Accueil Economie 6e édition du Forum Mondial de la Mer: Défis et recommandations

6e édition du Forum Mondial de la Mer: Défis et recommandations

A l’occasion de la conférence des Nations unies de Nice en 2025, la perception de l’océan doit évoluer pour que l’on cesse de le considérer exclusivement comme un espace géopolitique stratégique, mais comme un système connecté au cœur des équilibres naturels et potentiels pacificateurs en vue d’un futur souhaitable.


Dans le contexte actuel, marqué par des transformations rapides et parfois imprévisibles décrites par les scientifiques, l’océan risque de devenir un espace de crise. Il sera de plus en plus marqué par une contestation et une confrontation accrues. Ainsi, on constate aujourd’hui un effort inédit de réarmement des puissances navales concomitamment à un réveil des souverainetés, caractérisé par un mouvement paradoxal de territorialisation des océans.

Outre les enjeux primordiaux de défense, on attend des marines une contribution accrue à la compréhension et à l’anticipation des évolutions de l’océan, à la lutte contre les trafics, contre la pêche et au soutien des populations lors des événements climatiques extrêmes.

Anticiper les crises

Le concept de basculement naturel et géopolitique illustre une réalité inévitable à laquelle nous devons nous préparer. Le changement des conditions océaniques aura un impact inéluctable sur les ressources, exacerbant les tensions autour de la pêche, des métaux rares ou des voies de navigation. Dans ce contexte, il est impératif d’anticiper les crises et de créer des mécanismes de coopération multilatéraux.

Le développement d’outils comme le Jumeau numérique de l’océan (JNO) s’avère essentiel pour garantir la qualité de l’information qui servira d’appui à des décisions techniques et opérationnelles. Il est donc à espérer qu’en 2025, à l’occasion de la conférence des Nations unies sur l’océan, sera annoncé le fonctionnement de ce jumeau numérique de l’océan et de l’organisation intergouvernementale chapeautant son fonctionnement.

Les banques publiques de développement, qui gèrent des milliards sous les chiffres des Etats qui jouent un rôle crucial dans ce panorama géopolitique, doivent aussi faire de l’océan un pacificateur et un faiseur de liens à l’horizon 2050.

Afin de mieux aligner ces institutions sur les objectifs de développement durable et sur les conventions internationales en matière de durabilité, il semble fondamental de soutenir l’exemple de la coalition des banques d’investissement bleues. Cela doit aller de pair avec le désinvestissement dans les énergies fossiles et les secteurs néfastes à la biodiversité et la redirection de ces capitaux vers des initiatives positives et d’ampleur et échelles différentes.

Véritable enjeu géopolitique, la refonte des systèmes financiers internationaux doit accompagner ces efforts. On souhaite aussi étudier la piste de la réforme de l’endettement qui devrait être liée à la performance environnementale des nations, de même que le concept d’échange de dettes contre la protection de la nature.

Enfin, la solution à ces défis complexes doit nécessairement impliquer des partenariats publics privés associant l’ensemble des parties prenantes, y compris les scientifiques et les organisations non gouvernementales.

Ceci contribue au transfert des compétences entre les différentes parties, rendant ainsi possible une réponse multidimensionnelle aux défis géopolitiques et environnementaux que nous rencontrons.

Ainsi, à l’occasion de la conférence des Nations unies de Nice en 2025, la perception de l’océan doit évoluer pour que l’on cesse de le considérer exclusivement comme un espace géopolitique stratégique, mais comme un système connecté au cœur des équilibres naturels et potentiels pacificateurs en vue d’un futur souhaitable.

Vers une Agence européenne de l’océan ?

Les récentes crises internationales ont démontré la capacité de l’Union européenne à jouer un rôle de stabilisateur et directeur. Les crises liées à l’océan représentent un tel contexte et réclament en conséquence une action coordonnée et articulée à l’échelle européenne.

Il est donc impératif que l’Union européenne déploie une approche intégrée de la gouvernance de l’océan et du milieu aquatique, notamment en créant une Agence européenne de l’océan qui aurait pour mission de coordonner les politiques et stratégies relatives aux milieux marins.

La communication transparente et efficace entre les milieux scientifiques et les décideurs politiques européens constitue un autre élément crucial de travail. Des initiatives pourraient grandement contribuer à cette fin. De plus, il convient de souligner le besoin pressant d’un courage politique au niveau européen pour se saisir de questions sensibles qui ne sont pas traitées à hauteur de l’urgence écologique et des constats scientifiques comme les aires marines protégées et la gestion de la pêche.

D’autres domaines moins fréquemment, mais tout aussi cruciaux, comme les opérations de sauvetage en mer, doivent également être inclus dans le spectre des responsabilités européennes. Enfin, la position globale de l’Union européenne, un candidat idéal pour adopter une position diplomatique de premier plan sur les questions maritimes, est à saluer. En effet, l’UE a la possibilité et même le devoir de jouer un rôle majeur dans l’orientation des normes et des politiques mondiales relatives à l’océan, lui offrant une opportunité précieuse de renforcer son rôle en tant qu’acteur mondial. Par ailleurs, l’exercice de prospective mené par l’Association Notre Grand Bleu à l’échelle méditerranéenne décrit une région caractérisée par un climat qui pourrait connaître un réchauffement de plus de 2,2°C avec notamment un vieillissement global de la population, une stagnation de la pêche industrielle et la croissance de la production aquacole. De nombreuses espèces indigènes pourraient disparaître en raison des pressions entropiques et du réchauffement climatique. Ainsi, les déversements plastiques pourraient être 2 à 3 fois supérieurs. Il est permis aussi d’envisager que la quasi-totalité de la population autour du bassin méditerranéen puisse souffrir de pénuries d’eau. Face à cette situation, le plan Notre Grand Bleu travaillera sur plusieurs sous-régions ou pays volontaires pour approfondir des scénarios de prospective et présenter, par la suite, des conclusions lors d’une prochaine réunion du groupe d’experts Océan 2050.

A l’échelle de la Méditerranée, au problème climatique, s’ajoute celui de la pollution plastique déjà abordée dans la Convention de Barcelone. On insiste ici sur la nécessité de réduire drastiquement l’usage des plastiques, d’interdire les additifs toxiques, de mettre en place un système de responsabilité élargi des producteurs au niveau de la Méditerranée et de soutenir l’économie circulaire. La Convention de Barcelone peut, à cet égard, incarner un cadre d’expérimentation unique alors que se négocie actuellement le futur traité plastique.

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