Les chèques impayés et les peines alternatives

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Editorial La Presse

Au programme d’une séance de travail ministérielle tenue récemment à La Kasbah, le projet de loi sur le renforcement de la sécurité et la fiabilité du traitement des chèques bancaires. A l’examen, une approche qui se veut globale en passe de protéger les droits du créancier ainsi que la liberté du débiteur. 

L’objectif du futur projet de loi en voie de finalisation étant de consolider les devoirs de la banque, établir la responsabilité des institutions bancaires et financières, utiliser des mécanismes de paiement et des solutions électroniques alternatives, et améliorer les pratiques bancaires, aux fins de renforcer les normes de sécurité et de fiabilité du traitement du chèque. Le projet de loi vise également à harmoniser la politique pénale avec les spécificités des transactions bancaires traitées par chèque et à instaurer un système permettant de régulariser la situation des personnes ayant fait l’objet de jugements définitifs ou de poursuites en cours, dans le cadre d’un objectif ultime alléger les sanctions. 

Au cœur du projet, l’amendement de l’article 411 du Code de commerce relatif aux chèques sans provision. La nouvelle rédaction de l’article 411 porte entre autres sur la conciliation et la médiation en matière de poursuites pour chèques impayés. L’idée de fond consiste à concilier les droits des victimes (les créanciers) et ceux des débiteurs, en leur donnant l’occasion de régulariser leur situation. A cet effet, les obligations des banques seront renforcées. Des régularisations de situation pour les personnes jugées par contumace sont également envisagées.

Selon la ministre de la Justice, qui a présenté un exposé au cours de la séance ministérielle présidée par Ahmed Hachani, on dénombrait, à la date de novembre 2023, 427 détenus pour des affaires de chèques impayés dont 189 en détention préventive. Ces chiffres sont modestes, mais l’affaire est importante, car le chèque est devenu un instrument de garantie qui accompagne la vie quotidienne d’un grand nombre de Tunisiens. Le nombre de détenus est par ailleurs connu, mais pas celui des condamnés par contumace.

Cet amendement du code de commerce, tel qu’il est envisagé, serait donc un progrès. Le processus d’adoption devrait commencer incessamment par le gouvernement, avant d’être soumis en Conseil des ministres puis à l’Assemblée.

Mis à part les chèques impayés, combien de personnes sont détenues pour des peines de durée courte ou moyenne ? Si l’on procède à un benchmark international, dans le but de connaître les expériences étrangères, on se rend compte que les peines alternatives sont de plus en plus instituées et, avec le recul, donnent d’excellents résultats.

Les peines alternatives en lieu et place de l’emprisonnement d’office consistent à remplacer la détention par le bracelet électronique, les travaux d’intérêt général, voire les amendes élevées. Certains pays ont même osé le rachat des jours de prison par le condamné.

Les précautions prises sont généralement les suivantes : la peine est inférieure à 5 ou 3 ans ; le coupable n’est pas récidiviste ; l’infraction en question ne porte pas sur des faits graves tels que l’homicide, le terrorisme, l’agression sexuelle ou l’atteinte à la sûreté de l’Etat.

Aux dernières statistiques, la Tunisie comptait 23.000 détenus. Parions que si les peines alternatives étaient instaurées, ce nombre baisserait de moitié en générant à plusieurs niveaux d’innombrables bienfaits.

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