La pandémie de Covid-19 a mis bien des secteurs au bord de la faillite.
Le secteur touristique en Tunisie n’a pas été épargné.
Le tourisme (plus de 1,2 million d’emplois directs et indirects, c’est 5,62 milliards de dinars d’entrée en devises) a, pour sa part, et surtout depuis 2011, subi, des crises successives, à l’exception de l’année 2019 qui a été remarquable avec près de neuf millions de touristes et deux millions de dollars de recette. L’attaque de l’ambassade américaine, les attentats, la faillite de Thomas Cook ont fait qu’il a été durement secoué. La pandémie de Covid-19 a été un réel coup de massue pour ce secteur. La reprise ne pourra avoir lieu qu’à partir de 2021.
L’hôtellerie tunisienne a, bien entendu, essayé de sauver ce qui pouvait l’être, mais les problèmes, tous les problèmes, sont loin d’être résolus. En dépit d’une conjoncture économico-financière difficile, on est à la recherche de la meilleure formule pour dépasser ce cap.
Mais ce n’est point notre sujet du jour.
Le tourisme, un des secteurs les plus importants de l’économie, source de devises pour le pays, entraîne dans son sillage d’autres secteurs économiques tels que le transport, les communications, l’artisanat, le commerce, le bâtiment, le sport, la santé (Thermalisme, thalassothérapie, médical), activités des seniors, d’affaires, sportif, culturel, nautique (ports de plaisance, plongée sous-marine, croisières), écologique, d’aventure (randonnées, équestres), etc.
Rien de concret
Nous avons entendu avec beaucoup d’attention ce qui a été dit ces derniers mois par les professionnels du tourisme. Et nous avons été surpris par ce qui a été dit : les mêmes clichés, les habituelles jérémiades, les perpétuelles promesses d’améliorer la qualité et de former davantage le personnel. Des engagements, des dates, des chiffres à jour, des projets en cours ou en projets ? Rien.
Nous n’avons ressenti à aucun moment une qualité de discours qui tranche, surtout que les conditions sont exceptionnelles. Alors que partout dans le monde, on avait amorcé la reprise, s’appuyant sur les derniers développements de la pandémie, on donne l’impression de se contenter de compter les sous gagnés grâce au tourisme intérieur, de participer à des foires ou expositions et de faire des déclarations d’intentions. Insuffisant et même indigne d’un secteur qui représente un des secteurs les plus importants de l’économie nationale.
Eviter la rupture
A l’étranger, là où le tourisme représente une source de revenus extrêmement importante on suivait au jour le jour le développement de la pandémie, tout en gardant le contact avec les principaux opérateurs internationaux à l’effet d’éviter à ce secteur une rupture qui signifierait la perte d’une saison.
Alors que la pandémie continuait à sévir, on s’activait pour préparer l’ouverture de la prochaine saison hivernale tout en se projetant sur la pleine saison. Les idées ne manquent pas et pour rattraper le temps perdu, on consent des avantages aux familles, des baisses de tarifs conséquentes pour les groupes que l’on essaie de favoriser.
Les prix sont soigneusement indiqués, contrairement à ce que nous voyons sur les publicités que font nos hôteliers qui obligent les clients potentiels à téléphoner pour se renseigner. Les réactions ne manquent pas et on reproche justement avec beaucoup de véhémence cette perte de temps et ce mauvais premier contact qui fait craindre un possible mauvais coup.
Des procédés dépassés et qui n’ont plus cours, parce que tout simplement la clientèle n’est plus occasionnelle. On se prépare pour aller en vacances. On fait des économies. Les congés sont pris en conséquence. Les réservations sont faites à temps et surtout pour la clientèle tunisienne les choses sont de plus en plus claires.
