
Depuis l’apparition du coronavirus en Tunisie, la demande d’alcool à usage industriel a explosé, étant donné qu’il est utilisé dans la fabrication du gel hydroalcoolique. Face aux tensions d’approvisionnement sur le marché international ainsi qu’aux goulots d’étranglement des transports, la Régie nationale des alcools a été prise de court. Elle a dû redéfinir ses priorités et puiser dans le stock stratégique dont elle dispose.
L’alcool est-il vraiment indispensable à la vie d’une nation ? En effet, contrairement à ce qu’on pourrait croire, l’alcool est un produit essentiel et élémentaire pour le tissu industriel d’un pays. Il est utilisé par plusieurs industries, notamment pharmaceutique et agroalimentaire. Il est également abondamment utilisé dans le secteur de la santé, essentiellement dans les hôpitaux et les centres de dialyse. C’est dire que l’alcool est un produit indispensable pour le développement de plusieurs filières industrielles primaires. Or, avec l’apparition de l’épidémie du coronavirus en Tunisie, l’approvisionnement du marché et des industriels en alcool a été perturbé. La Régie nationale des alcools, qui détient le monopole de l’importation et de la distribution des alcools en Tunisie, a été prise de court et était dans l’obligation de redéfinir ses priorités et gérer le stock d’alcool dont elle dispose d’une manière adéquate en prenant en compte la gravité de la crise sanitaire. “ Dès l’apparition de la pandémie, on était confronté à deux grands problèmes. Tout d’abord, il y a eu une forte augmentation de la demande mondiale en alcool, entraînant des tensions d’approvisionnement, étant donné que les pays producteurs ne sont pas légion. Ensuite, il y a eu les goulots d’étranglement des transports maritime et terrestre. Avec la fermeture des principaux ports d’Italie qui tenaient lieu de ports d’escale, nous avons eu des difficultés d’approvisionnement. Nous étions obligés de puiser dans le stock stratégique et de l’allouer entièrement au secteur de la santé, c’est-à-dire pour la fabrication des médicaments et du gel hydroalcoolique”, a fait savoir Mehdi Mbarek, directeur général de la Régie nationale des alcools, dans une déclaration à La Presse.
Intervenir pour rétablir l’ordre
Et d’ajouter : “ Ce qui s’est passé au mois de mars dernier, c’est que pratiquement tous les industriels de la cosmétique se sont mis à fabriquer du gel hydroalcoolique. La demande en alcool a explosé. C’était un peu le désordre”. A ce sujet, le directeur général de la Régie des alcools a tenu à expliquer que selon les normes établies par l’OMS, il existe deux types de gel hydroalcoolique, à savoir l’antibactérien qui doit contenir un ratio minimal d’alcool de 50% ou 60% et le virucide qui doit comporter un minimum de 70% d’alcool. Ainsi, l’Etat est intervenu pour remettre les pendules à l’heure et a ouvert la voie à la Siphat, qui est une société pharmaceutique étatique, et lui a donné la possibilité de fabriquer le gel hydro- alcoolique selon les normes sanitaires en vigueur. Quant à la Pharmacie centrale, elle s’est attelée à faire le tri en lançant un appel d’offres aux fournisseurs de gel qui respectent les normes de fabrication requises. “Puisque l’incertitude plane toujours sur l’évolution de l’épidémie à l’échelle internationale, nous avons décidé de donner la priorité au secteur de la santé et d’y allouer tout le stock disponible”, a affirmé M. Mbarek. Il a fait savoir, dans ce contexte, que cette crise d’alcool ne va pas durer et que l’approvisionnement des industriels reviendra à la normale vers la fin du mois de mai prochain, étant donné qu’il y aura une remise en selle progressive des chaînes d’approvisionnement et des transports. Se voulant plutôt rassurant, le directeur général de la Régie nationale des alcools a conclu : “Nous avons pris les devants depuis 4 semaines et passé de grands marchés pour constituer un énorme stock permettant d’approvisionner les industriels pendant toute une année. Nous avons revu nos prévisions à la hausse, tout en tenant compte de la nouvelle donne. Pour ce faire, on a mobilisé environ 40 millions de dinars. Nous sommes en train d’anticiper pour éviter les erreurs du passé. Nous avons également prévu des quantités nécessaires et suffisantes pour développer une industrie pharmaceutique après-corona si les industriels se mettent à exporter vers des marchés demandeurs comme la Libye ou des marchés du voisinage. La fabrication des produits hygiéniques et médicamenteux constitue un véritable créneau porteur et il serait aberrant que nos industriels manquent une telle opportunité. La Régie nationale des alcools, qui a vu le jour en 1927, est un acquis. Elle fait office d’une base arrière logistique, une locomotive charriant avec elle le développement d’une pléthore de filières industrielles”.
M.S.