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Kairouan: transformation urbaine, le nouvel impératif

Malheureusement, de nos jours, Kairouan n’est plus ce qu’elle était, les murs, les édifices et les routes en disent long sur ses transformations et l’aménagement de son architecture selon les goûts et les besoins.


On sait que l’architecture, plus que tous les autres, influence le mode de vie de l’homme.

A Kairouan, par exemple, l’architecture est la plupart du temps à caractère introverti (maisons, zaouias, mosquées). Les coupoles, les arcades et les voûtes sont partout visibles.

Une réfection permanente est souvent nécessaire

Pour sauvegarder cet ensemble patrimonial précieux avec ses fonctions urbaines et traditionnelles toujours en activité, une réfection permanente est souvent nécessaire. D’où les importantes interventions et réhabilitations, tant au niveau du bâti que du tissu, et qui le sont toujours par les responsables de la sauvegarde du patrimoine. En effet, cette tâche demande beaucoup de précisions, de savoir-faire et d’attention. C’est ainsi que la plupart du temps, les maçons qu’on engage pour réparer ces œuvres architecturales sont en général des «maâlems» expérimentés dans ce domaine.

Habillage externe des dômes et assemblage des claveaux et des poussoirs sont un travail de vrais professionnels. Ces artisans, grâce à leur longue expérience et à leur patience, veillent à ce que la restauration soit adaptée au cachet typique traditionnel. Tous les visiteurs constatent avec plaisir que la capitale aghlabide a su conserver l’intégrité de son cachet architectural et ils restent émerveillés devant la sobre et belle Grande mosquée, les murailles ocres, les coupoles côtelées de Sidi Amor Abada, l’ensemble architectural gracieux de Sidi Sahbi ainsi que les constructions publiques et privées ornées de coupoles, d’arcades outrepassées, de galeries et de voûtes avec, pour référence, les monuments historiques dont notamment La Mosquée Okba.

Une architecture bâtarde 

Par ailleurs, la Médina de Kairouan dispose d’une hiérarchie sociale qui a eu pour conséquence un tracé géométrique et une hiérarchie des espaces, c’est-à-dire que les demeures aisées sont situées en général au fond des impasses avec des filtres (dribas) les distinguant des maisons ordinaires.

Côté fonctionnel, ces maisons disposaient de différents espaces répondant aux activités ménagères et commerciales : makhzen, driba, skifa, hri (réservoir de céréales), caves, etc. Ces dernières étaient destinées à des familles patriarcales. Étant introverties, elles ne communiquaient avec l’extérieur qu’avec une porte, sachant que les fenêtres étaient traitées de manière à filtrer les regards extérieurs. En outre, les ornements sur les portes d’entrée et la richesse du décor indiquaient l’importance du logement. Enfin, chaque quartier disposait de son bain maure, sa mosquée, son marchand de beignets, sa boulangerie, son boucher et son épicier. Malheureusement, de nos jours, Kairouan n’est plus ce qu’elle était, les murs, les édifices et les routes en disent long sur ses transformations et l’aménagement de son architecture selon les goûts et les besoins. Les anciennes et belles demeures ne sont plus la propriété d’une seule personne, mais de dizaines d’individus qui possèdent des parts dans l’indivision.

L’éclatement de la famille, le désintéressement des uns et des autres, la copropriété et le conflit d’intérêts ont porté préjudice au cadre bâti des maisons de la médina. Certaines habitations manquent d’esthétiques à cause d’une architecture bâtarde au niveau des couleurs, des formes, des matériaux utilisés tel que l’aluminium qui a remplacé le bois.

Et puis les matériaux modernes ne répondent pas toujours aux normes de l’architecture traditionnelle.

Ainsi, on constate avec amertume que beaucoup de jolies maisons anciennes sont enlaidies par la présence de climatiseurs, de câbles électriques, de paraboles trop voyants, de traces d’écoulement des eaux pluviales non esthétiques, sans oublier l’utilisation de l’aluminium, des barres vitrées, du béton, des auvents en plastic et en zinc. C’est pourquoi les responsables de la sauvegarde du patrimoine devraient faire plus d’efforts afin d’inciter les citoyens à respecter les spécificités techniques et architecturales des ouvertures (portes, fenêtres…) et les éléments architectoniques.

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Un commentaire

  1. Ftouh

    6 août 2023 à 17:24

    A propos de la ville de Kairouan,
    Ce problème est partout sur le territoire, plus rien ne ressemble à rien.
    Notre patrimoine et notre culture fou le camp, comme vous le dites, plus rien n’est respecté….les autorités municipales, comme ceux en charge du patrimoine sont tous absent ….comment ces autorités délivrent ils des autorisations sans que personne ne respecte le cahier de charge de la ville.
    La Tunisie qui possède un patrimoine riche en mobilier qui dates depuis des siècles est complètement métamorphosé du nord au sud, rien ne différencie nos villes d’une architecture locale d’une autre.
    Aujourd’hui il faudrait faire vite pour sauver nos villes de cette destruction sans fin.
    Votre analyse est juste, en espérant qu’elle réveillera la conscience de l’ensemble de nos responsables.

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