Visiblement confiant, le ministre de l’Education a même assuré que la prochaine rentrée scolaire aura lieu à temps et dans de bonnes conditions. Il a fait également part des démarches en passe d’être entreprises pour améliorer le développement professionnel et la qualité de vie des enseignants.
La décision est levée. La commission administrative sectorielle de l’enseignement de base, réunie dimanche à Hammamet, a enjoint aux enseignants de remettre les notes des élèves. Brandie comme une arme de contestation tout au long de l’année scolaire, au point de la compromettre sérieusement, la pratique punitive est désormais nulle et non avenue. Nous ne savons si la partie syndicale joue la carte de l’apaisement ou bien si la fermeté du ministère de l’Education l’a poussée à opter pour d’autres formes de mobilisation, en mettant les petits écoliers à l’abri du bras de fer. Quelles que soient les motivations des uns et des autres, nous ne pouvons que leur dire merci. Sage décision qui a apaisé les familles, les autorités et pratiquement l’ensemble des Tunisiens. L’éducation est un pilier important de la société tunisienne. Nous ne le dirons jamais assez.
Pourtant et jusqu’à dimanche, jour du démarrage des travaux de la commission administrative à la cité balnéaire, tout était envisageable. Et si l’on s’en tient aux déclarations des syndicalistes réunis, alors, les premiers signes avant-coureurs n’étaient pas du tout encourageants.
Lotfi Barghouthi, membre de la Fédération générale de l’enseignement de base, avait dénoncé, face aux médias, ce qu’il considère comme du «harcèlement que pratique l’autorité de tutelle contre les collègues», fustigeant les sanctions appliquées à l’encontre de 350 directeurs d’école révoqués (proches des milieux syndicaux), et à l’encontre des enseignants. Entre 17 à 23 mille d’entre eux — les chiffres diffèrent d’une partie à l’autre — ont vu leur salaire d’un mois suspendu.
Néanmoins et à mesure que le temps passe, la teneur des déclarations évolue. La commission a procédé, nous dit-on, à l’évaluation de la situation. Les instituteurs sont donc priés d’accéder à la plateforme dédiée à cet effet, et de verser les notes avant la date de sa fermeture annoncée pour hier, 24 juillet.
Mais ce n’est pas tout. La commission fait part de sa colère rentrée et dit examiner les mouvements futurs à planifier aux fins de défendre les droits de ses adhérents, avertit encore le responsable syndical. Se mettant en porte-à-faux avec les déclarations du ministère, il affirme que le taux de réussite du mouvement contestataire acté par la rétention des notes a dépassé, jusqu’au 30 juin, les 73%.
Remonté également contre «les déserteurs», Barghouthi se tourne vers les adhérents qui ont, disons, fait preuve de pragmatisme, et remis les notes contre l’avis de leurs représentants syndicaux, pour les sermonner: «Il n’ya aucune excuse pour ne pas respecter les décisions prises». Et les menacer: «Des mesures seront appliquées soit par le gel de l’activité syndicale, soit par le retrait de l’adhésion».
L’art de la négociation
Deux jours avant, vendredi 21 juillet, le ministère de l’Education avait annoncé la remise des livrets scolaires dans les délais. Entre-temps, ses services collectaient et traitaient les notes qui devraient être remises aux élèves dans les écoles et les délégations régionales à l’éducation, à partir du 24 juillet. Dans un communiqué publié sur sa page officielle, le ministère indique qu’après vérification et actualisation des données, le pourcentage des instituteurs à n’avoir pas encore remis les notes des examens est passé sous la barre des 10 %.
Théoriquement, c’est donc à ces 10%, dernier groupe d’instituteurs récalcitrants, que le syndicat a demandé de déposer les notes sur la plateforme.
De son côté et visiblement confiant, le ministre de l’Education, Mohamed Ali Boughdiri, a même assuré que la prochaine rentrée scolaire aura lieu à temps et dans de bonnes conditions. Il a également fait part des démarches en passe d’être entreprises pour améliorer le développement professionnel et la qualité de vie des enseignants.
Aussi, est-il utile de tirer ici quelques enseignements de cette crise aux multiples rebondissements qui a tenu en haleine opinion publique et médias, sans parler des membres de l’exécutif. Les nombreuses définitions du principe de la négociation retiennent invariablement deux éléments: la négociation est «un moyen d’action politique par opposition à la force». Et qui dit négociation dit aussi «arriver à une solution acceptable pour les deux camps». Acceptable pour les deux camps…
Ainsi, appeler aux négociations ne signifie point mettre les revendications sur la table et les imposer, sinon l’épée de Damoclès, incarnée par la rétention des notes, par la grève des transports, de l’enseignement, de la santé, voire générale, suspendue au-dessus de nos têtes peut tomber à tout moment.