Accueil A la une Entre report et incertitude : A quel prix ces vacances sont-elles studieuses ?

Entre report et incertitude : A quel prix ces vacances sont-elles studieuses ?

 

Ces courtes vacances n’ont pas été vécues de la même manière par tous les élèves. Et ce n’est pas du tout une surprise.

Avec les grands problèmes que vit et connaît la société tunisienne de manière générale, il fallait s’y attendre. Surtout que ce n’étaient pas du tout des vacances de repos mais bien des «vacances studieuses» après lesquelles on a programmé des examens.

Pour les élèves, intéressés par ces examens, il fallait tirer profit de ce laps de temps pour réviser et, surtout, colmater les brèches que les absences des enseignants ont grandement ouvertes et dont ils appréhendent les conséquences. En effet, en dépit de tous les efforts que l’on pourra faire, il est extrêmement difficile de rattraper le temps perdu.

«Nous ne sommes pas sûrs que l’on tiendra compte de ce facteur. Pour ce qui me concerne, nous confie un élève, j’ai pu me préparer avec l’aide de l’un de nos voisins. Mes parents n’ont pas les moyens de me payer des cours particuliers».

S’amuser et squatter les rues

«C’est mieux que rien. Regardez, dans ce groupe que vous voyez en train de jouer au football. Ils jouent toute la journée et, parmi eux,  il y a trois de mes camarades de classe. Je suis sûr qu’ils n’ont rien préparé. Leurs parents travaillent toute la journée et ne peuvent pas les contrôler. Ils font ce qu’ils veulent et, bien entendu, ils passent la journée à s’amuser et à squatter les rues du quartier. A Raoued, il n’y a pas beaucoup de choses à faire».

Effectivement, ces affirmations nous ont été confirmées par un des…. footballeurs en herbe: «Quelques-uns de nos profs sont venus en retard. Je ne sais même pas quoi préparer.

A peine avons-nous commencé les cours que sont venues ces vacances. J’ai personnellement essayé, mais j’ai trouvé que c’était difficile. J’ai laissé tomber. J’essaierai de me rattraper. Sinon…».

Combien sont-ils dans le même cas ? Quelle sera l’issue pour ceux qui n’ont pas de voisins ou de personnes dans la famille capables de les aider ? Ce sera sans aucun doute de futurs candidats à la rupture avec le milieu scolaire, qui viendraient renforcer le lot déjà important de ceux qui n’ont plus d’issue que la rue.

On estime qu’ils sont au nombre de cent mille/an. Cette armada, que l’on donne l’impression de vouloir renforcer pour couler le pays, est un danger, une bombe à retardement sur laquelle il faudrait plancher sérieusement une fois les choses stabilisées.

Tard dans la journée de dimanche, au crépuscule, un des voisins quittait son domicile, accompagné d’un de ses enfants. Il portait un sac à dos. La pluie fine tenait bon et ils s’engouffrèrent rapidement dans la voiture. Une aubaine pour aller acheter une baguette.

Eviter le décrochage

«Il a un cours particulier de dix sept heures à dix neuf heures. Je suis bien obligé de le soutenir pour lui éviter un décrochage qui pourrait lui être fatal. Ces absences de professeurs et ces grèves sont de véritables catastrophes nationales pour toutes les familles. Il est impensable que l’on prenne en otages nos enfants. Et dire que l’on nous soustrait d’autorité notre cotisation syndicale. En fait, nous confortons ceux qui se jouent de l’avenir de nos enfants. C’est un scandale».

Arrivé devant le domicile de l’enseignante qui donnait des cours de rattrapage, nous avons retrouvé les mêmes réprobations. On en voulait à ces grèves qui n’en finissent pas. «Cette professeure est une aubaine. Elle mérite ce qu’elle reçoit. Elle ne prend que des groupes de quatre à cinq élèves à la fois et veille à ce que ce soit du même niveau».

Sur le pas de la porte, une dame écumait de rage. «J’ai vendu mon bracelet. Un bijou que j’ai hérité de ma mère pour payer ces cours particuliers. Mon mari est malade. La Cnam ne lui rembourse presque rien et je m’épuise à aller faire la queue pour demander ce qu’il advient de nos dossiers de remboursement. Il n’y a que des excuses et des recherches de la petite bête pour ne pas rembourser ou pour renvoyer les remboursements et gagner du temps».

Trouver une solution

L’éducation c’est comme la police ou l’armée. Il y va de la sécurité nationale. Il faut trouver une solution pour qu’on cesse de renforcer la population des ratés qui deviendront des bandits et des criminels. Qu’ils fassent grève pour nous priver de lumière, d’essence, de pain ou de lait cela nous importe peu.
Mais nos enfants c’est une ligne rouge qu’il faut absolument respecter. Qu’on fasse un référendum pour considérer l’Education et la Santé des secteurs où on ne fait pas grève. Que le peuple décide de quelle manière il veut former ses enfants. On a le droit de réclamer mais pas de tenir en otage les générations futures. Les enseignants doivent être bien payés et bien traités, mais en s’engageant dans ce métier, il faudrait que ce soit un choix du cœur avant tout. L’Etat leur garantit leur avenir. Un point c’est tout.

Bonnes vacances !

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