En temps normal, on avait du mal à maîtriser les foules sur les gradins de nos stades de football. Que dire maintenant en ces temps difficiles de pandémie ? Ce qui s’est passé avant et au cours du match EST-Al Ahly et aux alentours du stade Ali-Belhouane à Mellassine n’augure rien de bon…
La déclaration faite par le ministre de la Santé à nos confrères de Nejma FM, en marge de sa visite au centre régional de vaccination à Kébili, en dit long sur le dysfonctionnement de l’appareil de l’Etat quant à la gestion de la crise sanitaire : « C’est le gouvernement qui les a autorisés à y assister», a déclaré Faouzi Mehdi à propos de la présence des supporters sur les gradins de l’Olympique de Radès, samedi dernier, à l’occasion du match EST-Al Ahly comptant pour les demi-finales aller de la Ligue des champions africaine.
Alors que la CAF permet aux clubs le remplissage des stades de l’ordre de 50% de leurs capacités, le gouvernement, ou précisément la présidence du gouvernement, n’a autorisé que 5000 spectateurs à assister au match EST-Al Ahly du Caire, ce qui ne représente que 12% de la capacité totale de l’enceinte de Radès (60.000 spectateurs). Le quota des 5.000 est loin des 12.500 demandés par l’Espérance Sportive de Tunis et bien loin des 50% autorisés par la Confédération africaine de football. Malgré cela, le ministre de la Santé persiste dans son mécontentement : « Autoriser les supporters à entrer dans les stades a été une décision du gouvernement. Le ministère est contre les rassemblements et l’organisation des manifestations impliquant des spectateurs », a-t-il martelé.
Dépistage et entrée des supporters : l’anarchie !
Au-delà de cette énième « bourde » communicationnelle au sein du gouvernement, ce sont les faits qui ont finalement donné raison au ministre de la Santé. Sur le papier, l’entrée de 5.000, voire 15.000 supporters ne devait pas constituer un risque sanitaire au vu de la capacité du stade de Radès, de surcroît un espace ouvert d’autant que l’entrée des supporters, était précédée par une opération de dépistage qui a eu lieu au Stade Chedly-Zouiten. Or, ce qui s’est passé le jour de l’opération de dépistage dénote l’incapacité des autorités à organiser convenablement cette opération. Dépister 5.000 spectateurs devait se passer dans l’ordre d’autant que le nombre n’était pas conséquent. Or, ce qui s’est passé sur le terrain, c’était l’anarchie absolue. Une anarchie qui s’est répétée le lendemain lors de l’accès des supporters au stade le jour du match. Malgré l’usage excessif de lacrymogène et les scènes de violence qui ont suivi, ils étaient un peu plus de 5.000 spectateurs sur les gradins de l’Olympique de Radès. Mais le vrai problème ne réside pas dans le nombre exact des supporters présents au stade, mais plutôt leur répartition sur les gradins. Aucun billet ne portait le nombre d’un siège, car il n’y en a pas. Les spectateurs étaient bien répartis dans les quatre coins du stade, mais ni la distanciation sociale, ni les gestes barrières n’ont été respectés dans chaque passerelle des gradins.
Il fallait numéroter les places suivant un schéma bien précis qui prend en compte l’enceinte de Radès dans sa totalité afin que tout supporter, une fois entré, rejoigne directement son siège tout en étant distancié par les cordons mis en place, des spectateurs voisins que ce soit sur sa droite, sur sa gauche, en-dessus ou en-dessous.
Or, rien de cela n’a été fait. Aussi bien l’opération de dépistage effectuée au Stade Zouiten que l’entrée des supporters au Stade de Radès se sont passées dans l’anarchie totale. Du coup, l’opération de dépistage et l’entrée des supporters au stade le jour de match se sont transformées en véritables foyers épidémiques.
Ce qui s’est passé le lendemain en marge du match COT-CSS comptant pour les demi-finales de la Coupe de Tunisie est typiquement tunisien. Faute de gradins et vu que le Stade Ali-Belhouane à Mellassine n’est pas aménagé pour abriter un match de football professionnel, les supporters du COT se sont entassés sur les toits des maisons aux alentours. Un véritable foyer de Covid-19 !
Bref, du moment où on est incapable d’organiser dans l’ordre l’entrée et la sortie de supporters aux stades en temps normal, on ne peut le faire en ces temps difficiles de Covid-19. Cela va d’une culture sociale qui s’est baignée dans l’anarchie depuis des décennies et que l’arrivée soudaine de la démocratie n’a pas vraiment aidée. Sur le plan sanitaire, il faudra attendre quelques jours pour savoir si l’entrée des supporters aux stades le week-end dernier constitue ou pas une bombe à retardement. Attendons voir !