Restent les services qui demeurent un grand point d’interrogation : un chef de famille, parti en vacances en fin de saison estivale, n’était pas content : « J’ai profité de l’allégement des mesures pour aller en vacances. Nous étions trois, mon épouse, moi et notre fils âgé de quinze ans. Nous devions passer une semaine. Les deux premiers jours tout allait bien ; puis nous avons remarqué que les repas se faisaient à partir des restes. Nous avons protesté et il a fallu élever la voix pour avoir satisfaction. Il y avait beaucoup de familles et je vous prie de me croire, elles ne se privent de rien. Les hôteliers eux-mêmes le reconnaissent, la clientèle tunisienne dépense beaucoup plus que les étrangers. Espérons que l’on cessera d’être la cinquième roue de la charrette ».
Le tourisme intérieur
Nous avons certes besoin de devises, mais la clientèle tunisienne est devenue importante. C’est une toute autre stratégie qu’il faudrait adapter pour fidéliser et encourager ce tourisme intérieur qui s’est imposé en dépit de tout. Bien entendu, n’était la pandémie, on aurait toujours eu ces touristes de bas de gamme qui se contenteraient de passer leur séjour en dépensant le moins possible. « On s’affaire pour supprimer ce genre de choix, nous assure un hôtelier du Cap Bon. Nous penchons dans notre nouvelle stratégie vers une valorisation de la qualité des services, de l’accueil, de gîte. Cela passe forcément par une politique de formation (nos meilleurs cadres sont à l’étranger, notamment au Maroc, au Golfe, etc.) et de mise à niveau Il nous faudra des spécialistes, des professionnels dans presque tous les domaines. Cela va des fins connaisseurs des destinations aux cadres de haut niveau en passant par des informaticiens à l’ère du digital. Nous devons en former et pourquoi ne pas en pourvoir toutes les régions, étant donné que la Tunisie regorge de trésors à découvrir. Ce n’est pas facile, cela va coûter de l’argent, mais c’est essentiel si nous voulons faire de ce tourisme un secteur réellement chef de file de bien d’autres secteurs qui vivent de lui ou à ses côtés. De toutes les façons, le tourisme intérieur ne doit plus être considéré comme un bouche trou. Il a besoin de toute une stratégie. Les dates sont connues : les vacances scolaires et bien entendu l’été».
Le sommeil des justes
Comment se présente la nouvelle saison ? « Les bonnes nouvelles commencent à tomber : la Grande-Bretagne et Qatar ont retiré la Tunisie de la liste rouge, pour la France, la Tunisie figure, désormais, sur la liste orange. D’autres pays vont suivre. Mais…. lorsque l’on voit la situation du pays, il y a de quoi avoir peur. Ce n’est pas du tout sur le plan politique que nous nous inquiétons. On voit des manifestations tous les jours à l’étranger. Mais tout en sachant que le visiteur tient à avoir la paix, le calme et la joie de vivre, il y a de quoi s’inquiéter. De la situation de nos villes alors que tout est délabré. Nous ne donnons pas l’impression que nous sommes un pays touristique. Il faut procéder au toilettage de nos villes, surtout celles qui sont concernées par les circuits, organiser les restaurants, les boîtes de nuit, voir ce qui manque ou ce qu’il faudrait améliorer Des routes coupées pour un oui ou un non. Des accidents qui font de nous un des pays possédant les routes les plus meurtrières, cela n’a rien de ragoûtant pour un touriste qui tient à rentrer chez lui en un seul morceau».
Les académies du sport
Le touriste est devenu plus exigeant. Il cherche plus la qualité, on doit vite s’adapter, innover, être à l’écoute, mobiliser tous les secteurs et les départements pour que rien ne manque. Au titre des nouveautés, notre interlocuteur dit qu’il travaille sur un projet qui permettrait d’accueillir les élèves des académies du sport avec leurs parents. « Si j’arrive à remettre à temps en état les installations sportives, ce sera un nouveau créneau porteur, car les parents voudraient tant voir leurs enfants s’entraîner sous leurs yeux.