
La part des énergies renouvelables dans le mix énergétique n’a pas dépassé les 4% en 2019. L’objectif déclaré d’atteindre, en 2030, un taux de 30% s’éloigne.
Quelles sont les avancées qui ont été, jusque-là, réalisées dans le domaine des énergies renouvelables? La transition énergétique est-elle en marche ? Allons-nous atteindre l’objectif escompté de 30% d’énergies renouvelables dans le mix énergétique en 2030 ? Dans l’optique de répondre à ces questions, l’association Atuge a organisé, mardi 2 février, un webinaire sous le thème : Où en est la Tunisie dans sa transition énergétique ? Animé par Amel Jrad, coordinatrice du projet Readiness Tunisie-Green Climate Fund, le débat, qui a réuni experts et administratifs, était une occasion pour aborder plusieurs problématiques liées à la transition énergétique.
Avancées… timides
Revenant sur les projets réalisés depuis la mise en place de la Contribution nationale déterminée (CND) qui a été élaborée suite à la signature de l’accord de Paris sur le changement climatique, Fathi Hanchi, directeur général de l’Agence nationale de maîtrise de l’énergie (Anme), a passé en revue les divers appels à projets lancés dans le cadre des régimes de concession et d’autorisation. Il a ajouté qu’avec une capacité totale qui s’élève à 1.400 mégawatts, les appels d’offres ont abouti à des tarifs avantageux.
En outre, il a souligné que les actions qui ont été, jusque-là, engagées, ont permis de réduire de 12% la demande énergétique en 2019, par rapport au niveau de 2010. Et d’affirmer que la part des énergies renouvelables dans le mix énergétique n’a pas dépassé les 4% en 2019. La puissance d’électricité raccordée au réseau basse tension cumulée dans le cadre du programme Prosol Elec (installation de panneaux photovoltaïques), a atteint, en 2020, 100 mégawatts, a-t-il indiqué. Par ailleurs, le DG de l’Anme a affirmé que, pour la première fois depuis la création du Fonds national de maîtrise de l’énergie en 2006, le budget alloué audit fonds a été totalement consommé en 2020, notamment dans le cadre du programme Prosol Elec.
S’agissant des solutions proposées pour rattraper le retard accusé dans la transition énergétique, Hanchi a mis l’accent sur la nécessité de renforcer les moyens humains au sein du ministère de tutelle et au sein de l’Anme mais aussi de déployer les nouvelles technologies dans le domaine des énergies renouvelables.
Efficacité énergétique: la Tunisie, mauvais élève
Faisant une comparaison entre les pays nord-africains en termes d’efficacité énergétique, Kamel Bennaceur, expert international en énergie et ancien ministre de l’Industrie et de l’Energie, a fait la conclusion que la consommation d’énergie est très peu efficace dans les pays de la région. Il a souligné qu’en Tunisie, la consommation per capita (c’est -à -dire la consommation nationale divisée par le PIB) ne s’est pas améliorée, dans la mesure où elle affiche une amélioration de seulement 10% par rapport à l’année 2000.
Un taux très faible, notamment en comparaison avec les pays non Ocde, où l’intensité énergétique s’est améliorée de 30% sur les deux dernières décennies. Cette faible performance, en matière de maîtrise de l’énergie, est imputable, selon ses dires, à un retard accusé dans la transition dans les domaines des transports et des bâtiments. Il a, en outre, affirmé que, depuis 2015, l’impact des énergies solaire, hydraulique et éolienne commence à se faire sentir.
S’agissant des recommandations, Bennaceur a mis l’accent sur la nécessité d’intégrer la transition énergétique dans les plans de récupération économique post-Covid. Il a, par ailleurs, appelé à la rationalisation des subventions énergétiques et au déploiement d’un système de dispatching performant. Il a, également, mis l’accent sur l’importance d’adopter des solutions pour le stockage de l’énergie, en particulier, l’hydrogène vert et bleu.
Une continuité dans l’agenda malgré l’instabilité politique
De son côté, Tania Feller, responsable du cluster Energie et changement climatique à la GIZ, a mis en exergue la continuité de l’agenda de la transition énergétique malgré l’instabilité politique qui règne dans le pays. Elle a également salué la démocratisation de la transition énergétique, soulignant, dans ce contexte, que la Tunisie figure parmi les rares pays dotés d’un programme similaire à Prosol Elec. Feller a, toutefois, précisé que l’accélération de la transition énergétique en Tunisie est actuellement le défi à relever, indiquant que le pays dispose d’un potentiel non exploité, tiré notamment de la possibilité d’intégrer de nouveaux secteurs dans la CND. Iheb Triki, chargé des investissements, privés dans le développement durable à Swicorp, a, pour sa part, affirmé que l’électrification en Tunisie figure parmi les meilleures en Afrique du Nord, en termes de stabilité des réseaux. Il a, cependant, déploré le retard accusé dans la réalisation des objectifs escomptés, notamment la mise sur pied des grands projets d’énergie renouvelable. Il a expliqué, à cet égard, que la Tunisie fait toujours face à un besoin en énergie primaire, sachant que la part des importations s’élève à 30% du total des besoins en énergie primaire.