Les temps d’attente sont très longs, le nombre d’agents de guichets est réduit de moitié dans les administrations publiques, certains affiliés sont irrités et les signes de nonchalance ne trompent pas. Les têtes sont ailleurs !
«Revenez la semaine prochaine!» remplace désormais, au cours de ce mois de Ramadan, la réplique traditionnelle «Reviens demain». Une formule maintes fois entendue dans les administrations tunisiennes. Prenons le cas de la Cnam : les difficultés financières de cette dernière, qui se sont aggravées au fil des ans, sont un secret de polichinelle. Ce qui n’a pas manqué d’affecter la qualité des prestations et des services de santé de base. De nombreux affiliés ont fini par jeter l’éponge depuis de longues années à cause d’un délai de remboursement long et tardif. Et pour cause : le faible montant consacré au parcours de soins limité à deux cents dinars. Une enveloppe tellement maigre qu’elle ne couvre même pas les frais d’un bilan sanguin complet ou d’un examen au scanner ou d’une radiographie.
Des heures à poireauter
Il est 9h30 en ce mardi ensoleillé. Un tour dans l’agence Cnam avenue Jean-Jaurès et tout de suite les mauvaises surprises pleuvent sur votre tête ! «Quatre-vingt-cinq personnes en attente». C’est ce que mentionne le ticket retiré du distributeur automatique situé au niveau de l’accueil. Il signale que l’on devra prendre son mal en patience forcément. Le temps moyen d’attente estimé est de vingt minutes, ce qui paraît absurde et irrationnel. Et pour cause, le monde qui attend paisiblement son tour dans la salle vous fait comprendre à travers leurs mines renfrognées que vous n’en aurez pas forcément pour votre argent. Autrement dit, vous avez peu de chances que votre demande soit pleinement satisfaite. A 10h00, seules une dizaine de personnes sont passées, alors qu’une quarantaine d’affiliés attendent patiemment leur tour. A ce rythme, il faudra attendre non pas vingt minutes mais trois ou quatre heures encore. «Je vous conseille vivement d’aller faire vos courses et de revenir après».
Il est vrai que le bal des allers et retours à l’entrée de cette agence démontre combien les affiliés tiennent à voir leur démarche satisfaite. Coûte que coûte et vaille que vaille. Pourtant, en réalité, beaucoup ressortent l’air désabusé, presque pas surpris pour un sou, d’être obligés de compléter telle ou telle pièce justificative. «On m’a demandé de légaliser la signature à la municipalité. Je ne renonce pas, j’y vais de ce pas». Mais le temps défile, le bonhomme a dû consacrer une matinée pour terminer sa démarche administrative. D’autres affiliés affirment en forme de renoncement ou de résignation qu’ils n’ont rien pu faire étant donné qu’ils n’ont pas tous les éléments nécessaires pour valider le dépôt du dossier de soins.
La lourdeur administrative a la peau dure car deux guichets tournent au ralenti. Seuls trois, quatre, cinq et six fonctionnent à un rythme normal. Où sont les agents? Aux abonnés absents, semble-t-il, préférant vaquer à d’autres occupations en période de farniente due aux veillées ramadanesques…
Des motifs d’espoir demeurent avec la mise en place progressive du système de remboursement de soins grâce à la nouvelle carte électronique «Labes». Jeudi dernier, M. Kamel Maddouri, directeur général de la sécurité sociale au sein du ministère des Affaires sociales, affirmait lors d’un séminaire de formation sur «la nouvelle loi de l’âge de départ à la retraite» que l’Etat s’engagera à garantir la couverture sociale à l’ensemble des Tunisiens à l’horizon 2021. Pour l’heure, il existe au moins 10% de la population qui ne dispose d’aucune couverture sociale digne de ce nom. La protection sociale doit se faire sous le prisme de la solidarité nationale et l’implication de tous les adhérents aux caisses de sécurité sociale.