Le monde autour de l’Afrique est en train de changer. Les profondes mutations en cours auront probablement un grand impact sur l’Afrique, appelée plus que jamais à devenir, à son tour, un acteur et prendre son destin en main. Sur ce chemin, l’Afrique peut compter sur des champions continentaux, dont le Japon.
La Conférence de Tokyo sur le développement en Afrique Ticad 8, tenue à Tunis les 27 et 28 août dernier, se veut une plate-forme de coopération multilatérale entre le Japon et l’Union africaine, associant les Nations unies et la Banque mondiale en tant que partenaires de développement de l’Afrique. Les participants à cette édition se sont félicités de la tenue de cette conférence pour la seconde fois en terre africaine et ont salué les efforts et le leadership du gouvernement tunisien pour l’organisation réussie de cet évènement.
Dans un contexte économique mondial instable, où les pays développés, le Japon en l’occurrence, ont connu une baisse conséquente de leurs investissements, en raison de la dépréciation rapide de leurs monnaies, les entreprises japonaises avaient besoin, ces dernières années, de stratégies pour parvenir à une croissance durable, et ce, en recourant à la conquête d’autres marchés prometteurs, tels que celui de l’Afrique dont la croissance sur le plan économique est spectaculaire. Considérée comme une terre d’opportunités immenses, l’Afrique est entrée désormais dans une phase où elle devrait être considérée comme un partenaire important pour les entreprises japonaises tournées vers la mondialisation.
Partenariat juste et équitable
Lors des travaux de cette conférence, les partenaires de la Ticad ont évoqué les défis globaux, à savoir l’affaiblissement de l’économie mondiale, l’insécurité alimentaire, l’extrême pauvreté, ainsi que la montée du terrorisme et de l’extrémisme violent, pour souligner la nécessité d’inclure le continent africain dans la prise en charge de ces défis. C’est à ce titre que le Japon a plaidé pour un partenariat juste et équitable, à même de soutenir les efforts du continent africain pour accroître sa part dans la croissance économique mondiale.
La Tunisie a appelé, dans ce contexte, à l’adoption d’une approche pragmatique, basée sur l’interdépendance entre sécurité, paix et développement, pour permettre aux partenaires de la Ticad d’améliorer les opportunités d’investissement direct dans le continent africain et de valoriser ses ressources humaines, naturelles et technologiques. Par ailleurs, le Président de la République, Kaïs Saïed, a saisi cette occasion pour rappeler le cadre général adopté par les chefs d’Etat de l’Union africaine (UA) définissant les objectifs des partenariats multilatéraux avec le continent africain, en soulignant la nécessité de veiller à ce que tous les Etats membres de l’UA participent aux sommets relatifs à ces partenariats.
Au cours de ces assises fructueuses, les partenaires ont mis en exergue les opportunités d’affaires et de commerce, plaidant pour davantage d’intégration économique et commerciale au sein du continent africain.
Cette édition s’est achevée par l’adoption d’une déclaration commune qui identifie trois piliers de coopération entre le Japon et le continent africain, à savoir la réalisation d’une transformation structurelle pour une croissance économique, la construction d’une société résiliente et durable, et la garantie d’une paix et d’une stabilité durables. Cette déclaration servira de feuille de route aux relations entre le Japon et le continent africain pour les prochaines années.
Diplomatie économique
Le Japon s’est engagé économiquement depuis des années en Afrique, dans l’objectif de redynamiser son économie, par la recherche de leviers de croissance à l’international, tel que l’Afrique qui est un continent en pleine expansion économique. La priorité pour lui était de mobiliser massivement ses investissements privés et de rattraper son retard sur le marché africain, face aux autres acteurs asiatiques et occidentaux.
Tokyo a donc cherché à passer d’une politique centrée sur l’aide publique au développement (APD) attribuée aux pays africains, dont le budget ne cesse de se contracter, à une approche basée sur les investissements privés, à travers une série de mesures incitatives déployées dans le cadre de sa diplomatie économique.
La mobilisation du milieu des affaires nippon est donc centrale pour étendre la présence économique japonaise sur ce marché prometteur, mais aussi pour continuer de sécuriser des ressources énergétiques et minérales stratégiques.
La diplomatie économique du Japon en Afrique vise, en effet, deux objectifs : l’un purement économique, l’autre d’ordre géopolitique. Dans le premier cas, c’est la rentabilité qui préside à la décision d’investir, alors que dans le second, c’est la logique politique qui prédomine.
Dénominateur commun
L’agenda de coopération nippon-africain, l’un des acquis importants de la Ticad 8, s’est soldé par la signature de plusieurs accords de coopération et de partenariat dans divers domaines.
Des échanges économiques ont aussi été sur la table des négociations avec les dirigeants des pays africains, japonais et tunisiens pour booster les relations bilatérales et triangulaires.
En somme, la 8e édition de la Ticad est qualifiée de «très réussie» par les partenaires, car elle a permis un rapprochement qui n’aurait pas été possible s’il n’y avait pas une volonté affirmée de toutes les parties prenantes.
Tous ces échanges sont placés sous un dénominateur commun, celui de la conformité avec les principes du respect et de la confiance mutuels, et l’équilibre des intérêts, susceptible d’imprimer à ces relations un élan qualitatif, à même d’assurer une consécration de la nouvelle orientation fondée sur un partenariat d’exception.
Les parties prenantes sont déterminées à intensifier les efforts en vue de rehausser leurs relations suivant un calendrier précis pour l’activation des mécanismes de coopération et la consolidation de la dynamique positive au cours des prochaines échéances.