Le monde médiatique et la Tunisie viennent de perdre un homme de grand calibre ayant toujours su être l’ami de tous. L’ayant côtoyé de près pendant toute sa brillante carrière professionnelle, surtout lors de son long passage au journal La Presse, en tant que commentateur de la politique internationale puis, du temps de feu Amor Belkhiria, en tant que rédacteur en chef, avant d’être promu au poste de P.D.G. de la SNIPE La Presse. Les relations du collègue et ami sont demeurées horizontales avec tout le beau monde du journal. Il se refusait à se comporter et à agir à la manière d’un chef. Il faisait fonctionner la rédaction puis toute l’institution avec le sourire et le calme olympien propres à lui.
Devant les cas les plus agaçants et les plus enquiquinants, Slah résolvait les problèmes avec douceur et ne se départait jamais de sa sérénité coutumière. Slah, la belle plume, adorait jusqu’à la moelle les plumes brillantes, telles que, en particulier, celles de feu Mohamed Mahfoudh et Sadok Ben Mahmoud.
Pour les beaux papiers couleur, il avait l’habitude d’en charger l’une de ces deux sommités rédactionnelles disponible.
Toujours cool, toujours gai !
Le bureau de Slah était toujours ouvert à tous, le cœur, qui vient de la trahir, aussi… Lors qu’il n’était pas au bureau, il faisait le tour de la rédaction, pour lancer des propos amusants à l’adresse des journalistes présents, faire le suivi des dossiers répartis sur les membres de la rédaction, complimenter les uns pour leurs efforts louables, taquiner les autres, avec beaucoup de finesse et de tact, pour leurs défaillances (retard dans la remise des papiers commandés, manque de ponctualité, etc.).
Le disparu détestait demeurer collé à son fauteuil. Il avait l’habitude de superviser et lire les articles qui lui étaient remis en arpentant les couloirs du journal, avant de les remettre aux secrétaires de rédaction des diverses pages.
La crainte de ne pas être cru !
Parmi les souvenirs que je garde en tête, en tant que proche de l’homme dès les premiers jours, c’est que, sitôt désigné rédacteur en chef (alors qu’il venait à peine de dépasser ses vingt printemps), il me demandait de l’accompagner dans ses réunions officielles. Pourquoi ? Parce qu’il se sentait trop jeune par rapport au poste si important qu’il occupait. Craignant de ne pas être cru en tant que tel, il m’invitait à le présenter, cherchant à dissiper tout doute.
Une promesse sans lendemain
Slah m’a promis de venir me voir à Raf Raf et passer toute une journée avec son beau-frère et non moins ami Chedly Skanji et le bel ami commun Mondher Ben Dana. Mais pris par le tourbillon d’un quotidien surchargé, malgré sa retraite dorée, la promesse de nous marrer et de nous replonger dans les beaux souvenirs du bon vieux temps est demeurée sans lendemain.
La rencontre n’aura jamais lieu
Tenez, pas plus tard que trois jours avant son décès, j’ai eu à commenter l’une de ses interventions sur facebook en lui écrivant en ces termes: «Slah, ça fait un bail qu’on ne s’est pas vus. Je meurs d’envie de te revoir pour nous amuser et nous marrer avant de mourir!» Réponse immédiate: «Inchallah, ça sera au plus tôt». Nous ne savions pas alors que la rencontre n’aura jamais lieu.… Et que la mort l’attendait au tournant.
Les résultat d’une précieuse devise
La devise de Slah était : «Le meilleur gain est d’avoir chaque jour un ami de plus et un ennemi de moins». Il n’avait cessé de me le confier en termes de conseils.
L’âme de Slah devait confirmer le succès de cette devise, à travers les funérailles impressionnantes qui lui ont été réservées. Ceci à la manière des illustres personnages. Un monde fou, hommes politiques, hommes de plume, hommes de lettres, artistes, tous étaient au rendez-vous pour se recueillir devant le défunt et lui faire un ultime adieu, traduit par l’oraison funèbre à la fois expressive et émouvante du confrère Raouf Yaïche, ex-proche collaborateur du disparu.
L’un des absents malgré lui aux funérailles a demandé après coup à l’un des présents.
— Qui a été présent aux funérailles ?
— Dites plutôt qui n’a pas été présent ? répondit-il.
Cela veut tout dire…