Les travaux d’extension en infraction totale avec la loi et le code d’aménagement urbain font rarement l’objet de décisions de démolition dans les quartiers et les cités
Les constructions anarchiques figurent parmi les principaux points noirs contre lesquels les communes livrent une lutte sans merci malgré le budget modeste dont elles disposent et le manque de ressources humaines. La croissance urbaine effrénée dans certains quartiers périphériques de la capitale a abouti à l’explosion des constructions anarchiques qui ont poussé comme des champignons sans que la loi n’arrive à en freiner l’expansion. Le jeu du chat et de la souris est devenu la règle dans ces cités. La tâche est d’autant plus ardue pour les communes qu’elles livrent une guerre sans merci contre des propriétaires « fantômes » qui font leur apparition la nuit tombée pour entreprendre des travaux de construction en toute illégalité sans être inquiétés. Les constructions anarchiques ne sont pas la seule infraction à la loi dans ces quartiers. Alors que le code de l’aménagement du territoire et de l’urbanisme stipule, noir sur blanc, que le propriétaire doit se faire délivrer une autorisation préalable pour agrandir ou transformer son habitation dans une zone résidentielle, indiquant le nombre d’étages autorisés, la distance qui doit être respectée entre les constructions et la voie publique…., aucune de ces règles n’est respectée. Les infractions à la loi se sont multipliées dans les zones à forte densité urbaine, commises par des citoyens qui agissent comme bon leur semble avec « l’accord tacite » des agents municipaux. C’est le cas, à titre d’exemple, du quartier populaire de Halfaouine et de la cité El Tahrir où des propriétaires ont procédé à l’extension de leur logement en rajoutant, un second, voire un troisième et même un quatrième étage sans autorisation requise, tout en construisant un escalier accolé à la façade extérieure et empiétant sur la voie publique (chaussée).
Alors que ces travaux d’extension sont en infraction totale avec le code d’aménagement urbain, elles font rarement l’objet de décisions de démolition. Bien qu’il soit strictement interdit de construire sur la voie publique (trottoirs), les communes disposent de peu de moyens pour mettre à exécution ces décisions de démolition. Il ne s’agirait pas de la seule raison. Le fait que la police municipale, relevant du ministère de l’Intérieur, ait d’autres prérogatives rend difficile la fixation des délais d’intervention pour la mise en application de ces décisions. Par ailleurs, la réaction souvent brutale des propriétaires en infraction avec la loi, explique également la réticence des agents de la police municipale qui rechignent à intervenir pour éviter les problèmes. « Il est courant dans les quartiers populaires de voir des propriétaires qui construisent un second et même un troisième étage sans autorisation, généralement au-dessus de la maison de leurs parents ou de leurs beaux-parents, explique un riverain du faubourg de Bab Souika. Afin d’avoir une entrée individuelle, ils vont construire également un escalier à l’extérieur de leur maison en grignotant une partie du trottoir, ce qui est strictement interdit. Si la police municipale hésite à intervenir dans ce cas-là, c’est parce que non seulement le propriétaire use de chantage en menaçant de se suicider ou de tuer ses enfants, mais c’est en raison du fait aussi ses agents savent parfaitement que démolir cet ouvrage reviendrait à condamner l’accès à l’extérieur pour les occupants qui ne pourront plus sortir de leur maison». Une parade toute trouvée pour de nombreux propriétaires dans les cités et les quartiers populaires qui ont fini, sans souci de conscience, par donner un bon coup de balai au code de l’urbanisme et de l’aménagement urbain.