concurrentiels» pour les glaces, chocolats, différentes sortes de cakes et autres friandises, pour des marques de lessive ou de désinfectants. Nous avons découvert avec beaucoup de surprise que les prix des viandes rouges et blanches, pour les charcuteries, les fromages, les laitages et autres produits de consommation courante, mais essentiels pour se nourrir, sont, à quelques millimes près, les mêmes. Est-ce une coïncidence ou une entente cordiale ? On est en droit de se le demander.
Dans ce cas, à quoi servent ces prospectus, si ce n’est pour contribuer un tant soit peu à «alléger» le coût de la vie ?
Nous avons relevé qu’en France, par exemple, au lendemain de la pandémie qui a heurté de plein fouet les familles, la sécheresse qui a déjoué tous les plans au niveau agricole, que face aux contrecoups de la guerre russo- ukrainienne, les autorités avaient demandé aux grandes surfaces de tenir compte de ces facteurs et de revoir les prix à la baisse pour aider les consommateurs à faible revenu.
De prix insupportables
Cela a été fait et ce «rôle social» a été suivi d’une réaction humaniste solidaire remarquable. La situation de notre économie est connue de tous, et même un gamin pourra vous expliquer le plus sérieusement du monde que « notre pays est devenu pauvre parce qu’on lui a pris son argent». Ce gamin ne fait pas de la politique, mais a certainement entendu ses parents parler de prix insupportables, de ces pénuries cycliques dont certaines voulues et provoquées, et a sans doute fait la queue pour avoir les incontournables baguettes, etc…
C’est dire que cette mauvaise passe a touché tout le monde et même si nous sommes plus que certains qu’elle n’en a pas pour très longtemps, il est regrettable de constater que ceux qui sont capables de contribuer à cette traversée de désert avec le moins de dégâts possible n’ont pas joué leur rôle.
Comment peut-on qualifier le fait que les viandes sont plus chères, nettement plus chères, dans ces magasins que dans n’importe quelle boucherie ou revendeur de volailles ?
Quant aux poissons, il ne faudrait pas en parler. Les prix sont ceux des produits de luxe. Au marché d’en face, chez le poissonnier d’à côté, pour la même qualité, on constate qu’il y a quelque chose qui ne va pas en faisant la comparaison.
Comment expliquer que les légumes sont partout à des prix très convenables et qu’ils sont beaucoup plus chers dans ces grandes surfaces? Que les fruits qui ont nettement baissé, surtout ceux qui sont rapidement périssables sont à très bon marché, mais qu’ils continuent à faire figure de produits nobles dans ces lieux où on se rend pour faire des courses en gagnant du temps et en espérant faire de bonnes affaires ?
Il y a des limites
Est-ce parce qu’il y a de la lumière et de la climatisation, que les emballages sont plus coûteux ou parce qu’on a la possibilité de choisir ? Il y a des limites à ne pas dépasser si l’on veut vraiment jouer ce rôle social que le bon sens impose par solidarité avec une population que l’on a sciemment appauvrie et qui peine à joindre les deux bouts. Au point de finir par croire, que l’on agit pour accroître cette pression qui étouffe et remet en cause bien des valeurs dont nous nous sommes prévalus à une certaine époque où la solidarité avait, un sens.
Mdweb, pionnier du marketing électronique et des études digitales, vient de sortir son étude sur la E-présence des principaux acteurs de la grande distribution en Tunisie pour le mois de juillet 2023. Les enseignes de la grande distribution appuient leurs stratégies de communication sur le digital, afin d’assurer la visibilité de leurs offres, ainsi que de maintenir la relation de proximité avec leurs clients.
C’est possible
Il aurait été intéressant de voir ces enseignes rivaliser d’ingéniosité pour aider les consommateurs à traverser cette passe difficile. Sans polémique aucune, elles avaient le moyen de le faire en ces circonstances difficiles. Elles ne l’ont pas fait. L‘une d’elles le fait en affichant des promotions pour les viandes, les laitages ou autres produits de consommation courantes. Donc c’est possible. Il est bien entendu que ces grandes surfaces ont absolument le droit de gagner de l’argent. Les bilans qu’elles publient sont d’ailleurs largement bénéficiaires. Mais lorsque nous voyons ce qui se passe ailleurs, il y a bien des questions à se poser.
Ces grandes enseignes, répondant à ces appels de solidarité, disciplinées et hautement sensibilisées, rivalisent de créativité pour proposer de nouveaux services aux consommateurs tout en mettant à leur disposition des produits de qualité à des prix abordables. Elles sont réellement au service des consommateurs qui ne sont plus vus sous un angle réducteur. Ils viennent pour se servir, se faire conseiller, peuvent être livrés gratuitement à domicile, sont en mesure de profiter de cours de couture, de cuisine, qui cartonnent, peuvent se faire conseiller par des cuisiniers de métier pour des recettes qui ne reviennent pas cher, etc… Cette chaîne de solidarité se poursuit au niveau des recettes que l’on propose dans les chaînes TV où elles sont pour la plupart à base de produits à bon marché. Chez nous on s’ingénie à concocter des recettes à base de saumon, de viandes d’agneau, de pignons et de pistaches, etc….
Les consommateurs, qui connaissent des fins de mois difficiles, peuvent régler leurs courses en quatre fois ou en différé, sans frais supplémentaires.
Ce rôle social
Ce désir de rapprochement d’une population qui souffre a l’avantage de transformer le consommateur en un client proche, venu non pas pour pousser son caddy et mettre mécaniquement ce dont il a besoin pour repartir dans l’anonymat le plus complet. Il est quand même curieux que des enseignes dont les noms chevauchent des deux cotés de la Méditerranée font tout pour faciliter la vie de leur clientèle au sud de la grand bleue, mais affichent des prix incroyables au nord, tout en arguant que «ceux qui trouvent moins cher seront remboursés de la différence».
Pour illustrer ce rôle social en cette période difficile, nous avons retenu ce qu’a déclaré le responsable d’un hypermarché dont la firme opère chez nous : «Il ne s’agit pas d’opposer l’économique et le social, mais oublier le rôle de la grande distribution dans le progrès social par la baisse des coûts et la fourniture d’objets indispensables serait injuste. Rien n’est plus social dans ces circonstances difficiles que de permettre à des familles modestes d’habiller et de nourrir leurs enfants correctement et d’avoir l’argent pour le faire à la fin du mois».
A méditer !