Rien n’est plus en mesure de rassurer le citoyen en raison notamment des déclarations des représentants du ministère de la Santé qui sonnent comme une fausse note vu l’évolution de la situation épidémiologique sur le terrain, le non-respect du confinement sanitaire obligatoire aussi bien par le citoyen lambda que par certains décideurs, l’augmentation inquiétante du taux de contamination : Tunis (193), Ariana (98), Ben Arous (87), Kébili (83) et Médenine (84).
Les dernières déclarations du ministre de la Santé concernant l’état des lieux, allant de la mise en garde à la rassurance, ne peuvent que discréditer un discours officiel qui fait toujours dissonance. On ne peut plus parler d’optimisme prudent au moment où le pays franchira la semaine prochaine le cap des 1 000 cas de contamination et où l’un de nos gouvernorats est toujours dépourvu de laboratoire, alors que le taux des cas contaminés a très vite grimpé et atteint 83 personnes à Kébili à la date du 18 avril. Ce nombre pourrait connaître une nette augmentation dans les prochains jours en raison du manque flagrant d’une infrastructure sanitaire adéquate.
A Kébilli, gouvernorat de plus de 167 mille habitants, 7 délégations et 9 communes, les citoyens parlent déjà de « Hogra » sur les réseaux sociaux, d’une région marginalisée et délaissée au temps du coronavirus. Dans ce gouvernorat, les habitants ont vainement attendu la visite d’un officiel comme ce fut aussi le cas pour la mise en place d’un laboratoire d’analyses du coronavirus. Sur les réseaux sociaux, et avec l’augmentation du nombre de personnes contaminées, la grogne est montée d’un cran pour finir par pointer un doigt accusateur vers le ministère de la Santé.
Pour marquer leur protestation et leur colère, des membres du corps médical et paramédical relevant de l’hôpital régional de Kébili ont réservé un accueil froid qui sort de l’ordinaire à une délégation sanitaire composée de trois médecins relevant du ministère de la Santé qui a été dépêchée sur les lieux ce dimanche 19 avril pour s’enquérir de la situation et améliorer les conditions d’accueil dans cet hôpital. En effet, ils n’ont pas hésité à protester en portant des sachets-poubelles à défaut de tenues de protection, nous confirme le secrétaire général adjoint du syndicat de base de la santé à Kébili, Zied Nasri.
Le représentant du syndicat en question nous a alertés sur une situation sanitaire grave dans la région suite à la rapide augmentation des contaminations, notamment dans quelques villages comme El Golaa. Cinq membres du personnel soignant ont été contaminés à leur tour, a-t-il souligné, qualifiant les conditions de travail dans l’hôpital régional à Kébili de précaires en raison du manque de personnel et d’infrastructure de santé nécessaire pour faire face comme il se doit à la pandémie. Que des promesses non tenues depuis 2012 et une marginalisation sur le plan sanitaire, poursuit-il.
Notre interlocuteur ajoute que les services de l’hôpital attendent toujours les résultats d’environ 300 d’analyses depuis des jours. Et d’ajouter que le ministère de la Santé n’a pas encore donné son accord pour la mise en place d’un laboratoire d’analyses du Covid-19. Et pourtant, l’Etat ne va pas faire sortir l’argent de sa poche car il s’agit d’une initiative prise par un député, un médecin femme et des personnes volontaires originaires de Kébili.
Adressant ses remerciements aux composantes de la société civile dans la région qui ont mené des actions d’aide dans toutes les directions, Zied Nasri conclut que les habitants attendent la visite d’un ministre à Kébili et la prise de décisions.
Ainsi donc, il a fallu la contamination de 83 personnes à Kébili, la grogne des citoyens et du staff médical et paramédical, une campagne de sensibilisation sur les réseaux sociaux pour que le ministère de tutelle se décide et dépêche une délégation à l’hôpital en question.
Au total, le pays a enregistré 879 contaminations et le cap des 1000 contaminations sera dépassé d’ici deux ou trois jours. Les récentes déclarations de la directrice de l’Observatoire des maladies nouvelles et émergentes, professeur Nissaf Ben Alaya, à la chaîne Al Watania 1, ne laissent pas l’ombre d’un doute. Le coronavirus est toujours dans une phase de propagation dans des régions qui sont en train d’enregistrer une augmentation des cas de contamination.
