Vendredi 13 décembre à 10h00, à la faculté des Lettres, des Arts et des Humanités de l’Université de La Manouba, a eu lieu une cérémonie en hommage à la «Chaire Sicile Vincenzo Consolo pour le dialogue de Cultures et de Civilisations», dédiée à l’un des plus grands écrivains siciliens du XXe siècle qui a gardé, jusqu’à la fin de ses jours, un lien très fort et particulier avec la Tunisie, son deuxième pays. Une cérémonie, qui a vu la participation de S.E. L’ambassadeur d’Italie, Lorenzo Fanara, de Mme Maria Vittoria Longhi, directrice de l’Institut culturel italien, de beaucoup d’universitaires, de chercheurs, de personnel administratif et d’étudiants. Une lettre de remerciements, lue lors de la cérémonie, a été envoyée au président de la Chaire, par le ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, Slim Khalbous.
Les travaux ont été ouverts par le doyen de la faculté des Lettres de La Manouba, Abdesslem Aissaoui, qui a prêté une attention toute particulière à cette journée et à l’accueil de ses hôtes. La Chaire a été inaugurée le 22 février 2017 à la faculté des Lettres de l’Université de La Manouba par la forte volonté du Pr Alfonso Campisi, avec le soutien de l’Institut culturel italien, du ministère de l’Enseignement supérieur, et de ses conseillers. Des cours de langue, culture et littérature siciliennes sont dispensés en option, à la faculté des Lettres, des Arts et des Humanités de l’Université de La Manouba, aux étudiants en Master 1 et 2, spécialité italien.
C’est une première mondiale, car aucune autre université dans le monde, au moment de la fondation de la Chaire, ne prévoyait l’enseignement universitaire du sicilien. Mais il y un mois, l’une des plus importantes universités américaines informe le département d’italien de La Manouba que suite à l’expérience tunisienne, assez bien réussie, une Chaire de Langue et culture siciliennes verra le jour en 2020/21. L’idée et la volonté de vouloir fonder la Chaire sont nées dans un moment historique assez difficile et particulier pour la Méditerranée : crises de tout ordre, économique, religieuse, civilisationnelle, humanitaire, identitaire et de migration clandestine… qui transforment notre Méditerranée en lieu de guerre et de mort.
Le dialogue n’existe plus ! Un seul mot d’ordre : guerre
La Chaire Sicile a ainsi eu la prétention de vouloir ouvrir ce dialogue entre les deux rives et combattre les préjugés et les clichés dus à l’ignorance et au massacre de nos idéaux ! La Tunisie et la Sicile, mon pays d’accueil et de cœur le premier, ma région d’origine le second, ne sont qu’à 130 km l’une de l’autre et le Cap Bon est à seulement à 56 km de l’île italienne de Pantelleria.
La Tunisie et la Sicile sont au centre de la Méditerranée et qui dit Méditerranée, dit centre du monde, et ce, depuis les Carthaginois et les Romains. La Sicile et la Tunisie ont une histoire millénaire commune et l’avenir de l’une est certainement lié à l’avenir de l’autre. Elles sont complémentaires et indivisibles ! Le but de la « Chaire Sicile Vincenzo Consolo pour le dialogue de Cultures et de Civilisations » est celui de vouloir encourager les étudiants, les intellectuels et les universitaires à développer ce dialogue inter-culturel et inter-religieux et pousser les peuples à se parler et à se connaître davantage. Le dialogue pour la connaissance de l’autre est le point de force de la Chaire. Il s’agit d’une Chaire culturelle qui doit promouvoir la culture méditerranéenne des deux rives et promouvoir les échanges culturels de pair à pair, d’égal à égal, pour un dialogue sud/sud, à travers l’organisation de colloques, de conférences, de cours de langue…
En effet, le département d’Études italiennes de l’Université de La Manouba organise chaque année au mois de février et pour la sixième année consécutive un colloque international d’Études méditerranéennes pour favoriser ce dialogue interculturel, et ce, sous l’égide de la Chaire Sicile et de l’Aislli (Association internationale pour les Études de Langue et de littérature italiennes), présidence Afrique, intégrée au sein de l’Unesco en avril 1950 et dont le siège inauguré en 2014 est aussi à la faculté des Lettres de La Manouba. Ce colloque voit la participation d’un nombre important de chercheurs universitaires, doctorants tunisiens et étrangers qui se réunissent chaque année pour parler de Méditerranée. Cette année, les chercheurs seront appelés à travailler sur le thème de «La folie entre création et destruction».
Depuis 2017, les cours de langue et culture siciliennes et d’histoire de la Méditerranée servent de vecteur pour mieux faire comprendre à nos étudiants la culture italienne et notamment sicilienne et découvrir toutes les ressemblances culturelles qui nous unissent, allant de la gestualité, à la cuisine, des rapports inter-personnels à l’importance vitale du tact, à ce besoin de se toucher, de s’embrasser quand on se rencontre, quand on se quitte, de se comprendre avec un seul geste, un seul regard, sans oublier les innombrables prêts et calques linguistiques présents dans nos deux langues : la tunisienne et la sicilienne.
Nos étudiants arrivent alors à des conclusions époustouflantes car ils comprennent que nous sommes deux peuples très similaires, avec nos différences, certes, mais très similaires. Et c’est là que la langue agit comme vecteur culturel, à travers lequel les cultures sicilienne et tunisienne se rencontrent. Je pense que nous tous sommes fatigués des conflits, des guerres de civilisation, de religion… Nous avons touché le fond, mais parfois il faut toucher le fond pour refaire surface. La Méditerranée est un espace économique et culturel très important et commun à nous tous, dans lequel tous les peuples peuvent et doivent vivre en paix, avec le respect absolu de leurs différences culturelles, religieuses, linguistiques… Il y a de la place pour tous et c’est alors là que la «Chaire Sicile pour le dialogue de Cultures et de Civilisations», faisant le pont entre les deux rives, intervient et se positionne comme un interlocuteur privilégié, car la culture n’a pas de frontières.
La «Chaire Sicile Vincenzo Consolo pour le dialogue des cultures et des civilisations» et l’AISLLI, présidence Afrique, sont présidées par le Pr Alfonso Campisi.