53% des séniors résidant dans les maisons de retraite n’ont pas d’enfants. 22% d’entre eux sont divorcés et 47% célibataires.
Les mutations démographiques, survenues, ces deux dernières décennies, ont convergé vers le vieillissement de la population. Un résultat plus que prévisible qui a incité plusieurs parties concernées à développer des mécanismes de prestations destinées aux séniors. Certes, les maisons de repos ou de retraite relevant du secteur étatique comme celui privé, ont été implantées dans notre pays bien avant. Néanmoins, l’évaluation de leur rendement tardait à venir, mettant en stand-by une mise à niveau pourtant indispensable. Aussi, le ministère de la Famille, de la Femme, de l’Enfance et des Séniors a-t-il exigé l’élaboration d’une étude portant sur l’état des lieux des établissements d’hébergement et de protection des personnes âgées, aussi bien dans le secteur étatique que celui privé, tout en décryptant les spécificités et les attentes de la population-cible. Il s’agit d’un travail de recherche et de réflexion ayant pour finalité de réviser l’approche de prise en charge adoptée jusque-là, de cerner les défaillances à combler et de miser, désormais, sur les exigences de cette catégorie sociale vulnérable. Encore faut-il noter que la plus récente initiative menée en la matière datait des années 70.
L’étude a été réalisée en coopération avec la Commission économique et sociale des Nations unies pour l’Asie de l’Ouest ( Cesao). Ses résultats ont été vulgarisés, samedi dernier, dans le cadre d’une conférence tenue à l’occasion de la célébration de la Journée mondiale des séniors. L’état des lieux d’hébergement et de protection des séniors a montré une disparité de genre chez les pensionnaires. Le nombre des hommes excède de loin celui des femmes dans les établissements étatiques. Dans le privé, les taux sont quasi similaires. L’on constate aussi que 31% des résidents sont âgés de plus de 80 ans. La plupart d’entre eux proviennent de Tunis et de Béja.
Pas de soutien familial !
Par ailleurs, 53% de la population-cible n’ont pas d’enfants. Près de la moitié des résidents ( 47%) sont célibataires et 22% sont divorcés, ce qui en dit long sur l’importance du rôle de la famille dans la garantie de la stabilité familiale durant la phase de la vieillesse. Le taux d’analphabétisme propre à cette catégorie s’élève à 45%. Pareillement, pour les résidents sans domicile fixe (SDF). Interrogés sur les causes directes de leur séjour, 48% des résidents ont avoué qu’il s’agit d’une décision personnelle et réfléchie. 9% ont trouvé dans ces établissements ce qu’ils cherchaient, à savoir l’indépendance et la sérénité. Toutefois, la vie n’est pas en rose pour tous et le placement de certains dans des maisons de retraite revient, dans 12% des cas, à l’incapacité de la famille à en prendre soin et à l’absence de descendants à même de les soutenir dans cette phase de vulnérabilité, et ce, dans 10 % des cas.
Une question de survie
Nul ne doute de l’impact de la vieillesse sur l’être humain. L’avancement dans l’âge rime, généralement, avec fragilité, vulnérabilité et de manque—voire parfois d’absence—d’autonomie. Une triste réalité semble dure à gober et à vivre… Et de plus en plus intenable, lorsqu’on est seul. Vieux, malade et dépendant, le sénior n’a pas toute les chances de s’en sortir. D’ailleurs, 37% des personnes âgées prises en charge par les maisons de retraite souffrent de plus de trois maladies. Ils sont majoritairement des hommes ( 60%) dont 74% sont non autonomes, sinon partiellement autonomes. Conscients de leur situation, reconnaissants, les séniors affirment leur appréciation des prestations qui leur sont dédiées. Néanmoins, ils attirent l’attention sur le manque d’activités de loisirs et de divertissement. En effet, il suffit parfois de petites attentions pour que ces personnes, lésées par l’abandon et par l’injuste vie, retrouvent le sourire. D’ailleurs, les stars pourraient y penser et concocter des mini spectacles à titre gratis en leur faveur. Par ailleurs, il est à savoir que le coût de prise en charge d’un sénior non autonome varie entre 500 et 1.500 dt par mois. Il peut même dépasser les 3.000 dt dans certains établissements. Quant à celle d’un sénior autonome, elle oscille entre 500 et mille dinars par mois.
Place à la mise à niveau !
La présentation des résultats de l’étude avait débouché sur une série de recommandations, parmi lesquelles figurent l’informatisation des données et le renforcement de l’effectif. L’heure n’est plus aux dossiers épars notamment ceux médicaux ! L’étude souligne l’impératif de mettre à niveau certaines maisons de retraite, soit une mise à niveau administrative et logistique. Encore faut-il savoir que, sur les 13 établissements étatiques, quatre sont en phase de réhabilitation et de reconstruction. Ils sont implantés à Kasserine, Sfax, Jendouba et Kairouan. Quant aux neuf établissements opérationnels, ils hébergent 243 hommes et 135 femmes. Les maisons de retraite relevant du secteur privé, elles, comptent 25 établissements abritant 152 hommes et 161 femmes. Les recommandations s’articulent aussi autour de l’indispensable révision et actualisation du cahier des charges, en misant, désormais, sur la classification des établissements selon le niveau d’autonomie et de socialisation. Le renforcement de l’effectif et la multiplication des sessions de formation continue en sa faveur s’imposent. Enfin, l’étude recommande l’amélioration des prestations, notamment celles de divertissement et de loisirs, et de renouer contact avec les familles des résidents, afin de les sensibiliser sur leurs devoirs envers leurs séniors.