Quelques mois seulement nous séparent du début du sommet de la Ticad 8, l’un des événements les plus importants que la Tunisie va abriter en 2022. La Chambre de commerce et d’industrie tuniso-japonaise (Ccitj) a mis les bouchées doubles pour fignoler les préparatifs et faire en sorte que la Ticad 8 soit non seulement un événement réussi mais aussi un événement de référence et une opportunité de relance pour les investisseurs japonais, tunisiens et africains.
Après un marathon de séminaires thématiques ayant réuni des promoteurs tunisiens et des investisseurs japonais, la Ccitj procédera prochainement, dans le cadre d’une pré-Ticad, à la présentation du livre blanc des projets les plus prometteurs pouvant faire l’objet d’un partenariat triangulaire.
Jeudi dernier, c’était au tour des opérateurs agricoles de faire le focus sur les secteurs de l’économie bleue et de l’agribusiness. Dans le cadre de son “Road Map to Ticad 8”, la Chambre de commerce et d’industrie tuniso-japonaise a organisé un séminaire sur le thème “Economie bleue et agribusiness”, en présence d’experts tunisiens et japonais qui ont passé en revue les opportunités de partenariat dans ces domaines de pointe. L’événement était également une occasion pour plusieurs opérateurs privés tunisiens et japonais de présenter leurs technologies ainsi que leurs projets.
Les préparatifs vont bon train
Des diverses interventions qui ont ponctué l’événement, il ressort que les filières agricoles qui intéressent les investisseurs japonais sont très diversifiées. Allant de l’aquaculture à la filière des huiles essentielles et plantes aromatiques, passant par la géothermie agricole, les Japonais sont prêts à mettre le paquet et assurer le transfert du savoir-faire et des technologies dans ces secteurs en devenir. Abondant dans ce sens, l’ambassadeur du Japon en Tunisie, SE Shinsuke Shimizu, a révélé dans une déclaration que ces secteurs ont été déjà visés par des projets d’investissement concrets, tels que la ferme d’élevage de thon rouge, située au large de Mahdia et le projet de production de feuilles d’olivier pour l’alimentation des poissons. L’ambassadeur a mis l’accent sur le déroulement des préparatifs du sommet qui vont bon train, précisant que la Chambre du commerce tuniso-japonaise devrait prochainement diriger une délégation d’hommes d’affaires tunisiens qui sera en visite au Japon pour présenter différents projets.
Revenant sur les domaines vers lesquels est tourné le sommet de la Ticad 8, le président de la Ccitj, Hédi Ben Abbès, a rappelé, dans une déclaration à La Presse que la chambre a identifié sept principaux secteurs qui intéressent les Japonais, à savoir la santé, le digital où la Tunisie a su se construire une image de marque, le secteur automobile, la formation, l’agribusiness et l’infrastructure.
Un livre blanc sera présenté lors de la préTicad
Après moult réunions et séminaires, la Ccitj va devoir retenir les projets les plus pertinents pour les recueillir dans un livre qui sera présenté aux investisseurs japonais et africains. “Notre méthodologie de travail est très simple. On veut que ça soit du concret. On n’a pas besoin d’une énième rencontre entre des personnes. On veut absolument qu’il y ait des retombées économiques directes pour la Tunisie. Pour ce faire, on a sollicité des projets. Il faut que les projets soient pertinents, d’ampleur africaine avec une valeur ajoutée à apporter et que le Japonais puisse trouver son intérêt dans ces projets-là”, a-t-il précisé. Il a lancé, dans ce contexte, un appel à tous les promoteurs qui ont des projets dans les secteurs mentionnés afin qu’ils puissent les déposer avant la tenue de la pré-Ticad. “On va recueillir l’ensemble de ces projets qui doivent être pertinents et précédés par une étude et un Business Plan, dans un livre blanc qui va nous servir de support et qu’on va présenter à nos amis africains et japonais.
On va essayer d’organiser une pré-Ticad et peut-être voir comment on peut effectuer une visite en délégation au Japon bien avant la Ticad. L’objectif est de présenter notre livre blanc avant la tenue de la Ticad pour qu’à l’arrivée du sommet en août, on puisse au moins concrétiser quelques projets”, a-t-il ajouté. Et de noter. “C’est un travail colossal qui a été fait depuis plus d’un an maintenant. On arrive à la fin de la première phase. Le livre blanc sera le couronnement de tout ce travail”.
