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Journée mondiale de l’Ozone : La Tunisie honore ses engagements

Notre pays  a réussi à réduire 37% des substances appauvrissant la couche d’ozone.

Le trente-cinquième anniversaire de la convention de Vienne de la protection de la couche d’ozone a été célébré le 16 septembre de cette année sous le slogan très révélateur, «L’Ozone Pour La Vie». Ont participé à cet événement planétaire des établissements publics et privés concernés par l’exécution du programme d’élimination des substances appauvrissant la couche d’ozone, des centres sectoriels de formation professionnelle dans le domaine de la climatisation, et des industriels. Les interventions, qui étaient entrecoupées par un petit film relatant les dégâts considérables subis par la nature, à cause des émissions des gaz nocifs dans l’atmosphère, et la chanson de l’Ozone, illustrant les bienfaits d’un environnement propre et sain, ont porté sur les efforts fournis par la Tunisie pour la préservation de la couche d’ozone, l’état d’avancement du programme national d’élimination des substances l’appauvrissant, ainsi que sur l’étude stratégique nationale préliminaire relative à l’Amendement de Kigali au Protocole de Montréal. Les témoignages émanant de plusieurs entreprises ont révélé des expériences réussies dans l’exécution de ce programme national.

Une prise en charge par les pays développés

Pour bien cerner le sujet, on s’est fait aider par M. Youssef Hammami, le coordinateur de l’Unité  nationale d’ozone, créée, en 1994, au sein de l’Anpe. Il a éclairé notre lanterne, en nous faisant un petit rappel historique. A partir des années 70, le Pnue (le Programme des Nations unies pour l’environnement) a effectué des recherches scientifiques et découvert un trou dans la couche d’ozone, au niveau de l’Antarctique, provoqué par les gaz utilisés, depuis les années 30/40, dans la réfrigération, la climatisation, les aérosols, les mousses et  la fumigation des dattes, et connus sous le nom de CFC (chlorofluorocarbones).

Dès lors, vingt-six Etats se sont réunis, en 1985, à Vienne, et se sont mis d’accord sur la nécessité de la protection de la couche d’ozone. Cette convention a donné naissance au Protocole de Montréal relatif aux substances appauvrissant la couche d’ozone. Contrairement à la première qui  était une convention-cadre, ce dernier a déterminé la liste de ces substances qui dépassent la centaine et établi différents calendriers pour les réduire progressivement. Deux ans après, on a mis en place un mécanisme financier en vue d’encourager les pays en voie de développement à s’engager dans cet effort international, étant donné qu’un programme spécial pour l’élimination de ces substances toxiques a un coût économique important.

Pour ce faire, on a créé le Fonds multilatéral de Montréal au financement duquel participent les Etats développés, vu que ce sont eux les inventeurs des technologies polluantes et donc responsables des dégâts subis par la couche d’ozone, et que les autres pays sont de simples consommateurs. Alors, ils ont pris sur leur compte le financement de tous les programmes internationaux. Grâce à ces efforts, il existe actuellement des bureaux nationaux dans chacun des 198 pays membres de la Convention de Vienne et signataires du protocole de Montréal qui constituent les traités les mieux réussis de tous ceux qui sont conclus sous l’égide des NU.

Le caractère obligatoire de l’Amendement de Kigali

Après s’être débarrassés des CFC, ces pays s’appliquent à éliminer les HCFC (hydrochlorofluorocarbones) qui sont moins dangereuses que les premières substances et que l’on envisage de supprimer définitivement d’ici 2029. Il reste la troisième phase, celle des HFC (hydrofluorocarbones) qui sont de puissants gaz à effet de serre (GES), ayant remplacé les CFC et les HCFC. En fait, ces substances nocives, connues pour leurs effets négatifs sur le climat, appartiennent au Protocole de Kyoto ; elles ont été proposées par le Protocole de Montréal aux années 90 et 2000 comme alternatives, à titre transitoire, aux autres substances appauvrissant la couche d’ozone. C’est pourquoi les pays membres réunis à Kigali ont procédé à l’amendement de ce protocole, en vue de réduire l’utilisation des HFC qu’ils ont ajoutés à la liste des substances contrôlées, et protéger, ainsi, le climat futur des émissions mondiales de ces puissants gaz à effet de serre. La particularité de l’Amendement de Kigali, ratifié jusqu’à présent par cent pays et entré en vigueur le 1er janvier 2019, c’est qu’il revêt un caractère obligatoire, c’est-à-dire qu’il est assorti de sanctions, contrairement à l’accord de Paris dont l’application était facultative. Ces sanctions peuvent être d’ordre commercial, privant, par exemple, le pays non respectueux de cet amendement d’importer des produits essentiels pour des secteurs vitaux.

