Le service «Espoir» pour l’écoute, la prévention et le traitement antitoxicomanie, situé au complexe sanitaire de Djebel Oust, fera prochainement l’objet d’une extension consistant en la construction d’un nouveau bâtiment couvrant pas moins de deux mille mètres carrés.
Ce projet d’extension, programmé en collaboration avec la société civile, promet d’apporter davantage de confort et une meilleure qualité des prestations au profit des patients. Il ira même de pair avec l’introduction d’un nouveau traitement médicamenteux (la méthadone) pour répondre aux besoins thérapeutiques des usagers des opiacés dont l’héroïne ainsi que d’autres substances psychoactives synthétiques. Aussi, une unité de sevrage destinée essentiellement aux usagers précités sera-t-elle instaurée, conformément aux exigences thérapeutiques de cette population-cible.
Il faut dire que le renforcement de l’infrastructure, des équipements et de la qualité des interventions du service «Espoir» est justifié à plus d’un titre. Créé en 1998 et reconnu une année après en tant que CHU, ce service assumait, jusqu’en 2003, la responsabilité de la prise en charge thérapeutique antitoxicomanie des détenus. A partir de cette date-là, il avait ouvert ses portes pour accueillir les consommateurs de drogue désireux de quitter la sphère infernale de la dépendance. En 2011, ses activités ont été interrompues pour être reprises huit ans après. Depuis, les statistiques relatives à l’évolution de l’usage des substances psychoactives et des consommateurs qui sollicitent l’aide et le traitement vont crescendo.
En courbe croissante !
Rencontré au stand du Complexe sanitaire de Djebel Oust, en marge de la Foire internationale du livre au Kram, son directeur, Dr Mohamed Mokdad a eu l’amabilité de vulgariser l’information sur le service «Espoir»; un service qui connaît une évolution significative en matière de sevrage et ce, depuis 2019. En effet, le nombre d’admissions est passé de 30 en 2019 à 136 en 2023. Les consultations ne comptaient pas plus de 609 en 2019 pour finir par atteindre 1.204 en 2023. Le nombre de nouveaux patients, lui, est passé de 288 en 2019 à 325 en 2023. Quant aux nombre de nuitées, il est passé de 554 en 2019 à 2.345 en 2023.
Ces chiffres en disent long sur la sensible augmentation du nombre des usagers des substances psychoactives, d’une part, et l’évolution de la culture du sevrage, d’autre part. La prise en charge des usagers de drogues, au service «Espoir» constitue la solution d’appoint en matière de lutte contre la toxicomanie. «La prise en charge est destinée aux personnes présentant des troubles lis à la consommation des drogues. Il s’agit d’un processus complet qui aborde tous les aspects du rétablissement et qui est assuré par une équipe pluridisciplinaire comportant des médecins, des psychologues, des éducateurs, des animateurs culturels et des paramédicaux», indique Dr Mokdad. Elle s’articule autour de deux axes complémentaires : l’aide au sevrage en ambulatoire suivie d’une cure de réhabilitation psychosociale. «Les psychothérapies individuelles et les thérapies de groupes jouent aussi un rôle essentiel dans le rétablissement en créant un climat de partage des expériences, de gestion du stress et d’entraide entre les patients», renchérit le responsable.
Au cas par cas !
Il est utile de savoir que la prise en charge est assurée au cas par cas. Ses fondements consistent, d’abord, en l’identification des divers aspects à même d’impacter la dépendance du patient envers les substances psychoactives, notamment la gravité de l’addiction, l’état de santé physique et celui mental du patient. D’autant plus que certaines conditions socioéconomiques risquent de jouer un rôle notable dans sa descente aux enfers, notamment ses difficultés d’intégration familiale et sociale et sa situation professionnelle et économique, parfois précaire…
Une fois tous ces éléments cernés, la communauté thérapeutique «Espoir», comme il plaît au directeur du ce Complexe sanitaire de l’appeler «staff spécialisé», procède à une analyse approfondie des risques cliniques à plusieurs niveaux, à savoir celui gastroentérologique, neurologique et infectieux. Et c’est à partir des résultats obtenus que l’équipe pluridisciplinaire décide du traitement personnalisé. «Cette évaluation préliminaire permet aussi d’anticiper sur les éventuelles complications qui pourraient survenir durant la thérapie et d’intervenir d’une manière efficace et rapide», ajoute le responsable.
Vers un mode de vie sain
Parallèlement au traitement médicamenteux, le staff oriente les patients durant leurs séjours curatifs vers un mode de vie sain, respectueux de leurs besoins nutritionnels et physiques. En effet, s’adonner à une activité physique et autre récréative contribue certainement, au rétablissement de l’équilibre psychique et physique. L’appui et l’accompagnement des patients dans leur périple pour la réintégration sociale et la reconstruction de l’autonomie et de l’estime de soi se poursuivent même après le séjour curatif.
Outre l’appui aux patients, afin qu’ils parviennent, enfin, à briser les chaînes de la dépendance, cette thérapie les aide à rétablir tout ce qui a été lésé par la toxicomanie, dont l’estime de soi. «Cette approche thérapeutique est de nature à rétablir la relation entre le patient et les représentants de la loi, de maintenir l’abstinence — une étape importante dans le processus de rétablissement — et d’aider le patient à se réapproprier son identité», souligne Dr Mokdad. Et d’ajouter : «Pour maintenir l’abstinence, le patient apprend à développer des mécanismes de gestion des envies, de renforcer la résistance face aux déclencheurs de la consommation et de promouvoir les stratégies de coping alternatives pour faire face aux défis, sans recourir aux substances psychoactives. Se réapproprier son identité exige une exploration approfondie de l’estime de soi, du développement personnel et de la reconstruction de l’image de soi en dehors de la dépendance».
Il est à noter que l’hospitalisation des patients consommateurs de drogues au service «Espoir» est payante. Et c’est bien le patient — ou sa famille — qui doit assumer totalement les frais et ce, suite à l’incapacité de la Cnam à couvrir les frais des soins et des séjours et ce, conformément à la loi 92-52.