Le défi est relevé haut la main ! Voilà une ouverture digne de ce nom pour un festival qui s’est laissé éteindre durant des années.
Le festival de la chanson tunisienne, qui a repris tout juste l’année dernière après une très longue absence, a montré avant-hier soir, au théâtre de l’Opéra de la Cité de la culture, un véritable désir de redonner à la chanson tunisienne avec toutes ses variantes ses lettres de noblesse.
Le message du comité directeur a été bien clair et sa crédibilité a fait en sorte que les artistes tunisiens ont répondu à l’appel. Dans l’organisation, dans le conseil et dans la programmation.
Oumayma Ayari et Hatem Ben Amara ont été les maîtres de cérémonie. Et la prestation de Hatem Ben Amara mérite bien une mention. Sa maîtrise, son éloquence, sa connaissance et sa fluidité dans la présentation furent un élément décisif dans la réussite de la soirée inaugurale. Hatem Ben Amara, dans un moment anthologique et dans un élan improvisé ou presque, — il avait l’air naturel et spontané —, a fait chanter Salah Charnoubi la chanson qu’il a composée à Dhekra «Wehyati andak».
Cette soirée d’ouverture portée par la mémoire de Dhekra Mohamed était aussi une occasion de belles retrouvailles et un devoir de mémoire et de reconnaissance à ceux qui l’ont connue et ont signé des collaborations musicales avec elle.
Une ouverture haute en couleur et en lumière qui s’est déroulée en présence d’invités et de célébrités de tous bords: stars et vedettes tunisiennes et arabes, artistes, musiciens, paroliers, compositeurs et figures du monde de l’art et de la culture.
Trois grands noms de la scène arabe ayant eu une expérience avec Dhekra ont été également honorés, à savoir, d’abord, Abderrahmane Ayadi qui fut son mentor et qui lui a offert les plus belles chansons de son répertoire des débuts, l’arrangeur égyptien Mohamed Mostapha, le poète Heni Abdelkarim et le compositeur Salah Charnoubi. Sans oublier aussi une figure de la scène audiovisuelle égyptienne, l’animatrice de télévision Mona El-Shazly, qui n’a pas manqué de louer avec nostalgie et amour le parcours riche et dense de la regrettée avec sa voix inégalable, inclassable et puissante.
Sur la scène finement déployée, l’Orchestre national de musique au grand complet, sous la houlette du jeune maestro Youssef Belhani, a ensuite accompagné une belle brochette d’artistes dans des prestations où les chanteuses Emna Dammak, Molka Cherni, Safa Saad, Nawel Ghachem, Eya Daghnouj, Olfa Ben Romdhane, Yosra Mahnouch et les chanteurs Ghazi Ayadi et Mohamed Jebali ont repris certains tubes parmi les 16 albums de la chanteuse Dhekra Mohamed, pour ne citer que «Ila Hodhn Ommi», «Wehyeti andek», «Ana zay Zaman» «Wselni jawab», «Allah ghaleb», «Youm lik youm alik»…
Pour cet hommage au pluriel, ce sont des artistes tunisiens prestigieux et de grands noms de la scène musicale arabe, des artistes qui, l’ayant connue et côtoyée, ont répondu présents pour cette soirée où les uns l’ont chantée et d’autres ont chanté pour elle comme Cheb Jilani, Mohamed El Helou, Heni Chaker…
Pendant plus de deux heures, le théâtre de l’opéra a vibré au rythme de célèbres chansons du répertoire de Dhekra plongeant les présents dans les mélodies d’hier. À la mémoire de cette artiste exceptionnelle. De la classe, du beau dosage, un rythme maîtrisé, de l’émotion, en somme les ingrédients nécessaires pour une image fraîche mais bien ancrée dans une histoire et fidèle à sa mémoire.