Le «moment » de ce mars 2019 ? Peut-être pas tant les mesures annoncées après le drame d’Errabta. Ni tout à fait ,encore, la dernière hausse du prix des carburants. De celles-là on peut tout prévoir ,on le sait. La réforme de la santé publique risque, comme beaucoup d’autres qui la précèdent, de rester lettre morte. C’est généralement une affaire de temps; c’est, aussi, le propre des gouvernances débordées, «acculées». Quant à la hausse des carburants,on en a eu d’autres,et d’autres encore sont attendues,les Tunisiens en ont comme «pris l’habitude», le plus probable est qu’ils s’y feront, à nouveau.
Non : on pense à Abir Moussi, nous. La leader du «Parti destourien libre » monte en cote et au créneau voilà plus d’une année déjà.Profitant de la désillusion quasi générale. D’un système politique déficient, et d’une économie et d’une population aux abois.
Le « processus » est connu. Historiquement répété et prouvé .Quand les révolutions hésitent, périclitent,les peuples regrettent les régimes déchus,s’en retournent, yeux fermés, vers le passé.
La Révolution française perdit pied presque à sa naissance. Elle connut la terreur jacobine sous Robespierre,sa forme « pure et sanguinaire ».Mais aussitôt après, et pour trois quarts de siècle environ, toutes sortes de « contre révolutions » : le directoire ,le bonapartisme, la restauration et le second Empire. L’ascension de l’extrême droite populiste,aujourd’hui en Europe,s’explique par les mêmes causes, les mêmes poussées de nostalgie.
Idem pour Abir Moussi et pour la Tunisie, huit ans après janvier 2011.L’avocate, « fieffée » rcédiste et benaliste, a eu l’idée et l’audace de résister à la vague revancharde des débuts. Puis,une fois les fureurs calmées, de «sortir la tête de l’eau» pour exploiter avec une rare adresse et le mécontentement social et le révisionnisme politique ambiant.
De l’intuition et du caractère. Engager une carrière politique ne demande d’abord que cela .Mais la réussir demande aussi de la chance. Et de la chance,il faut en convenir, Abir Moussi, en a eu.
Les circonstances l’ont beaucoup aidée. On l’a déjà dit. Jamais le RCD de Ben Ali n’aurait « remonté dans l’estime des Tunisiens » si l’après-révolution(la transition) n’avait occasionné autant de mal au pays.
Mais ce sont ses adversaires politiques qui lui ont le plus ouvert la voie.
Ces adversaires ont commencé, dès après les premières élections démocratiques de 2014 ,par prendre leurs propres électeurs à défaut. L’alliance avec le parti islamiste, « tournée et retournée » dans tous les sens et par la presque totalité des formations politiques,a fait fuir ces électeurs (évalués à près de deux millions)ou vers la décision d’abstention ou vers l’autre (désormais le seul) «refuge» du parti du destour et de Abir Moussi.
En ce mois de mars 2019, surtout, à seulement quelques mois des élections, ces mêmes adversaires viennent de renforcer «inespérément» la position de leur concurrente aux urnes. Ils l’ont attaquée, lors de sa réunion à Sidi Bouzid, avec une rare violence, insultes, jets de pierres ,vols et braquages. Pratiques miliciennes, rappelant aux hideux souvenirs de 2012 et 2013 et des funestes « ligues de protection de la révolution ». Après cela,on s’en doutait bien,les sondages ont suivi,tous en faveur de Abir Moussi. Ainsi que l’appui solidaire et la sympathie redoublée des Tunisiens.
Pas qu’une dérive de campagne : un véritable cadeau !