M. Ramzi Bazza, directeur de l’Observatoire national de l’Education à La Presse : «La volonté du ministère est de faire de la sécurité des élèves une priorité »

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Physique ou psychique, la violence en milieu scolaire devient un problème endémique de notre système éducatif. Depuis la rentrée, l’observatoire «Ain» pour la violence en milieu scolaire, qui est un portail lancé par le ministère de l’Education pour recevoir les déclarations en temps réel des directeurs et les mesures prises par eux, a enregistré 10.906 cas de violence dans les collèges et 3.120 dans les lycées, dont la majorité a été enregistrée dans les classes de transition notamment, soit la 7e année de base et la 1ère année secondaire. De plus, ces directeurs sont appelés à donner un descriptif des mesures prises pour accompagner la victime. Et pour comprendre le phénomène de violence scolaire, nous avons rencontré M. Ramzi Bazza, directeur de l’Observatoire national de l’éducation. Entretien.

Depuis plusieurs années, les spécialistes œuvrant dans le domaine de l’éducation réalisent des enquêtes pour mieux comprendre le phénomène de la violence en milieu scolaire, déjà transformé en un lieu insécurisé. Ainsi, et d’après les études menées par le ministère, comment peut-on le définir?

La violence au sein des établissements scolaires peut prendre différentes formes, impliquant des comportements agressifs, intentionnels ou non, causant des préjudices physiques, émotionnels ou psychologiques aux membres de la communauté éducative. Cela englobe un éventail d’actes allant de l’intimidation à la violence physique, verbale, voire à la cyberintimidation.

Face à cette réalité, le ministère de l’Éducation a pris des mesures proactives en mettant en place une application de surveillance et de suivi baptisée «marsadain». Cette application, accessible via le portail «Tunisie Future School» à www.tarbia.tn, vise à observer en temps réel les incidents liés à la violence, à l’addiction et à d’autres problèmes. Son objectif est de permettre une intervention rapide, afin de garantir la sécurité des élèves et maintenir un climat scolaire propice à l’apprentissage.

Cette initiative reflète l’engagement du ministère à comprendre les tendances de la violence en milieu scolaire, à identifier les causes sous-jacentes, à cibler les groupes vulnérables et à prendre en compte la fréquence des incidents. En adoptant une approche proactive, cette démarche permet d’adopter des mesures adaptées pour prévenir et atténuer les comportements violents chez nos élèves.

Il est également crucial de suivre l’évolution des résultats obtenus grâce à cette application, afin d’évaluer son efficacité. Cette démarche démontre la volonté du ministère de l’Education de faire de la sécurité et du bien-être des élèves une priorité dans le système éducatif tunisien.

D’après votre expérience, quelles sont les principales causes de violence en milieu scolaire? 

Les raisons de la violence en milieu scolaire en Tunisie, tout comme dans de nombreuses autres nations, sont souvent multiples et complexes. Plusieurs facteurs peuvent concourir à la manifestation des comportements violents au sein des établissements éducatifs. Voici quelques éléments possibles à considérer : les inégalités socioéconomiques peuvent jouer un rôle significatif, les problèmes familiaux tels que les conflits, le divorce, la violence domestique, ou le manque de soutien familial et les influences extérieures telles que les médias, la culture populaire, voire l’environnement local, peuvent contribuer à la normalisation des comportements agressifs.

Quels impacts de la violence scolaire sur l’apprentissage, la santé et sur la morale ? Est-elle vraiment une cause directe de l’abandon scolaire, phénomène que l’on voit s’accroître d’une année à l’autre?

La violence scolaire exerce des répercussions significatives sur l’apprentissage, la santé physique et mentale des élèves et joue un rôle substantiel dans l’abandon prématuré des études. Les élèves confrontés à la violence en milieu scolaire peuvent éprouver des difficultés à maintenir leur concentration et à participer activement aux activités d’apprentissage, en raison de l’anxiété, de la peur et du stress induits par ces situations.

De plus, un climat scolaire empreint de menace et d’hostilité accroît la probabilité que les élèves choisissent de quitter l’école précocement pour échapper à ces circonstances stressantes. En dernier lieu, la présence constante de violence peut instaurer un climat scolaire défavorable, entravant l’engagement des élèves, altérant la qualité des relations enseignant-élève et altérant la perception globale de l’école en tant que lieu sécurisé propice à l’apprentissage.

Entre les actes violents les plus spectaculaires et les autres qui se passent sous silence, comment le ministère a-t-il fait pour gérer ce phénomène et quels sont les moyens déployés pour essayer de le limiter ?

Il est essentiel de noter que les facteurs ne sont pas exhaustifs et que la situation peut varier d’une école à l’autre. Une approche holistique, prenant en considération ces divers éléments et combinée à des programmes de prévention et d’intervention, peut jouer un rôle crucial dans l’atténuation de la violence en milieu scolaire. À l’heure actuelle, le ministère de l’Éducation mène une enquête qui pourrait fournir des éclaircissements supplémentaires sur cette problématique.

Ces dernières années, on a remarqué, également, que des enseignants sont de plus en plus exposés aux agressions physiques et verbales commises par des élèves et leurs parents. Pourquoi en est-on arrivé là, et comment le ministère a réagi pour limiter ces actes ? 

Les origines des agressions physiques et verbales dirigées vers les enseignants de la part des élèves et de leurs parents peuvent être diverses, mais certaines tendances générales englobent le manque de respect envers l’autorité enseignante, les tensions socioéconomiques, les difficultés familiales des élèves, la normalisation des actes de violence dans le milieu familial, et même le stress associé aux attentes éducatives élevées.

Le ministère de l’Éducation tunisien prend ce problème au sérieux et met en œuvre diverses initiatives pour limiter ces agressions envers les enseignants. Ces actions peuvent comprendre la mise en place de programmes de formation du personnel axés sur la gestion des conflits et la communication efficace, la sensibilisation des parents et des élèves à l’importance du respect envers les enseignants, ainsi que l’établissement de mécanismes de signalement et de suivi des incidents.

De plus, le ministère collabore potentiellement avec les autorités judiciaires pour traiter de manière rigoureuse les cas d’agression, démontrant ainsi une politique de tolérance zéro envers de tels comportements. La gestion de ces incidents requiert une approche globale, combinant des mesures préventives, éducatives et répressives, dans le but d’assurer un environnement scolaire sécurisé et respectueux.

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