Demain serait, peut-être bien, le dernier jour avant Ramadan, selon le calendrier lunaire. Donc, il y a de quoi s’y préparer et aller s’approvisionner en tout ce dont on aura besoin pour ce mois saint.
Excitantes, exceptionnelles, inquiétantes, que ces dernières journées qui précèdent le Ramadan. Le compte à rebours est déclenché et comme il y a toujours quelque chose qui manque ou que l’on souhaite avoir à l’occasion du mois saint, c’est la course folle d’un point à un autre de la ville.
Effectivement, la chasse aux bonnes affaires n’en finit pas. Une dame à la sortie d’une grande surface s’arrête juste sur le pas de la porte. Son téléphone a sonné. Elle dépose son sac roulant et engage une conversation avec ce qui semble être sa fille : «Ah bon? Face à la RTT? J’y vais tout de suite». Elle est rejointe par sa copine, il y a du sucre et de l’huile à… vite, heureusement que la voiture n’est pas loin». A croire que de véritables «réseaux» ont été mis en place pour dénicher ce qui manque. La preuve, on se plaint moins et on s’adaptera jusqu’à la fin de cette période qui finira par rendre l’âme. L’année s’annonce bonne.
Les légumes sont en abondance, les fruits également, au point de se demander pour quelle raison on s’apprête à importer des bananes. Les deux dames reprennent leur chasse aux bonnes affaires. Ce n’est plus la course pour une robe ou une jupe. L’huile d’olive, le sucre, la farine voire la semoule, c’est beaucoup plus urgent. Ramadan, c’est sacré et il ne faut pas que la famille soit privée de quoi que ce soit.
Il faut quand même remarquer que les choses s’annoncent quelque peu positives.
Ces produits réapparaissent et même s’ils ne sont pas en grande quantité, il faudrait seulement réagir au quart de tour pour en acheter au prix de ces longues et patientes files d’attente qui se forment. A dire que de véritables réseaux ont fini par se créer sous l’emprise de la difficulté d’en trouver en abondance.
Il y a moins de gaspillage
Philosophe, un homme d’un certain âge avoue que l’on s’est habitué: «Vous savez, ces files d’attente nous ont quand même enseigné une chose: la lutte contre le gaspillage.
Nous sommes beaucoup plus regardants en ce qui concerne l’utilisation du sucre, de la farine ou du café. Il y a moins de gaspillage et c’est bon pour la santé et pour notre bourse». Un marchand de «makroudh, de zlabia et de mkhareka», ces gâteaux typiquement tunisiens incontournables lors du mois de Ramadan, est catégorique, «cela n’a pas été facile de réserver une partie du sucre que j’ai pu économiser pour le Ramadan. J’ai réduit la quantité de mes produits, depuis près de trois semaines pour ne pas être pris de court et je pense que je suis en mesure de m’en tirer pour le mois saint».
Un cafetier, connu pour servir le petit-déjeuner le matin en plein mois de Ramadan, avoue pour sa part : «Contrairement à ce qu’on croie, il n’y a pas beaucoup de Tunisiens qui viennent. J’ai par contre plus de clients étrangers qui se présentent. Le petit-déjeuner n’étant pas prévu ou qui ne veulent pas cuisiner». A l’entrée du marché central, un jeune offre à la vente du pain encore chaud. Comment trouve-t-il de la semoule et de la farine pour confectionner son pain et comment s’est-il organisé pour Ramadan ? «Toute la famille s’est mobilisée pour stocker une bonne quantité pour ne pas rater notre campagne habituelle. Nous ne manquerons de rien».
Comme quoi, pénurie ou pas, l’homme s’adapte et finit comme l’eau par trouver son chemin et assurer sa survie.
Un fruitier offre à la vente des bananes suspendues par trois tout le long d’une ficelle. «Ce ne sont pas celles que l’on se propose d’importer. Il y a toujours une ou deux caisses que l’on se procure par-ci par-là et cela nous permet d’arrondir les journées. On n’achète plus au kilo, mais à la pièce. Les prix varient entre dix et douze dinars et la clientèle est plus regardante pour les dépenses, surtout que les fraises sont de plus en plus abondantes. Il faut dire qu’une salade de fruits avec des fraises, des oranges et des bananes, c’est savoureux».
D’autres métiers prospèrent
Tout est prévu et même la reconversion est prête à démarrer, dès le premier jour de Ramadan. L’arrière- boutique de l’habituel fast-food est déjà en partie dégagée.
Comme toujours depuis un bon bout de temps. Ce seront les petites gâteries sucrées qui supplanteront les plats cuisinés habituels. «Nous avons notre clientèle et nous offrons à la vente des spécialités du Sud tunisien. Cela marche surtout et cela représente une occasion de donner à mon personnel habituel son congé annuel.
J’ai des spécialistes qui viennent du sud. Cela fait au moins six ans déjà que je convertis mes activités et je me suis fait une bonne clientèle». Comme Ramadan c’est un mois où on fait de bonnes affaires». Bon Ramadan !