Ben Abbès a fait savoir que le dernier séminaire aura lieu le 31 mars et sera consacré au financement. “On va essayer de présenter toutes les solutions que la Ticad offre. A l’instar de la Ticad 7 où une grosse somme de 20 milliards de dollars a été mise sur la table, on espère qu’il y en aura plus cette fois-ci parce qu’avec la crise de la Covid, on a besoin davantage de financement pour relancer l’économie”, a-t-il indiqué.
Les filières agricoles qui attirent les investisseurs japonais
S’agissant des filières agricoles qui attirent les investisseurs japonais, le président de la Ccitj a expliqué que les Japonais aiment beaucoup tout ce qui est respectueux de la nature et de l’environnement. Ils sont connus pour leur savoir-faire et les technologies qu’ils utilisent dans l’exploitation de la mer et de la terre. “Ils ont un savoir-faire que nous n’avons pas. On va essayer de profiter de leur savoir-faire surtout dans l’économie bleue parce que c’est un pays entouré de mer qui a acquis une expertise très importante. Cette expertise peut être mise en œuvre en Tunisie et transférée dans d’autres pays africains. Et c’est ça notre objectif: faire de la Tunisie un partenaire stratégique pour le Japon à l’échelle africaine pour qu’à chaque fois où ils souhaitent investir en Afrique, ils pensent d’abord à s’installer en Tunisie, faire appel à la main-d’œuvre qualifiée tunisienne et au savoir-faire tunisien en matière d’étude et d’investissement. C’est un package qu’on essaie d’offrir à nos amis japonais en espérant qu’ils soient séduits et que de notre côté on soit à la hauteur de la confiance qu’ils nous ont déjà accordée en abritant cet événement en Tunisie”, a-t-il souligné.
Rim Haddaoui, représentante de l’Apia, a affirmé dans une déclaration à La Presse que l’agence dispose déjà d’un portefeuille de projets d’investissement estimé à 100 millions de dinars. Les projets couvrent les domaines de l’aquaculture, la recherche scientifique, la géothermie et la culture sous serre. Elle a ajouté que la Smart Agriculture, les plantes aromatiques et médicinales, la géothermie agricole et l’investissement dans les énergies renouvelables utilisées dans la production agricole figurent parmi les secteurs les plus attractifs pour les Japonais. Elle a, par ailleurs, fait savoir que l’agence compte organiser au mois d’août prochain des journées B2B pour permettre aux promoteurs tunisiens et japonais de prospecter les opportunités d’affaires dans le secteur agricole.
Les Japonais sont exigeants mais ils ne lésinent pas sur les moyens
Saida Ben Slama, responsable au sein de la société d’extraction des huiles essentielles et arômes Saraya Beauté et Santé, a livré son témoignage sur les préparatifs menés par l’entreprise en vue de participer à la Ticad8. Avec la construction de deux nouvelles usines (La première est dédiée au conditionnement de l’huile d’olive alors que la deuxième est une usine de fabrication de produits cosmétiques naturels) pour un montant de 6 millions de dollars, la société compte développer son activité dans la région d’El Fejja. “Je pense que les filières des plantes aromatiques et des produits forestiers intéressent beaucoup les Japonais et ont le vent en poupe sur le marché international. D’ailleurs, beaucoup ont commencé à trouver des idées d’investissement innovantes et originales”, a-t-elle témoigné.
Interrogé sur les opportunités apportées par la Ticad 8, Ben Slama a précisé que les Tunisiens sont appelés à bien se préparer pour pouvoir tirer profit de cet événement d’envergure. Et d’ajouter : “La Ticad est un événement d’envergure. Malheureusement beaucoup de Tunisiens n’ont pas conscience de son ampleur. C’est un événement extraordinaire qui va aider l’économie à faire un grand pas. Il faut que les Tunisiens se préparent bien et sachent profiter de cet événement. Lors de la Ticad 6 qui s’est tenue en 2016 à Nairobi, il y avait seulement 7 sociétés japonaises et pourtant, les Kényans ont bien profité de la présence des Japonais. En 2020, après quatre ans, 70 entreprises japonaises seraient présentes à l’événement. Des investisseurs opérant dans divers secteurs et des délégations officielles viendront des quatre coins de l’Afrique, du Japon et même de l’Europe pour assister à l’événement. Il faut bien préparer ses idées, parce que quand il s’agit de travail, les Japonais sont exigeants mais ils ne lésinent pas sur les moyens lorsqu’ils souhaitent investir».