Ce statu quo où tout le monde est sur le qui-vive, en attendant le faux pas de l’autre. La réponse est on ne peut plus claire, cette situation ne profite à personne. Ni à Kaïs Saïed, ni à l’opposition, gangrénée par la corruption et prise en otage par une élite anachronique, ni même à la population anesthésiée qui se croit à l’abri, mais qui est toujours, de tout temps, la première à subir les conséquences d’une lutte du pouvoir.
Depuis quelques mois, la vie politique en Tunisie est comme vitrifiée, avec d’un côté un pouvoir qui peine à imposer sa pleine légitimité à l’intérieur comme à l’extérieur, et une opposition qui n’est plus, que l’ombre d’elle-même et sans aucun lien avec la population. Une population qui d’ailleurs, disons-le clairement, a pris ses distances avec la chose publique et les querelles d’une caste politique sans profondeur ni projet véritable.
Le Tunisien, aujourd’hui, est de plus en plus dans une situation de détresse due essentiellement à la crise économique et la détérioration du pouvoir d’achat. Il développe alors un comportement tout naturel, beaucoup plus égoïste, plus individualiste, centré sur les préoccupations du quotidien. De moins en moins de Tunisiens (en comparaison de l’engouement qui a succédé au soulèvement de 2011) peuvent se projeter dans des projets politiques de grande envergure pour le bien de la nation.
Mais à qui peut profiter ce marasme social, politique et économique ? Ce statu quo où tout le monde est sur le qui-vive, en attendant le faux pas de l’autre. La réponse est on ne peut plus claire, cette situation ne profite à personne. Ni à Kaïs Saïed, ni à l’opposition, gangrénée par la corruption et prise en otage par une élite anachronique, ni même à la population anesthésiée, qui se croit à l’abri, mais qui est toujours, de tout temps, la première à subir les conséquences d’une lutte du pouvoir.
Le dialogue comme seule issue
Quelle est la solution ? intuitivement, c’est celle du « dialogue » national qui s’impose. Un terme tellement galvaudé et maltraité ces dernières années que l’évoquer peut prêter à sourire. Mais avons-nous une autre issue que celle du dialogue ? Une autre question se pose si nous admettons qu’il est primordial de se mettre autour d’une table : avec qui et sur quelle base doit s’amorcer un dialogue ?
Avec qui ? Avec l’ensemble du spectre politique. Mais sur quelles bases ? Pour parvenir à un dialogue, il faut que chacun fasse la moitié du chemin. Pour l’opposition, mais également les organisations nationales, il est urgent de cesser immédiatement toute velléité de miner le pouvoir du Président à travers l’affaiblissement des institutions et des efforts diplomatiques. En effet, pour l’Etat tunisien aujourd’hui, l’urgence est de sortir rapidement de la crise financière qui étouffe le pays. Or, au lieu de déployer la diplomatie extérieure pour débloquer ce dossier, cette dernière consacre une énergie colossale pour se défendre des accusations formulées par l’opposition.
Lâcher du lest de part et d’autre
L’heure est venue pour l’opposition de lâcher un peu du lest, en entérinant le « processus Saïed » depuis le 25 juillet, et en laissant aux historiens le soin de juger cette parenthèse historique du pays. Un entérinement qui, bien évidemment, devra s’accompagner d’un engagement, de la part du Palais de Carthage, celui d’accepter de dialoguer sur des questions d’avenir, et surtout la question économique. En gros, mettre de côté les divergences politiques et conjuguer les efforts pour résoudre la crise économique, voire accepter, pouvoir et opposition, de parler d’une seule et même voix à l’international.
Mais ne nous voilons pas la face, c’est au locataire de Carthage de faire le premier pas et d’envisager des concessions, au moins quelques-unes. Il pourrait déléguer à une sorte de commission le soin de mettre en place ce dialogue.