Accueil Culture Dans le cadre de FILMKLUB «MREYA», «I Am Not Your Negro» de Raoul Peck : «L’histoire des Noirs en Amérique, c’est l’histoire de l’Amérique et ce n’est pas une belle histoire»

Dans le cadre de FILMKLUB «MREYA», «I Am Not Your Negro» de Raoul Peck : «L’histoire des Noirs en Amérique, c’est l’histoire de l’Amérique et ce n’est pas une belle histoire»

«Ce que les Blancs doivent faire, c’est essayer de trouver au fond d’eux-mêmes pourquoi, tout d’abord, il leur a été nécessaire d’avoir un “nègre”, parce que je ne suis pas un “nègre”. Je ne suis pas un nègre, je suis un homme. Mais si vous pensez que je suis un nègre, ça veut dire qu’il vous en faut un». James Baldwin

Dans le cadre de sa programmation cinématographique régulière «Filmklub», le Goethe Institut propose, depuis le 28 juin et jusqu’au 4 juillet, «Mreya», un cycle de projections de films sur le thème de la discrimination raciale.

A travers trois documentaires et une fiction accessibles en ligne gratuitement sur la plateforme du Goethe-Institut «Goethe on Demand» :  www.tunis.goethe-on-demand.de, ce programme offre au public un espace de réflexion permettant de libérer les esprits. L’idée étant de comprendre et d’analyser en profondeur ce fléau social en faisant varier les angles de vue, en affrontant le miroir de notre réalité à travers ce que reflètent nos écrans par le 7e art.

Le cycle a démarré avec la projection, le 28 juin dernier, de «Tous les autres s’appellent Ali» (Angst essen Seele auf) de Rainer Werner Fassbinder. Réalisée en 1974, cette fiction raconte le mariage controversé d’une Allemande veuve, d’une soixantaine d’années, avec Ali, un Marocain plus jeune qu’elle. Les enfants d’Emmi, ses voisins, ses collègues, tous sont scandalisés par cette union. Le couple est mis à l’écart, mais va vite se révéler indispensable à la communauté.

Le deuxième film projeté, le 30 juin, est l’excellent et important documentaire «I Am Not Your Negro» (2016) de Raoul   Peck. Ce dernier y revisite les   années sanglantes de lutte pour les droits civiques des Noirs américains, à partir des textes de l’écrivain James Baldwin (1924-1987). Il est bon de savoir que Peck a aussi réalisé un documentaire sur le dirigeant indépendantiste congolais Patrice Lumumba (1925-1961), assassiné à l’âge de 36 ans.

«I Am Not Your Negro» est une chronique de la lutte des militants Noirs américains pour l’obtention des droits civiques. Il prend matière du manuscrit inachevé de James Baldwin « Remember This House », qui avait pour ambition de retracer l’histoire de l’Amérique dominée par les Blancs, à travers le combat de trois grandes figures des droits civiques : Medgar Evers, Martin Luther King Jr. et Malcolm X, tous plus jeunes que lui et assassinés avant leurs 40 ans. Ce livre restera inachevé à la mort de l’écrivain en 1987.

Né en 1924 à Harlem, le quartier afro-américain de New York, James Baldwin, Noir et gay, est très tot rejeté par sa famille. A l’âge de 10 ans, deux officiers de police abusent de lui. Il ne cessera durant toute sa vie de dénoncer la violence et l’oppression à l’égard des minorités à travers sa littérature : romans, poésies, nouvelles, pièces de théâtre et essais. Exilé une grande partie de sa vie à Paris et à Saint-Paul-de-Vence, James Baldwin a été célébré sur le tard par les intellectuels français qu’il recevait chez lui, ainsi que de nombreux artistes noirs-américains de passage en France. Réquisitoire sur la question raciale, le film est aussi un bel et fidèle hommage à l’esprit, la philosophie, les idées, l’âme et la tragique clairvoyance de cet auteur aujourd’hui. Seule la voix de Baldwin nous guide, dénonçant la violence, les élucubrations raciales, les peurs et l’hypocrisie d’une société où «le Blanc est une métaphore du pouvoir» à travers une restitution en sons et en images de ses notes personnelles, de lettres, de discours et autres écrits, d’extraits de films documentaires ou encore de photographies.

«C’est un très grand choc pour vous de découvrir que le pays où vous êtes né, auquel vous devez la vie et votre identité, n’a pas créé, dans tout son système de fonctionnement réel, la moindre place pour vous», dit-il. Medgar Evers, assassiné en 1963, Malcom X, assassiné en 1965, Martin Luther King, assassiné en 1968, confronté à cette terrible désillusion, Baldwin est contraint à l’exil pour ne plus subir la violence de sa terre natale.

Une voix, des mots et des images qui restent aujourd’hui d’actualité. Un film essentiel à voir et à projeter dans les écoles et autres établissements éducatifs.

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