Jeunes et emploi : Attention à la prolifération du sous-emploi !

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«Inadéquation des qualifications en Tunisie : quels sont les déterminants du sous-emploi?», tel est l’intitulé d’une récente étude élaborée par l’Institut tunisien de la compétitivité et des études comparatives.


Actuellement, la question de l’inadéquation entre la formation et l’emploi est un enjeu très important dans la Stratégie nationale pour l’Emploi en Tunisie. Cette étude cherche à compléter l’analyse des données sur la population économiquement active en Tunisie par une analyse des déterminants individuels de l’inadéquation verticale entre la formation et l’emploi (sur-éducation ou sous-emploi).
Les résultats de l’estimation du sous-emploi, à partir des données de l’enquête sur l’emploi de 2013, ont montré qu’un diplômé sur cinq est sous-employé (taux de sous-emploi 18,9%). Au début de la carrière professionnelle, la situation de sous-emploi est fréquente pour les jeunes diplômés, en particulier ceux âgés entre 20 et 24 ans, et elle touche d’une manière proportionnelle les femmes et les hommes.

Risque de sous-emploi
En outre, les diplômés tunisiens sont disproportionnellement affectés par le sous-emploi dans la mesure où les techniciens supérieurs, les maîtrisards en économie, gestion et droit, et les maîtrisards en Lettres, Sciences humaines et sociales sont les plus touchés par ce phénomène. Enfin, l’agriculture, la construction et le commerce représentent les secteurs à fort taux de sous-emploi. Au-delà de cette analyse, l’estimation d’un modèle Probit nominal pour l’identification des facteurs déterminants de risque de sous-emploi a montré que la spécialité des études supérieures, le type de contrat, le lieu de travail (public ou privé), le secteur d’activité sont les facteurs qui influencent plus la probabilité de sous-emploi.

Longtemps, le diplôme en Tunisie a joué un rôle très important dans l’insertion professionnelle des jeunes. Néanmoins, aujourd’hui, les conditions d’insertion des diplômés se sont dégradées. Elles sont devenues très contrastées selon les niveaux, les filières et les spécialités de formation. La détérioration des conditions d’insertion des diplômés tunisiens est, en effet, la conséquence de trois facteurs. Le premier est la hausse de l’éducation qui a caractérisé la population tunisienne depuis deux décennies. Ce phénomène est le résultat d’une politique sociale axée sur la promotion des investissements dans l’éducation.

En conséquence, chaque nouvelle génération est plus diplômée que la précédente. Le deuxième facteur est la faible création d’emploi par l’économie tunisienne au regard du nombre de demandeurs d’emploi, essentiellement diplômés, dans le marché du travail. Depuis la crise économique de 2008 jusqu’en 2018, l’économie tunisienne est en situation de récession où le taux de croissance du PIB n’a pas dépassé 3%.

Inadéquation des qualifications
Le nombre total d’emplois créés chaque année est en moyenne de 30.000 postes, ce qui représente 5% du nombre total des demandeurs d’emploi. Le troisième facteur est l’inadéquation des qualifications des diplômés aux besoins des entreprises. Ainsi, le dysfonctionnement structurel du marché du travail en Tunisie résulte de l’écart qualitatif entre l’offre et la demande en compétences. Une situation qui traduit la déconnection de l’université tunisienne de l’environnement économique.

Malheureusement, aujourd’hui, de nombreux jeunes diplômés doivent faire face non seulement à une longue période de chômage et à la précarité mais également à un manque de possibilités d’emploi. Les chiffres sur le marché du travail tunisien montrent que l’excédent structurel de l’offre de travail qualifié n’a pu être résorbé de manière efficace. En effet, contraints de ne pas rester longtemps au chômage, les jeunes diplômés tunisiens sont obligés d’accepter des emplois inadéquats à leurs niveaux d’éducation et même à leurs spécialités de formation.

S. R.

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