Depuis deux ou trois ans, les femmes rurales souffrent le martyre à cause de la forte dégradation de leurs conditions de vie économique et sociale. Dans ce contexte, nous avons interviewé la ministre des Affaires de la Femme, de la Famille, de l’Enfance et des Séniors, Mme Asma Shiri, quant aux mesures prises pour faire face à ce phénomène de transport anarchique.
Est-ce que la crise sanitaire liée au Covid19 a impacté l’activité économique des femmes rurales?
La crise sanitaire vécue par la Tunisie mais bien gérée a été une occasion pour entreprendre des actions en faveur des catégories vulnérables.
Il faut rappeler que le secteur agricole a été le dernier secteur affecté par cette crise et se trouve mieux loti que les secteurs touristique et industriel. Cependant, il ne faut pas oublier que la situation de la femme que ce soit dans le secteur agricole ou dans le milieu rural d’une façon générale. Elle est déjà vulnérable même avant le Covid-19. Depuis toujours, les problèmes de la femme rurale opérant dans le secteur agricole ont existé. Ces problèmes concernent notamment le transport à côté de l’absence de mécanismes du commercialisation de leurs produits qui représente un maillon faible.
En fait, il existe des mécanismes de financement pour l’accompagnement de ces femmes afin de leur assurer un revenu minimum qui leur permet de commercialiser leurs produits agricoles. La commercialisation reste encore un maillon très faible dans la chaîne de valeur, ce qui pose problème pour ces femmes qui s’investissent que ce soit sur le plan personnel ou sur le plan financier. C’est pour cela que la priorité du ministère est de continuer à travailler sur ces aspects en posant les vrais problèmes en rapport notamment avec la régularisation du transport des femmes qui travaillent dans le secteur agricole lequel représente un point noir pour la Tunisie.
A mon sens, on n’arrive pas encore à régler ce problème car les solutions qui ont été toujours avancées n’ont pas été prises en considération, en raison des obstacles liés au milieu socio-culturel dans lequel elles vivent. Il est impératif, aujourd’hui, d’adapter ces solutions à la spécificité de ce milieu et susceptibles d’améliorer le climat social au niveau de ces régions.
Le deuxième dossier sur lequel nous avons commencé à travailler concerne le système de protection sociale des femmes exerçant dans le secteur agricole et qui travaillent également dans les secteurs informels, à l’instar des aides-ménagères. Nous avons déjà mis en place une ligne de crédit pour aider cette catégorie dont on ne connaît pas le nombre exact. Cette ligne de crédit permet d’octroyer mille dinars remboursables sur 2 ans avec 2 mois de grâce et sans intérêt.
De cette façon, on peut avoir une vision claire sur la situation de ces femmes afin de pouvoir les accompagner dans la phase post-Covid-19. La majorité d’entre elles ont cessé de travailler à cause du confinement général. Elles se sont retrouvées dans une situation financière vulnérable et ont été victimes, par ailleurs, de violences conjugales. Nous avons mis en place une commission nationale pour revoir le cadre légal qui réglemente les droits de l’aide-ménagère dans le but d’instituer un nouveau statut, en l’aidant, en outre, à bénéficier d’une formation appropriée. L’arsenal juridique sera renforcé afin de protéger leurs droits relatifs au salaire, à la protection sociale…
Le projet « Ahmini » qui a été lancé l’an dernier est-il toujours en vigueur pour maintenir la couverture sociale des femmes agricoles et leur permettre de faire face à la crise du Covid19 ?
Il n’y a pas eu de coordination suffisante pour que tout le monde adhère à ce nouveau système de protection sociale, vu que toutes les parties prenantes n’ont pas été associées à ce travail. Les femmes rurales n’ont pas été suffisamment impliquées afin de les inciter à adhérer à ce système et il n’y a pas eu une simplification des procédures pour faciliter la mise en œuvre de ce mécanisme.
Au niveau du ministère, nous sommes en train de revoir ce mécanisme pour qu’il fonctionne mieux. Il faut capitaliser ce qui a été fait jusque-là pour ne pas perdre cet acquis. Il s’agit de simplifier les procédures, clarifier les rôles et discuter de ce projet en impliquant tous les intervenants pour qu’il y ait un échange d’idées, afin de trouver les solutions les plus adaptées à la situation socio-économique des femmes rurales.
L’engagement politique et financier de l’Etat tunisien pour assurer la protection économique et sociale des femmes rurales va-t-il se poursuivre ?
Certainement. L’effort du gouvernement se poursuivra, étant donné que, comme l’a souligné M. le chef du gouvernement, la protection des couches vulnérables a été sa priorité lors de la phase du Covid-19, au cours de laquelle il y a eu des problèmes sociaux avec l’augmentation du nombre de licenciements et la hausse du chômage. Cela nécessite de mettre en place des mécanismes pour protéger ces populations vulnérables et le gouvernement a pris, pour cela, les mesures nécessaires, en versant l’indemnité du chômage de 200 dinars pour tous les travailleurs et agents des secteurs qui ont été impactés négativement par le Covid-19 et qui se sont retrouvés au chômage.
Certains secteurs vont continuer à être impactés par la crise sanitaire pendant cette phase du post-confinement. C’est dans ce sens-là que le gouvernement a déjà pris, dans le cadre des décrets-lois, la décision d’augmenter les pensions accordées aux retraités pour les personnes qui jusque-là recevaient une pension de moins de 180 dinars. C’est un engagement de la part du gouvernement de protéger et d’accompagner ces personnes qui ont fourni un effort pour la société, mais malheureusement, le système de protection sociale qui existe ne permet pas d’avoir une pension de retraite au moins égale à celle versée aux personnes issues des familles nécessiteuses.
Cette population de retraités représente 140 mille personnes dont la pension de retraite sera augmentée de 20 dinars pour s’établir à 200 dinars par mois.