Le recours aux substances alternatives

Dans son discours inaugural, le directeur général de l’environnement et de la qualité de la vie, M. Hédi Chbili, a notamment précisé que le but de ce séminaire c’était de révéler tous les programmes réalisés par la Tunisie dans le cadre de ses engagements internationaux, et de présenter les étapes suivantes. Il a terminé son allocution en rappelant qu’en dépit du fait qu’elle ne jouait pas un rôle important dans l’appauvrissement de la couche d’ozone, la Tunisie a participé aux efforts internationaux pour la protection de celle-ci, et ce, en renforçant le contrôle de l’importation des substances et des équipements et en établissant la certification du personnel travaillant dans ce domaine. M. Youssef Hammami, qui l’a relayé, a souligné que les mécanismes qui seraient appliqués dans la prochaine phase pour la protection de la couche d’ozone consistaient dans l’exécution de projets d’investissement, en collaboration avec les parties signataires du Protocole de Montréal et des agences d’exécution en vue d’utiliser des substances alternatives n’ayant pas d’impact nocif sur le climat.

Il a précisé que, dans ce cadre, la Tunisie a réalisé 49 projets qui ont permis l’élimination de 1026 TM des CFC. Il a, en outre, évoqué une étude visant à établir une liste des entreprises qui utilisent les HFC pour leur permettre de bénéficier d’un financement à travers le Protocole de Montréal pour les amener à les remplacer par d’autres substances non nocives pour l’environnement. Pour bien réussir ce projet, les superviseurs comptent sur la coopération des industriels, les entreprises publiques et privées, mais aussi sur la société civile.

Grâce à son programme, la Tunisie a réussi à réduire 37% des substances appauvrissant la couche d’ozone. Le coordinateur de l’Unité nationale d’ozone a lancé un appel à l’endroit des citoyens pour qu’ils soutiennent cet effort, en vérifiant si les équipements de réfrigération et de climatisation qu’ils achètent contiennent ces substances ou pas. Par ailleurs, il a rappelé que la couche d’ozone a connu, depuis dix ans, une amélioration moyenne qui est de l’ordre de 1,3% par an, et que, selon des études, celle-ci guérirait au cours de l’année 2060, si la communauté internationale continuait de travailler à un rythme raisonnable.

Des progrès substantiels

M. Hammami a expliqué que chaque pays était tenu d’exécuter sa propre stratégie visant la réduction des substances HFC, en fonction de son contexte économique, social, etc. Dans ce cadre, l’Anpe a entrepris plusieurs études en vue de mettre en place une stratégie nationale. Il y est question des mesures d’accompagnement juridiques, institutionnelles et stratégiques, des codes et normes de réfrigération et climatisation en Tunisie, d’une étude technico-économique sur les fluides frigorigènes et les technologies alternatives aux HFC du secteur de la réfrigération et la climatisation, et de la situation des services Installation Maintenance dans ce secteur. Actuellement, l’Agence est sur le point d’achever la préparation d’une pré-stratégie, et  compte poursuivre ce travail afin qu’en 2021 elle ait une stratégie finale, comprenant les lignes générales relatives aux moyens et modalités permettant de se débarrasser de ces substances toxiques pour l’environnement.

