Accueil Economie Faouzi Zayani, agriculteur et expert en politique agricole et développement durable à La Presse : «La Tunisie est capable de proposer de nouveaux axes de développement durable»

Faouzi Zayani, agriculteur et expert en politique agricole et développement durable à La Presse : «La Tunisie est capable de proposer de nouveaux axes de développement durable»

 

L’économie verte est une équation difficile mais faisable entre la préservation des ressources naturelles, la protection de l’environnement et l’exercice de toute activité agricole respectant ces principes. C’est un mode de conduite qui a pour finalité le développement durable et a pour objectif le maintien d’un écosystème équilibré. Mais, en Tunisie, nous sommes loin du compte et continuons à bafouer toutes les normes primaires du respect de la nature. Nous sommes loin de l’exigence d’une transition énergétique durable pour un bien-être du citoyen et pour une durabilité des activités agricoles. Plus d’informations avec Faouzi Zayani, agriculteur et expert en politique agricole et développement durable.

Quelles sont les contraintes liées à l’exercice d’une économie verte en Tunisie ?

Malheureusement le secteur de l’économie verte rencontre plusieurs difficultés. La première contrainte concerne la sourde oreille des pouvoirs publics, malgré les appels incessants des experts et de la société civile qui mettent en garde contre tout abus de l’exploitation massive des ressources naturelles et contre le non-respect de l’environnement. Nous avons un ministère de l’Environnement incapable de gérer les crises, notamment celle des déchets à Sfax. Il est incapable, au même titre que le ministère de l’Agriculture, de sensibiliser et de proposer des alternatives à ce que nous vivons comme stress hydrique et énergétique. Aussi, nos lois ne suivent pas les changements que vit le monde, à savoir les changements climatiques… Ces lois freinent parfois toute tentative de développement durable au profit d’une société de consommation. Il n’existe pas de stratégie ni même de programme de court, moyen ou long terme visant la transformation de notre modèle économique et sociétal.

 L’économie verte est-elle capable d’absorber le taux de chômage élevé et de créer de nouveaux postes d’emploi ?

L’économie verte représente une vraie opportunité pour la création de l’emploi, particulièrement chez les jeunes qui sont intéressés par tout ce qui est nouveauté, d’une part, et tout ce qui est une activité en rapport avec l’environnement et les nouvelles technologies, d’autre part. Le potentiel existe mais il est mal exploité. Il faut mettre l’accent sur les nouvelles technologies, l’emploi des jeunes et le respect de l’environnement. Cette alchimie peut être exploitée au profit de l’économie nationale. Plusieurs marchés extérieurs sont demandeurs des produits respectant l’environnement, issus de l’agriculture durable et biologique.

Les ressources naturelles supportent déjà pas mal de pressions, comment changer les mentalités pour réduire ces pressions ?

Les ressources naturelles sont surexploitées sans que les pouvoirs publics prennent les dispositions nécessaires pour arrêter cet abus (exemple des ressources en eau qui sont surexploitées dans plusieurs régions et cela représente un vrai danger pour le secteur agricole et les générations futures). Nous devons respecter un développement maîtrisé et raisonné qui veille aux bons usages de nos ressources naturelles sans pour autant être en manque de produits de base. Pour cela il faut une vraie révolution dans nos manières de penser pour mieux consommer. On peut établir une vraie équation entre le respect de l’environnement et la nécessité d’assurer une production nationale suffisante pour une souveraineté alimentaire.

Comment peut-on concilier entre un développement durable et  la sauvegarde des ressources naturelles ?

C’est une équation tout à fait réalisable, lorsque l’on comprend ce qui se passe ailleurs, suite  aux changements cruciaux comme le Covid-19 et le conflit russo- ukrainien. Ces changements tournent autour des questions de l’énergie et de l’alimentation. Cela nous conduit à réviser notre approche pour un développement durable assurant une autosuffisance alimentaire et une préservation de nos ressources naturelles. Nous remarquons un manque notable de sensibilisation pour les citoyens sur les effets néfastes du non-respect de l’environnement. Pour les acteurs économiques, il faut davantage de sensibilisation et de soutien en vue de développer des activités portant la mention « économie verte ». Et même sur le plan international, il existe plusieurs programmes visant à soutenir les initiatives et les projets issus de l’économie verte.

Comment l’économie verte arrivera-t-elle à s’autogérer ?

Les changements que subit le monde (changements climatiques et géopolitiques) obligent les gouvernements dans plusieurs pays à s’adapter relativement à cela. Certains pays sont avant-gardistes et anticipent ces changements. Ils ont même profité économiquement et ont su orienter leurs activités vers ce créneau porteur qui est l’économie verte. Ils ont su également concilier entre diverses activités économiques qui respectent le développement durable et le développement économique tout court. Respecter l’environnement peut se conjuguer avec une expansion économique durable et particulièrement lorsque nous saurons profiter des nouvelles technologies pour une meilleure explosibilité des jeunes et une meilleure découverte de nouveaux marchés porteurs.

Quelles solutions pouvez-vous proposer pour mieux développer l’économie verte ?

Plusieurs solutions telles que : une sensibilisation massive destinée aux citoyens des changements que l’environnement subit et la nécessité qu’il faut être acteur et maître de son destin dans un monde qui est en perpétuels transition et changement.

Une vraie sensibilisation relative à notre manière de vivre et de consommer sain et respectueux de notre environnement.  Une politique économique courageuse qui met en valeur l’économie verte et qui encourage toute nouvelle initiative du secteur privé. Cette politique vise à rationaliser nos ressources naturelles et développer une activité économique durable. La législation doit être à jour vis-à-vis des changements mondiaux, des nouvelles orientations économiques dans le monde. Il faut en tirer profit et nous sommes capables en Tunisie de nous adapter et de proposer de nouveaux axes de développement durable mais seulement si on adopte une méthode de travail participatif qui intègre tous les acteurs et tous les experts.

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