Accueil Economie Supplément Economique Imed Zammit, Directeur Général de l’Institut Méditerranéen de Formation aux Métiers Maritimes (IMFMM) : «Il faut moderniser la formation maritime»

Imed Zammit, Directeur Général de l’Institut Méditerranéen de Formation aux Métiers Maritimes (IMFMM) : «Il faut moderniser la formation maritime»

Après plus de dix ans de sa création, à l’initiative du ministère du Transport, l’Imfmm ambitionne toujours d’étoffer l’offre et faire monter en gamme la  formation aux métiers de la mer qu’il dispense, pour inclure la construction navale et celle de plaisance. “Il faut continuer à mettre à jour et moderniser la formation professionnelle pour l’adapter au marché de l’emploi dans le secteur maritime”, a affirmé son directeur, Imed Zammit. Interview.

Est-ce que le transport maritime et la marine marchande constituent un secteur pourvoyeur d’emplois en Tunisie?

La réponse est oui. Le transport maritime est un secteur qui recrute. Cependant, il demeure un secteur sous-exploité, en termes d’employabilité. En effet, depuis les années 70 jusqu’aux années 2000, il y avait une école basée à Sousse qui s’appelle l’Ecole marine marchande de  Sousse et qui dispense des formations aux métiers  maritimes  et portuaires. Elle formait, à l’époque, des navigants, des matelots, des ingénieurs adjoints, des ingénieurs en transport et techniques navales. Tous les diplômés ont intégré, à l’époque, le marché d’emploi du secteur maritime.

Aujourd’hui, les cadres du port de Sousse (dont la majorité est partante à la retraite)  dirigent ce secteur-là. Au début des années 2000, le gouvernement a décidé de fermer l’école de Sousse, qui proposait une formation spécialisée dans les métiers maritimes, pour la remplacer par une autre formation au sein de l’Iset de Sousse qui assure une formation générale et peu technique. Elle est plutôt orientée vers un enseignement général dans le domaine du transport. Le résultat de ce transfert a engendré une sorte de pénurie de main- d’œuvre spécialisée sur le marché de l’emploi. Mais, ce qui s’est passé après, c’est qu’en 2009 la CTN a acheté un navire et  il n’y avait pas de matelots sur le marché pour le conduire. Les autorités ont décidé, alors, de créer cet institut pour former des matelots de la marine marchande et des matelots mécaniciens pour répondre aux  besoins du secteur.

Et puis, petit à petit, l’institut a élargi  l’éventail des formations qu’il propose, suivant le besoin du marché dans le secteur maritime, pour inclure  des formations d’agents d’exploitation portuaire, de  techniciens en transport et logistique, de capitaines de bateaux de tourisme (communément appelés bateaux pirates qui avaient jadis  le vent en poupe). En 2016, on a intégré le BTS en transport logistique. Outre la navigation de complaisance, on a, également, commencé à faire des formations certifiantes (certification internationale) dans le secteur de la pêche pour  les marins et les capitaines. Mais dans le cas de la navigation de plaisance, on s’est heurté à un problème relatif au cadre réglementaire et légal qui  n’est pas adéquat au développement de cette filière en Tunisie. C’est pourquoi  il est nécessaire de renforcer le cadre réglementaire dans le domaine de la plaisance.

Comment évaluez-vous la qualité de la formation académique et professionnelle dans le secteur de la marine marchande en Tunisie?

A vrai dire, la spécificité du domaine maritime, notamment la marine marchande, c’est qu’on doit être aligné sur les conventions internationales de l’Organisation maritime internationale, notamment la convention “STCW”. Les sortants qui obtiennent leurs diplômes ont bénéficié d’une formation conforme aux conventions internationales qui réglementent les métiers maritimes. Le jeune Tunisien diplômé peut travailler à Tunis, comme ailleurs, dans d’autres pays tel que  l’Italie.

Et d’une manière générale, dans le secteur maritime, il y a l’Académie navale qui forme les commandants et les chefs mécaniciens des grands navires. De l’autre côté, c’est-à-dire au niveau de la formation professionnelle, il n’y a pas, à vrai dire, une offre abondante  en Tunisie. Et de toute manière, il faut continuer à mettre à jour et moderniser la formation professionnelle pour l’adapter au marché d’emploi dans le secteur maritime.

Dans le monde, le secteur du transport maritime  se métamorphose et on est en train de migrer peu à peu vers les ports et les transports intelligents et écologiques. Et le concept de l’économie bleue prend en considération le volet environnemental. 

Est-ce qu’on est prêt en Tunisie à faire face à ce changement qui va toucher les métiers de la mer ?

Effectivement, le monde est en train de se digitaliser. Il y a une transformation digitale qui s’opère dans le secteur du transport. Aujourd’hui, on est loin de ce processus de digitalisation, et les autorités doivent se pencher sur cette question, mais nous on essaye, à notre échelle, d’intégrer des cours sur la digitalisation, notamment dans les cours de logistique.

Les pouvoirs publics doivent accorder de l’importance et un intérêt particulier au développement de l’économie bleue. On est très loin par rapport aux pays de la rive nord de la Méditerranée. Il faut qu’il y ait une prise de conscience de la part des autorités sur ce sujet-là. Mais  l’institut a conclu trois projets financés par l’UE dans l’objectif, justement, d’améliorer la qualité de la formation de manière à établir  un programme de formation commun. Rappelons, dans ce contexte, que le ministère du Transport et de la Logistique a réalisé une grande réforme des ports et de la logistique qui va générer d’énormes opportunités en termes d’emplois. C’est pour cela qu’on sollicite le soutien du ministère qui doit nous aider à assurer des formations qui, au final, vont contribuer à la réussite de ces réformes.

Aller vers la formation universitaire dans le domaine de la construction, l’architecture et la réparation navales, mais aussi dans le domaine de la construction de plaisance, — surtout qu’il y a un bon nombre d’entreprises spécialisées dans ce domaine qui se sont installées en Tunisie et qui sont à la quête de la main d’œuvre —  est notre fer de lance. L’objectif est de former une main-d’œuvre compétitive à l’échelle méditerranéenne. 

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