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Ne comptons pas sur la Providence

Editorial La Presse

 

Parmi les mots devenus à la mode en Tunisie ces derniers temps, les Brics. Cet ensemble créé par 5 pays (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud) en 2009, suscite un grand engouement compréhensible. Ces 5 pays, c’est près du tiers du PIB mondial et 45% de la population du globe cette année, ainsi que 40% de la croissance mondiale en 2025.

Ce poids séduisant, cette sorte de défi à la toute-puissance des Occidentaux, cette autre voie de pays sans passé colonial, plaisent et attirent. Surtout lorsqu’on entend dire çà et là que le FMI veut imposer des diktats, sans tenir compte des besoins réels des populations, donc des Tunisiens. Et que les Brics de leur côté ont créé une alternative au FMI, une banque de développement qui prête sans les conditionnalités du FMI.

Comme devant toute situation, essayons de regarder les choses froidement.

Les Brics ne regroupent pour le moment que des pays émergents, certes, parmi les plus dynamiques de la planète. Les demandes ou souhaits d’adhésion sont nombreux. Rien ne dit pour le moment que ce sera possible aux pays comme la Tunisie. Mais ce n’est pas tout.

La fameuse Banque de développement était censée être une alternative au FMI, mais la réalité est toute différente. Cette New Development Bank (NDB) prête avec des conditionnalités draconiennes qui semblent calquées sur les conditionnalités hyperlibérales du FMI. Et c’est compréhensible. Tout organisme financier, fût-il de développement (NDB) ou de stabilité financière (FMI), ne prêtera pas sans être sûr d’être remboursé. Et ce n’est pas fini.

Quel est le modèle des Brics ? Est-il un modèle utile pour nous ? Avons-nous des valeurs proches ? Accepteriez-vous de travailler comme un Chinois, en nombre d’heures et en salaire ? Rêveriez-vous de vivre comme un Indien ou un Sud-Africain de base ? Ces 5 pays souffrent encore d’inégalités, et c’est le moins que l’on puisse dire.

Enfin, et nous avons gardé le meilleur pour la fin, adhérer aux Brics, vouloir s’en rapprocher, c’est accepter le leadership de la Chine. C’est, dans un monde mouvant marqué par un féroce affrontement américano-chinois, choisir son camp.

On peut bien sûr choisir son camp, mais il faut le faire en mesurant l’intérêt de la Tunisie d’abord. On peut également choisir de rester neutre, mais dans ce cas, il faut avoir les moyens de son indépendance. Et ces moyens ont un seul nom, non pas providence, mais travail, sérieux et intégrité.

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