En Tunisie, le tourisme a enregistré un net rebond en 2023 avec 8,8 millions de visiteurs, en hausse de 49,3% par rapport à 2022, selon le ministère du Tourisme. Mais qu’a-t-on fait au concret pour remédier aux carences entravant le vrai décollage de ce secteur vital ?
D’ailleurs, les politiques mises en œuvre pour soutenir le secteur du tourisme en réponse à la crise du Covid-19 varient considérablement d’un pays à l’autre, mais peuvent généralement être classées en plusieurs thèmes clés.
L’adéquation entre ces mesures fournit un cadre permettant de comprendre les vulnérabilités de l’écosystème touristique et les domaines qui doivent être renforcés à l’avenir, de l’avis de l’économiste Slim Abdrabbou.
Diversifier les destinations pour mieux résister aux chocs
L’ampleur de l’impact économique d’un choc dépend de plusieurs facteurs généraux mais interdépendants, soutient l’analyste. Pour lui, au-delà de la nature du choc lui-même, il peut s’agir de la nature de l’offre touristique, de l’impact des restrictions de voyage sur les flux de visiteurs, de la mesure dans laquelle l’événement coïncide avec les périodes de pointe du tourisme, de l’ampleur des dommages causés à l’infrastructure touristique physique, de l’échelle et de la complexité des opérations commerciales, du retour des principaux marchés sources, de la taille du marché touristique intérieur et de l’exposition aux marchés internationaux. «Les régions qui manquent de diversité économique et qui dépendent fortement du tourisme pour soutenir les emplois et les entreprises locales sont plus vulnérables», explique-t-il. C’est que l’impact des chocs sur l’emploi et les activités économiques peut être asymétrique et très localisé entre les pays et à l’intérieur de ceux-ci tel que le cas tunisien, note l’universitaire. « Les pays où le tourisme contribue largement au PIB (par exemple la France, l’Espagne et dans une moindre mesure la Tunisie) ont été plus exposés aux effets négatifs de la pandémie du Covid-19. L’arrêt prolongé de l’activité touristique a eu des répercussions sur l’ensemble de l’économie et a nécessité des dépenses publiques pour soutenir le secteur.
Cela se reflète également au niveau des destinations, car les endroits où la diversité économique est insuffisante et où l’on compte beaucoup sur le tourisme pour soutenir les emplois et les entreprises locales sont plus vulnérables », détaille-t-il
Opter pour des programmes de soutien au tourisme régional
Dans de nombreuses destinations, la dépendance économique accrue à l’égard du tourisme, le manque de diversité des visiteurs et de l’offre de produits, ainsi que le manque d’intégration du tourisme dans un développement économique plus large ont accru le profil de risque pour le tourisme et l’économie dans son ensemble, de l’avis de notre interlocuteur. Cela est vrai, vulgarise-t-il, pour les pays, mais c’est encore plus évident au niveau des destinations régionales et locales, car la croissance constante du tourisme dans le passé a créé des attentes orientées vers la croissance et une focalisation sur le ciblage des marchés internationaux à forte croissance. Dans les pays où le tourisme représente une part importante de l’activité économique, le déclin du tourisme a eu un effet dévastateur sur l’ensemble de l’économie locale. Se référant à deux expériences relevant de deux différents coins du globe, l’économiste note que des pays comme l’Australie et le Mexique ont mis en place, pendant la pandémie, des programmes de soutien au tourisme régional. La dépendance à l’égard du tourisme a également entraîné une forte pression et l’introduction de mesures visant à soutenir la réouverture en toute sécurité du secteur dès que les conditions sanitaires le permettaient et à aider le secteur à s’orienter vers de nouveaux marchés. Outre leur forte dépendance économique, ces destinations présentent souvent d’autres vulnérabilités qui se recoupent souvent mais qui présentent aussi des analogies par rapport à l’expérience tunisienne : L’on parle ici de la saisonnalité, avec une concentration de visiteurs pendant les périodes de pointe, comme c’est souvent le cas dans les zones côtières. S’y ajoute la dépendance à l’égard du marché, avec une grande dépendance à l’égard de visiteurs spécifiques, qu’il s’agisse d’un marché national ou d’un type de visiteur spécifique, comme les visiteurs d’affaires. Enfin, figure la dépendance à l’égard d’un produit, basée sur une seule attraction emblématique ou une seule offre de produit, comme les sports d’hiver.
Remédier, un mot d’ordre
En Tunisie, à mesure que l’économie touristique se redresse, il convient de remédier à ces vulnérabilités qui se chevauchent, afin que la destination Tunisie soit plus forte et mieux préparée à s’adapter à l’avenir. Étant donné que les compétences en matière de prise de décision varient entre les niveaux national, régional et local, et que le tourisme est essentiellement constitué de petites entreprises dont les capacités sont limitées au-delà de la gestion des opérations quotidiennes, les organisations de gestion des destinations peuvent jouer un rôle à cet égard. Force est de constater, au demeurant, que la sûreté et la sécurité restent une préoccupation importante pour les touristes du monde entier, la perception étant souvent aussi importante que la réalité. Ces questions peuvent avoir une incidence sur l’image de la destination, les arrivées de visiteurs et la croissance du tourisme, constituent également un élément important de la mise en place d’une économie touristique plus solide et durable. Les touristes qui pensent pouvoir se déplacer facilement et en toute sécurité vers, depuis et autour de la destination sont plus enclins à explorer les attractions secondaires.