M. Toshifumi Egusa, représentant résident de la JICA en Tunisie : «La technologie japonaise dans nos projets tunisiens»

M. Toshifumi Egusa

La coopération tuniso-niponne ne cesse de se développer au fil des ans à travers la contribution de l’Agence japonaise de coopération internationale (Jica) qui a pu réaliser plusieurs projets d’envergure grâce à un financement avantageux. D’autres projets sont en cours dans le cadre d’une coopération réussie. M.Toshifumi Egusa, représentant résident de la Jica en Tunisie, nous parle de ces projets et des perspectives de la coopération.


Quels sont les derniers projets de la Jica en Tunisie ?
Plusieurs projets importants seront réalisés en Tunisie comme la station de dessalement à Sfax qui fait l’objet d’une évaluation technique. Des sociétés internationales vont engager les travaux de ce projet. Une fois l’évaluation technique terminée, on va choisir les sociétés qui seront chargées des travaux. Il s’agit maintenant d’accélérer la réalisation de ce projet pour que les habitants de Sfax puissent en bénéficier dans les meilleurs délais. Car nous avons conclu la convention du crédit depuis le 14 juillet 2017 et cela fait beaucoup de temps.

A noter que la valeur du crédit est de 800 MD avec un taux d’intérêt de moins de 1%, un remboursement sur 30 ans avec 10 ans de délai de grâce, ce qui veut dire que ce prêt est à conditions préférentielles. Ce projet qui va améliorer les conditions de vie des 600.000 habitants de Sfax fournira 100.000 m3 d’eau par jour. Le plus important maintenant est d’accélérer la réalisation du projet, ce qui est d’ailleurs exigé par les habitants.

Dans le domaine de l’eau, je peux citer aussi le plan d’action urgent du réservoir du barrage de Sidi Salem réalisé en 1975 pour fournir de l’eau potable et de l’eau d’irrigation à l’agriculture. Au fil des ans, les sédiments se sont accumulés sur le barrage, ce qui a diminué sa capacité de rétention d’eau et affecté sa qualité. A la faveur de ce projet, la technologie japonaise utilisée dans nos barrages et qui a montré son efficacité sera utilisée pour ce barrage.

A noter que l’accumulation des sédiments est un phénomène naturel qui concerne tous les barrages même ceux qui se trouvent au Japon. La technologie à utiliser consiste à éliminer ces sédiments en vue d’améliorer le rendement dudit barrage. La convention a été signée entre la Jica et les autorités tunisiennes et la société choisie sera chargée des travaux. Ce projet va avoir des répercussions positives aussi sur la vie des citoyens d’autant plus que le barrage permet aussi de contribuer à la lutte contre les inondations. Un comité de pilotage veillera à la réalisation du projet. Un autre projet concerne la protection du Grand-Tunis contre les inondations.

L’objectif est de minimiser les dommages causés par les inondations et les risques en améliorant le contrôle des inondations dans la partie ouest du Grand-Tunis et en construisant un nouveau canal d’évacuation du lac de Séjoumi vers l’Oued Méliane. Dans le même domaine, on peut citer le projet de protection des villes contre les inondations de Oued Mejerda qui connaît lui aussi des problèmes de sédimentation. Un crédit de 230 MD est mobilisé à cet effet.

On a constaté que les citoyens sont contents de ce projet qui a protégé les villes contre les inondations et a même permis de revaloriser le prix des terrains. Le cadre de vie a été sensiblement amélioré grâce à une amélioration de l’infrastructure.

Quels sont les problèmes rencontrés lors de la réalisation des projets ?
Chaque projet engagé est surveillé par un comité de pilotage qui échange les points de vue avec les représentants des autorités. Cependant, plusieurs intervenants sont impliqués dans le projet comme la Sonede, la Steg, les télécommunications, ce qui peut retarder la réalisation vu qu’il est nécessaire de contacter chaque intervenant et de passer par des procédures bureaucratiques compliquées.

Pour le projet de la station de dessalement de l’eau à Sfax, par exemple, on a constaté que le nombre des ingénieurs mobilisés par la Tunisie est limité alors que l’administration comprend un nombre important de fonctionnaires.

Quels sont les résultats du programme Kaizen introduit dans certaines entreprises tunisiennes?
Le programme japonais Kaizen est effectivement introduit dans plusieurs entreprises tunisiennes. D’ailleurs, le niveau de réalisation du programme en Tunisie est appréciable. Dans le cadre de la coopération Sud-Sud, nous avons organisé en octobre en collaboration avec le ministère de l’Industrie et des Pme, une rencontre au sujet de ce programme avec la participation d’autres pays comme l’Algérie, le Maroc et le Burkina Faso. Le concept Kaizen a été bien étudié en Tunisie qui demeure leader dans ce domaine et peut échanger son expérience avec d’autres pays.

C’est un concept qui permet de changer la mentalité sans acheter de nouveaux outils ou matériels, et ce, pour améliorer la productivité et la qualité. Une société italienne de grande marque en sous-traitance avec une société tunisienne qui a introduit le concept Kaizen a apprécié l’amélioration de la qualité des produits après cette nouvelle expérience.
Grâce au concept Kaizen, tout le personnel de l’entreprise, depuis le PDG jusqu’à l’ouvrier, est impliqué dans la production et l’amélioration de la qualité. Ce programmpe doit continuer en Tunisie grâce à des formateurs tunisiens.

Quels sont les critères adoptés pour financer un projet en Tunisie?
Chaque projet répond à une demande et à des exigences. D’une façon générale, le projet à financer par la Jica doit contribuer à réduire les disparités régionales, à renforcer la compétitivité et à protéger l’environnement comme c’est le cas et l’accord du gouvernement tunisien pour la mise en œuvre de tout projet. Et on souhaite, si possible, profiter de la technologie japonaise dans la réalisation de ces projets. Cela donne une image d’un pays ouvert sur les autres expériences.

On peut profiter de la technologie de pointe du Japon comme c’est le cas, par exemple, pour le projet de dessalement de Sfax. Cette expérience permet également aux sociétés japonaises impliquées dans les projets d’obtenir des informations utiles sur la Tunisie pour une future collaboration. Grâce à ces projets, il est possible aussi d’assurer le transfert technologique. D’ailleurs, nous disposons d’un projet d’assistance technique pour réduire l’eau consommée et non facturée dont l’agence d’exécution est la Sonede et le site du projet pilote est Médenine-ville et Zarzis.

L’envoi des experts japonais, la fourniture d’équipements nécessaires, la formation font l’objet d’un problème, cependant. C’est que les fonctionnaires japonais en Tunisie sont appelés à payer des taxes alors que ce travail est fait à titre de don. Les pourparlers sont en cours avec les autorités tunisiennes en vue d’exonérer ces fonctionnaires des taxes.

Quelles sont les perspectives de la coopération entre la Jica et la Tunisie ?
Cela fait de longues années que la Jica travaille en Tunisie en contribuant à la réalisation de nombreux projets d’envergure. Il faut tenir compte de la position géographique avantageuse de votre pays. Le Japon veut bien partager sa technologie avec la Tunisie qui est passée à un régime démocratique, l’unique dans le monde arabe.

Des élections ont eu lieu dans le calme absolu et la transparence, sans violence ni problèmes majeurs. C’est aussi pour cela que nous voulons collaborer avec la Tunisie dans une démarche gagnant-gagnant en renforçant les investissements directs. La Jica est déterminée à emprunter ce chemin de la coopération dans un futur proche.

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