Par Alfonso Campisi
Nous sommes devenus insensibles même à la mort. Nous l’avons banalisée.
Loin des vers poétiques et des pages littéraires qui exaltent l’un des plus beaux et incomparables espaces au monde, la Méditerranée est devenue, depuis d’innombrables années, un vrai cimetière, un piège, duquel il est difficile d’en réchapper.
Le turbulent Canal de Sicile, habité selon la mythologie grecque par différents monstres marins, comme par Charybde, un monstre sous forme de tourbillon, capable d’aspirer tous les navires qui passent à proximité de lui, et d’engloutir sans pitié et sans regrets des hommes, des femmes et des enfants, ne laissant aucune chance à celles et à ceux qui ont décidé de braver toute règle et toute interdiction risquant leur propre vie en mer. Vendredi dernier encore, selon la Protection civile tunisienne, 40 morts noyés au large de la ville de Sfax.
«El dorado», en espagnol le doré, ce mythe remontant à l’an 1536 en Amérique du Sud, un lieu supposant regorger d’or… un vrai mirage !
L’Afrique «se déverse» en Europe, un continent désormais touché de plein fouet par la crise économique qui pousse certains jeunes plus à la fuite plutôt qu’à y rester.
Heureusement que les jeunes Européens n’ont pas besoin d’un visa !
Mais malgré les risques de noyades, on décide encore de quitter son propre pays pour aller chercher «fortune» sur le Vieux continent.
Et pourtant, aujourd’hui, grâce à tous les moyens de communication à notre disposition, comme un simple téléphone, nous sommes transportés immédiatement dans n’importe quelle région du monde, même la plus reculée et informés en temps réel.
Il faut s’y faire, l’Eldorado n’existe plus !
Mais pourquoi alors continuer à partir, se mentir et songer à une vie meilleure ?
La route de la Méditerranée centrale est de plus en plus dangereuse et avec un taux de mortalité élevé. De nombreuses organisations ont dénoncé l’état de ces voyages désespérés au fil des ans. Parmi eux, Amnesty International :
« Les personnes fuyant la guerre, la persécution et la famine qui tentent de traverser la Méditerranée sont de plus en plus exposées au risque de mort en raison de la disparition progressive d’entités —internationales, gouvernementales et non gouvernementales— dédiées au sauvetage en mer».
Plus de 65 millions de personnes dans le monde ont été contraintes de quitter leur lieu de résidence à cause des guerres, de la famine… Ce nombre sans précédent va au-delà de toute imagination. Le nombre total de réfugiés est aujourd’hui plus élevé que l’ensemble de la population d’un pays comme l’Italie ou la France !
Qui sont les responsables de cette hécatombe ?
Les causes sont avant tout à rechercher dans les pays de départ. Le continent africain, incontestablement le continent le plus riche au monde en termes de ressources naturelles, grâce à la quantité d’or, de diamant, d’uranium, de phosphate, de pétrole, de charbon, de coton, de cacao, de gaz, de coltan… pour ne citer que ceux-là, figure parmi les continents où le taux de pauvreté des habitants est à peine croyable. Une classe politique corrompue qui s’enrichit de jour en jour, ayant comme seule préoccupation celle de se maintenir au pouvoir, insouciante de son peuple, auquel elle ne fait que promettre monts et merveilles lors des élections politiques, quand celles-ci ont lieu…
De l’autre côté de la barrière, nous retrouvons l’Europe et ses dirigeants «incapables» de traiter d’une voix unique l’Afrique de pair-à-pair, de connivence avec des dictateurs corrompus et auxquels on accorde le «pouvoir éternel» pour mieux exploiter leurs ressources, peu importe si islamistes ou trotskistes…
Je me demande jusqu’à quand peut-on ignorer le cri de cette jeunesse désespérée prête à tout pour quitter son pays?
Et jusqu’à quand les dirigeants africains et européens peuvent-ils être complices de ces crimes contre l’humanité ?