Le projet, visant l’élimination des Hcfc dont le niveau de référence de la consommation nationale est de l’ordre de 725 TM, est approuvé par le Fond multilatéral du protocole de Montréal, en 2014, avec un coût de 5,014 millions de dollars. La durée de ce projet, exécuté par l’Onudi (l’Organisation des Nations unies pour le développement industriel) et le Pnue et coordonné par l’Unité nationale d’ozone, s’étale sur une quinzaine d’années, c’est-à-dire qu’il s’achève en 2029. Les activités effectuées durant la période allant de 2014 à 2020 sont prometteuses : la conversion de la Sncft et de la Sofap Médical (un laboratoire pharmaceutique) et l’instauration d’un système national de certification.

Pour ce qui est de la première, dont le projet a été achevé avec succès en 2016, on a réussi à éliminer 5 TM de Hcfc, utilisée comme un solvant pour le nettoyage des circuits frigorifiques du matériel ferroviaire destiné au transport des voyageurs, et à la remplacer par la HFO (hydrofluoroléfine), une substance non  nocive pour la couche d’ozone, avec un Potentiel de Réchauffement Global (PRG) plus faible que celui des HFC. En ce qui concerne le second projet, qui est terminé au tout début de l’année en cours, on a supprimé 8,46 TM de Hcfc, utilisée comme un solvant avec les silicones pour les seringues médicales, en inventant une nouvelle technologie qui repose sur l’usage de la technique «Spray Machine», consistant à injecter la silicone sans recours à l’usage de ces substances nocives.

Quant au troisième projet, l’Anpe est en cours de finalisation d’un système national de certification des personnes physiques et de sociétés de service opérant dans le secteur de la réfrigération et la climatisation (RAC), et comprenant un Organisme de certification, un Centre de formation, des modules de formation de certification et un certain nombre de formateurs certifiés de l’ATFP (Agence tunisienne de la formation professionnelle).

La formation continue des agents de la Douane

Pour imposer un contrôle plus rigoureux, on a mis en place un régime spécial pour l’octroi des licences d’importation des substances appauvrissant la couche d’ozone, un quota d’importation, une nomenclature des produits. En outre, on a relié l’Anpe au réseau tunisien du commerce, afin de réduire les délais d’étude des licences d’importation de ces produits contrôlés par le Protocole de Montréal. Comme l’observance de ces mesures requiert un personnel bien formé en la matière, on a procédé, avec l’appui du Pnue et dans le souci de s’aligner sur les directives de l’OMD (l’Organisation Mondiale de la Douane), au renforcement des capacités techniques des agents de la Douane, afin qu’ils soient à même d’assurer le contrôle et l’identification des opérations d’importation et d’exportation des substances réglementées par le Protocole de Montréal et lutter contre leur commerce illicite.

Dans ce cadre, l’Unité nationale d’Ozone a organisé conjointement, avec la collaboration de la Direction de recrutement et de la formation au sein de la Direction générale de la Douane, des sessions de formation théoriques et pratiques de plus de 180 agents douaniers dans plusieurs régions de l’intérieur du pays. Pour leur faciliter la tâche, on a équipé les différents corps douaniers de quarante appareils d’identification et d’analyse des fluides frigorigènes de haute technologie. On a également procédé, à partir de 2019, à la formation d’un corps de Formateurs (Formation des formateurs Douaniers), ainsi qu’au développement d’un guide de bonnes pratiques pour les agents. 

Enfin, il importe de rappeler qu’un Comité national d’ozone constitué, notamment, des ministères de l’Energie, de la Santé, de l’Industrie, de l’Agriculture et de la Douane, a été créé, en 20002, pour aider l’Anpe à mettre en œuvre, dans une démarche de concertation, le Protocole de Montréal. Tous ces efforts consentis ont valu à la Tunisie plusieurs certificats d’appréciation auprès du Pnue. Il s’agit de prix que l’on discerne aux pays ayant bien respecté les engagements de ce protocole. Notre pays a été honoré à cinq reprises : en 1999, lors de la célébration du dixième anniversaire de ce dernier, en 2006, où la journée mondiale a été célébrée avec le Pnue en Tunisie, en 2007, en 2009 et en 2017, à l’occasion du trentième anniversaire.

Faouzi KSIBI

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