La pénurie de l’huile végétale subventionnée est devenue récurrente. Elle est récupérée par les trafiquants de tout bord qui se sucrent sur le dos du consommateur
Bien entendu, il ne s’agit pas de l’huile végétale «Zit El Hakem» fournie et compensée par l’Etat, l’huile végétale subventionnée ou «zit el hakem» a la particularité de rapidement disparaître des rayons des épiceries. Elle apparaît au lendemain d’une campagne, d’une visite d’un responsable du secteur et disparaît comme par enchantement une fois la conférence de presse «explicative» terminée et les organes de presse ayant retrouvé leurs voitures. Au pauvre consommateur de parcourir les épiceries et les «fournisseurs» pour entrer en possession de cette huile qui, à tous les points de vue, est beaucoup plus à leur portée. Au niveau du prix bien entendu. Mais comme elle est fantomatique, elle n’apparaîtra qu’après les «dispositions prises» par les différentes parties prenantes : importateurs et transformateurs. Le temps de calmer les esprits, de créer le vide, de faire grimper les prix des autres huiles végétales mises sur le marché. Une spirale infernale (des augmentations régulières, suivies et qui ne donnent pas l’impression de s’arrêter) qui fait que les prix de ces huiles végétales se rapprochent de plus en plus des prix de… l’huile d’olive !
Dans ce cas, pourquoi importer ces quantités énormes qui épuisent les réserves en devises dans un pays où la situation économique se dégrade de jour en jour? A n’y rien comprendre. Le miracle c’est que restaurateurs et petits fast-foods trouvent aisément de l’huile subventionnée… en payant le prix qu’il faut. C’est-à-dire beaucoup plus cher que le prix fixé.
Trêve de mauvaise comédie
Il n’y a donc plus aucun espoir de trouver une solution à cette huile que l’Etat compense au grand bonheur des trafiquants de tout bord qui se sucrent sur le dos du consommateur et qui profitent du relâchement total qui caractérise la chaîne de production et de distribution de ce produit. Il faudrait non pas persister mais bien trouver une solution définitive à ce problème. Il nous semble qu’à la vue des prix des actuelles huiles végétales mises sur le marché, la solution est claire comme de l’eau de roche. Il faudrait non pas subventionner cette huile à coups de milliards en devises et se tourner vers l’huile de grignon d’olive que nous recueillons par milliers de tonnes en transformant nos récoltes chaque année.
L’huile de grignon : une alternative intéressante
De toutes les façons, à tous les points de vue, cela est dans l’intérêt des consommateurs qui disposeront ainsi d’une bonne huile. L’huile de grignon est obtenue à partir des tourteaux d’olives, «Fitoura» en dialecte tunisien. Selon les connaisseurs du domaine, elle convient pour toute préparation culinaire, de la cuisson à la friture. «L’huile de grignon d’olive donne un meilleur goût aux fritures que les huiles de tournesol ou de maïs» assure un spécialiste de la nutrition. Avantage non négligeable, c’est un produit tunisien qui, même s’il doit être compensé (rien n’est encore clair à propos des produits actuellement compensés), cela se fera en monnaie nationale tout en prenant en compte que le producteur tunisien ne pourra qu’en tirer profit. Les producteurs d’huile de grignon, une fois encouragés, se feront fort de valoriser des milliers de tonnes/jour de grignon pour obtenir des huiles répondant aux standards du Conseil oléicole international (COI). «Avec une capacité annuelle de près de 220.000 T. de grignons traités au solvant (hexane), ces usines fournissent en moyenne 18.000 T. d’huiles de grignon et 150.000 T. de grignons épuisés. Cela évolue bien entendu en fonction des récoltes annuelles qui fluctuent d’une année à l’autre, nous assure notre interlocuteur qui travaille dans une des usines de transformation.
Respect de l’environnement
«Indépendamment de cet aspect, la prise en charge de ces milliers de tonnes de grignon contribuera au respect de l’environnement ainsi qu’à la valorisation des sous-produits des oliviers. Actuellement, une partie de ces grignons est vendue aux éleveurs surtout en périodes de disette pour servir comme aliment des cheptels ovins et camélidés. Durant la dernière décennie, avec l’extension des superficies classées dans le domaine de l’agriculture biologique, grandes consommatrices de fumures organiques peu disponibles au Centre et au Sud du pays, une utilisation potentielle des grignons épuisés a vu le jour. Il s’agit de son incorporation avec d’autres sousproduits de la ferme (fumiers d’ovins et de bovins, fientes de volailles, pailles et déchets agricoles) pour la fabrication de composts agricoles, dont la valeur fertilisante est satisfaisante».
Nécessité de s’adapter
Bien entendu, la question qui se pose est relative au devenir de ces unités qui transforment actuellement ces huiles végétales, tout en sachant qu’elles font ce qu’elles veulent même si elles éprouvent le souci de se positionner par rapport à la levée de la subvention de l’huile importée par l’Etat et d’être dans l’obligation de suivre la fluctuation de la monnaie. Ce ne sera pas facile. Ceux qui tiennent ce secteur, même s’ils ont réussi à mettre sous éteignoir l’huile importée par l’Etat, au point de casser son réseau de distribution pour ouvrir de véritables boulevards pour leurs produits, se défendront. Ces unités, tout le monde en convient, ont, elles aussi, le droit d’exister et de travailler, mais elles devraient trouver le moyen de convertir une partie de leur production en huile de grignon locale. Le consommateur tunisien, aussi bien au niveau individuel que pour les besoins des différentes activités industrielles, aura toujours besoin d’huiles végétales à base de maïs, colza, tournesol, soja, d’arachide, de palme (à déconseiller), etc. C’est un tout autre marché.
De toutes les manières, un pays gros producteur d’huile d’olive doit absolument trouver le moyen de tirer profit aussi bien de ses olives que des sous-produits qui s’en dégagent. Il n’est pas interdit de voir ce que font les autres pays gros producteurs.