Accueil Allons au cinéma «Sur la transversale» (Aal Bar) de Sami Tlili, actuellement dans les salles de cinéma : Foot et politique, les jeux et les enjeux

«Sur la transversale» (Aal Bar) de Sami Tlili, actuellement dans les salles de cinéma : Foot et politique, les jeux et les enjeux


Une légende peut en cacher une autre comme un pan de l’histoire nationale par exemple ! Et c’est ce qui ressort du film documentaire de Sami Tlili, présenté en sélection officielle lors des JCC 2019 et actuellement sur nos écrans.


Sami Tlili, auteur du documentaire «Maudit soit le phosphate», revient avec «Sur la transversale», un film qui s’inscrit dans la même vision et la même veine que le jeune réalisateur semble bien maîtriser. «Dans les deux films, je pars d’un fait historique, mais je le dépasse : je ne fais pas dans l’énumération des faits historiques. Le fait historique n’est qu’un départ pour moi afin de raconter une histoire humaine. Après le premier film, j’ai enchaîné avec «Sur la transversale» et je peux dire qu’il y a un lien certain entre les deux», nous a déclaré Sami Tlili lors d’une interview accordée à La Presse.
«Sur la transversale» est un document d’une grande importance historique, puisqu’il titille une mémoire jusque-là reléguée aux oubliettes et Dieu sait si la Tunisie en a de ce genre de mémoire qu’elle enterre comme un linge qu’on ne veut plus voir. Le synopsis annonce déjà la couleur. Pour la mémoire collective des Tunisiens, 1978 est le souvenir indéfectible de cette fameuse équipe nationale de foot et de son «épopée vers l’Argentine». Un mythe intergénérationnel qui a jalonné mon enfance accompagné d’une question intrigante longtemps restée sans réponse: pourquoi ma mère refusait de regarder le foot ?
Et si, en fin de compte, «1978 n’était pas qu’une histoire de foot ?». Et en effet, 1978 n’était pas qu’une histoire de foot, mais plutôt l’histoire d’une crise politique, la plus grande qu’a connue la Tunisie. Une époque où le torchon brûlait entre Bourguiba et la centrale syndicale. Résultat des courses : la grève générale. Mais entre Bourguiba et Habib Achour, le peuple tunisien bouillonnait avec pour seule soupape le football. L’équipe nationale légendaire de 1978 était une manne du ciel pour faire taire les voix dissidentes et effectuer l’une des plus grandes purges de notre histoire au sein du syndicat. Les intervenants dans ce documentaire démêlent petit à petit cet écheveau et mettent à nu les conspirations de l’époque. Souhir Belhassen, journaliste et militante, Hichem Abdessamad, historien, Fethi Belhaj Yahya et Gilbert Naccache, militants et prisonniers politiques, Taïeb Baccouche, syndicaliste et membre du comité central de l’Ugtt, Mohamed Ennaceur, Béji Caïd Essebsi, Taher Belkhodja, Foued Mebazaa, hommes politiques du gouvernement de Bourguiba, Mohamed Kilani, journaliste sportif, Khaled Guesmi, joueur de l’équipe nationale en cette Coupe du monde, et Mohamed Ali Okbi, cinéaste. Tous ces intervenants donnent un éclairage sur l’époque et nous permettent de lire l’actualité avec un autre binocle . Et c’est en ce sens que le pari de ce film est réussi ! C’est qu’en fait, il fait une relecture de l’histoire (même subjective et cela est assumé par le réalisateur). Le film est également d’une grande actualité surtout lorsqu’on le superpose aux événements post-révolutionnaires en Tunisie. «Sur la transversale» est un travail immense sur la mémoire et les archives qui y figurent, donnant une très grande force à son propos. A découvrir surtout par une jeune génération qui a encore la chance d’évoluer dans un contexte de libertés et qui est appelée à développer sa conscience politique à travers l’histoire de son pays.

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