Les coutumes et les traditions des femmes rurales ont traversé les années sans prendre une ride.
On parle beaucoup de la femme rurale en ces temps et —faut-il l’avouer— on a l’impression que l’on vient de découvrir son existence. Que sait-on d’elle, de son mode de vie, de ses coutumes et traditions, de ses besoins et désirs ? On s’en souvient à l’occasion d’un drame, quand le malheur veut qu’une camionnette, qui l’emmène sur son lieu de travail, fasse un accident. Il y a près de cinquante ans de cela, Fatma Ben Becher publiait une étude sur la femme rurale, étude qui vient d’être éditée par le Crédif, et qui demeure, curieusement, d’étonnante actualité. Fatma Ben Becher est pour nous, ce qu’au Japon, on appelle «un trésor national». Comment présenter cette dame à la culture infinie et à la non moins infinie générosité de partage.
Sociologue de formation, professeur de langue et de littérature françaises, productrice de la première émission féminine à la télévision nationale, conseillère municipale et adjointe au maire pour la culture durant plusieurs mandats, elle fondait l’association Ecume-—échanges culturels en Méditerranée— ainsi que le Festival de la médina. On lui doit, par ailleurs, de nombreux ouvrages, tous reliés à l’histoire et au patrimoine : «Le théâtre municipal», «Le costume masculin», et «L’histoire d’une avenue» pour n’en citer que quelques- uns.
Des rites immuables
Née dans une famille ancrée dans la Médina de Tunis depuis des siècles, elle n’hésita guère à suivre un époux agriculteur à Ben Bechir, région rurale de la Tunisie profonde. Ce séjour, elle le mit à profit pour étudier, en sociologue, mais aussi avec l’empathie d’une femme, la vie, les coutumes, les traditions de ces femmes avec lesquelles elle partageait son quotidien. Rien de ce qui les concernait ne lui est resté étranger : comment elles s’habillaient et en quelles circonstances. Ce qu’elles mangeaient, et comment elles le préparaient. Ce qu’elles fêtaient, et de quelle manière elles le faisaient. L’organisation de leur journée de travail, que ce soit en temps des travaux saisonniers, ou en temps de repos. Leurs rites de naissance, mais aussi leurs rites funéraires. Leur rapport à la religion, mais aussi à la superstition.
Alors, bien sûr, les choses ont changé, cette étude ayant porté sur les années 1952/1970. Mais on est en droit de se poser la question : ont-elles vraiment changé tant que cela?