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Le «carton rouge» de la Haica

Le paysage audiovisuel demeure en deçà des aspirations du téléspectateur. Qui a droit ou bien à une diarrhée de débats politiques lassants et exaspérants ou d’émissions où l’on se plaît à faire le pitre et le clown déplaisants et maladroitement agrémentés par des plaisanteries de mauvais goût et de vulgarités «désobligeantes» pour les familles réunies autour de leurs petits écrans. Alors que les protagonistes meurent de rire à n’en plus finir, pour des absurdités, les téléspectateurs sensés, auxquels on cherche à arracher le rire, meurent de regret et pleurent le niveau si bas de ces émissions.

Il a raison, M. L’arbitre !
Heureusement que les messieurs-dames de la haute instance de communication audiovisuelle (Haica) veillent au grain et se font marquer présent, dès lors que le respect de la règle du jeu se fait marquer absent.
C’est encore une fois Ala Chebbi qui provoque la «levée de boucliers de notre bouclier médiatique». Oui, le bel ami Ala qui a eu paradoxalement à récolter par alternance les prix et les sanctions réunis, s’est vu interdit de nous dire bonjour (à El Hiwar Ettounsi) comme d’habitude le soir de chaque vendredi. Ceci pendant deux mois à compter du 22 mars dernier, décide la Haica. De plus, la chaîne concernée est sommée de retirer l’émission «incriminée» de son site officiel ainsi que de toutes ses pages, existant sur les réseaux sociaux, motifs annoncés par la Haica :
– Irrespect de la dignité de l’être humain et l’intimité de sa vie privée
– Diffusion de prises de position et de commentaires faits par l’animateur de l’émission «Maâ Ala», minimisant le danger de la violence exercée sur les femmes dans toutes ses formes. Ceci en contradiction avec les termes de la Constitution tunisienne et des lois en vigueur.

De quoi avoir la chair de poule !
Oui, ceux qui ont regardé l’émission en question ne peuvent que donner raison aux censeurs si vigilants et leur tirer le chapeau. Personnellement, j’ai eu la chair de poule en suivant l’émission que je n’ai pas eu le cœur et le courage de terminer. Les révélations et les détails scandaleux arrachés par Ala et assortis par celui-ci de commentaires non moins scandaleux, étaient, franchement dit, impropres à la diffusion! Ala et compagnie se seraient trompés d’adresse. Une confrontation si odieuse n’aurait mérité sa place que dans les bureaux hermétiquement fermés de la brigade des mœurs ou du juge d’instruction !

Des déboires incroyables !
Pour ceux qui auraient pris le train en marche et eu la chance ainsi que le privilège d’avoir raté l’émission, voilà ce qu’il en est, sans détails, bien évidemment : une dame s’est fait inviter par Ala pour raconter ses incroyables déboires. Elle devait accuser son père de l’avoir… harcelée sexuellement depuis l’âge de 13 ans, au même titre que ses sœurs! Et se plaindre de son époux qui la battait constamment, tel Sganarelle de Molière. Ces faits voulus, sur insistance de Ala, exposés sur antenne par la victime dans leurs menus détails, étaient banalisés et parfois même justifiés d’une manière ahurissante par l’animateur.
Cela dit, ce qui mérite d’être dit, c’est que mon cher confrère Ala aurait fait son mea-culpa et reconnu sportivement son imprudence dans les coulisses.

Des arguments insuffisants
Lors de l’audition par la Haica de la représentante juridique d’El Hiwar Ettounsi, Me Sonia Dahmani par délégation, accompagnée de l’animateur, l’avocate et chroniqueuse si bien aimée s’est évertuée à soutenir que l’intéressé avait fini, lors de l’émission en question, par se rattraper en dénonçant les agissements immoraux du père et la violence matérielle, exercée par le conjoint sur l’invitée de l’émission.
Ce qui aurait été jugé par la Haica insuffisant pour brandir et innocenter l’animateur. D’où le «carton rouge» adressé par le comité arbitral à Ala.

Il lui manquait un dessin !
Je dois à la sincérité d’avouer, par acquis de conscience, que Ala Chebbi demeure, certes, un animateur d’une valeur sûre, s’étant forgé une place de choix dans notre paysage médiatique. Et s’est fait constituer une immense galerie sympathisante dans nos périmètres et ailleurs dans le monde arabe. Exception faite de cette émission scandaleuse, j’ai toujours vu Ala crier haut sa condamnation de la violence contre la femme, l’enfant, etc., sacraliser les parents et donner de belles leçons de civisme, de patriotisme, etc.
Mais, grand mais, le grand tort quasi chronique de Ala, c’est qu’il a toujours cherché à soutirer des détails atteignant les bonnes mœurs. Ceci, même si les messages, transmis par insinuation, sont clairs et nets pour tous. L’animateur donne toujours l’air de n’avoir rien compris. Et cherche obstinément à mieux comprendre pour tomber dans l’interdit. Moralité : une valeur dite sûre perdrait de sa valeur, sans le respect des hautes valeurs.

Larbi DEROUICHE

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