Par quel bout entamer cette chronique ? On va y aller en partant de la Byrsa. Normal, puisque nous n’irons guère très loin de là. Nous allons nous arrêter à hauteur de la station Salammbô du TGM qui, depuis des mois et Dieu sait pour combien de temps (d’années?) encore, fonctionne en deux temps avec une interruption du trafic à La Goulette Casino et Khéreddine de l’autre.
De cette station, du côté opposé à la mer, part une longue et étroite rue qui, dans les temps jadis, portait le beau nom de Yasmina et qui a fini par désigner un quartier entier. Cette rue croise, quelques dizaines de mètres plus loin, une artère qui se distingue nettement de son environnement urbain.
En quoi cette rue se distingue-t-elle du reste du quartier ? Par sa largeur et par la contre-allée qui la divise en deux sens, au demeurant rarement respectés dans la circulation motorisée. Elle a ainsi des airs de boulevard qu’on a cessé d’aménager dans nos cités depuis bien longtemps ; depuis l’indépendance, en gros. C’est donc là le premier trait distinctif et qui saute immédiatement aux yeux. Poursuivons notre travail de détective.
Hormis la largeur de l’artère, un autre signe attire l’attention : la présence de quelques eucalyptus implantés en enfilade sur le terre-plein central. En fait, on devine l’enfilade plus qu’on ne la voit car, depuis des lustres, plusieurs sujets manquent à l’effectif. Ces arbres centenaires à la taille impressionnante peuvent en effet fournir une quantité fort appréciable de bois pour le plus grand bonheur d’entrepreneurs en menuiserie acoquinés avec une administration municipale véreuse.
Troisième trait marquant remarquable par tout observateur attentif : la présence —pour combien de temps encore avant que les spéculateurs ne s’en emparent ?— de modestes locaux parmi des constructions plus récentes, des «villas» ou carrément des immeubles. Ce sont des habitations ou des commerces d’un seul niveau, de style ancien, sans fioritures : en un mot des lieux de vie ou de travail pour petits Européens du temps du protectorat français, des Siciliens et des Maltais, ouvriers ou petits commerçants, alors relégués à la lisière de cette vaste campagne carthaginoise, aux franges de la colonisation «civilisée» qui, elle, prospère dans l’opulence, de l’autre côté de la voie ferrée, en bordure de mer.
Là, pris en sandwich entre deux ensembles commerciaux pimpant neufs, se trouvent les «Etablissements» Z, signalés par un petit panneau saillant du mur d’un minuscule commerce en quincaillerie et autres pièces de rechange.
Visite le vendredi prochain.