La refonte du code des changes pourrait, entre autres, résoudre le problème du marché noir en devises étrangères, qui se développe en raison des restrictions imposées sur les changes. En assouplissant les règles, la refonte peut réduire l’attrait du marché noir, améliorant ainsi l’intégrité du système financier et renforçant la base fiscale du pays. Mohamed Adem Mokrani, avocat en droit des affaires et consultant économique, nous livre plus de détails sur la refonte du code des changes.
Le code des changes actuel de la Tunisie, enraciné dans un cadre réglementaire relativement ancien, fait face à de multiples défis qui limitent l’efficacité et le dynamisme économique du pays. Ces défis et la manière dont une refonte pourrait les surmonter sont cruciaux pour comprendre l’importance de cette réforme.
Un des défis majeurs est la rigidité des réglementations en matière de change. Le cadre actuel impose des contraintes strictes sur les transactions en devises étrangères, entravant la capacité des entreprises tunisiennes à mener des transactions internationales efficacement.
Attractivité des investissements étrangers
Cette rigidité se manifeste à travers des procédures bureaucratiques lourdes et des délais d’attente pour obtenir les autorisations nécessaires, ce qui réduit la compétitivité des entreprises sur les marchés mondiaux.
La refonte du code des changes pourrait alléger ces contraintes en simplifiant les processus et en réduisant les restrictions, permettant ainsi aux entreprises de réagir plus rapidement et plus efficacement aux dynamiques du marché mondial, c’est ce que nous a confirmé Mohamed Adem Mokrani, avocat en droit des affaires et consultant économique.
D’après lui, le deuxième défi concerne l’attractivité des investissements étrangers. Les investisseurs sont souvent réticents à s’engager dans des économies où les rapatriements de bénéfices et la gestion des investissements sont entravés par des réglementations strictes. La refonte pourrait améliorer l’attractivité de la Tunisie pour les investissements étrangers en offrant plus de liberté et de flexibilité dans le transfert des fonds et la gestion des investissements, renforçant ainsi l’entrée de capitaux étrangers dans l’économie.
Toujours selon son analyse, un autre défi est la concordance avec l’évolution technologique, notamment l’adoption croissante des cryptoactifs. La réglementation actuelle ne facilite pas les transactions impliquant de telles formes de monnaie numérique, ce qui place la Tunisie en retard par rapport aux économies qui les adoptent.
La refonte pourrait intégrer les cryptoactifs dans le système financier, permettant aux entreprises de diversifier leurs options de paiement et d’exploiter les avantages de ces technologies émergentes.
Réduire l’attrait du marché noir
Il met le doigt sur le système de change manuel actuel qui nécessite une modernisation pour augmenter la flexibilité et l’efficacité des opérations de change. Une réforme pourrait optimiser ce système, le rendant plus adapté aux besoins actuels des opérateurs économiques.
« La refonte du code des changes pourrait également résoudre le problème du marché noir en devises étrangères, qui se développe en raison des restrictions imposées sur les changes. En assouplissant les règles, la refonte peut réduire l’attrait du marché noir, améliorant ainsi l’intégrité du système financier et renforçant la base fiscale du pays », a-t-il assuré.
Il a avancé : «Le code actuel est peu adapté à l’économie numérique globale. Cette refonte pourrait favoriser l’intégration de la Tunisie dans l’économie numérique en permettant l’utilisation plus large des plateformes de paiement électronique internationales et en facilitant le commerce électronique transfrontalier».
En résumé, a-t-il expliqué, «une refonte du code des changes est essentielle pour la Tunisie afin de surmonter ces défis. Elle peut stimuler la compétitivité des entreprises, attirer plus d’investissements étrangers, s’aligner sur les évolutions technologiques, moderniser les opérations de change, contrer le marché noir et intégrer pleinement l’économie tunisienne dans le système financier mondial numérisé.
Ces changements contribuent significativement à dynamiser l’économie tunisienne et à améliorer sa position sur l’échiquier économique mondial».
Les secteurs qui sont susceptibles de bénéficier de cette refonte
Et de poursuivre : «La refonte du code des changes en Tunisie, attendue avec un vif intérêt, a le potentiel d’apporter des avantages significatifs à divers secteurs de l’économie. L’allègement des réglementations strictes actuelles et l’adaptation aux évolutions économiques mondiales offriraient de nouvelles opportunités de croissance et d’expansion ».
Mokrani a, d’autre part, noté que le secteur de l’exportation, y compris les industries manufacturières, figure parmi les bénéficiaires majeurs. « Actuellement, les entreprises tunisiennes engagées dans l’exportation font face à des difficultés pour réaliser des transactions en devises étrangères et pour accéder à des marchés internationaux en raison des restrictions rigides du code des changes. La refonte du code, en assouplissant ces restrictions, faciliterait les échanges commerciaux et améliorerait la compétitivité des exportateurs tunisiens. Cela se traduirait par une augmentation des exportations, un élément clé pour la croissance économique du pays».
Selon lui, le secteur des Technologies de l’information et de la communication (TIC) et l’économie numérique profiteraient également de la refonte. Avec l’intégration des crypto actifs et la facilitation des transactions électroniques internationales, les entreprises technologiques auraient plus de facilité à mener des opérations commerciales à l’échelle globale. Ce secteur, en rapide évolution, nécessite une flexibilité accrue dans les transactions financières pour exploiter pleinement son potentiel de croissance.
Un bon point pour le tourisme
Les startup et les entrepreneurs bénéficient aussi considérablement de la réforme. La possibilité d’ouvrir des comptes en devises et d’accéder aux plateformes de paiement électronique comme PayPal offrirait aux startup tunisiennes une plus grande facilité pour s’internationaliser et attirer des investissements étrangers. Cela créerait un environnement propice à l’innovation et à l’esprit d’entreprise.
Le secteur du tourisme, un pilier clé de l’économie tunisienne, serait également favorisé. La simplification des procédures de change pour les touristes et la possibilité pour les entreprises touristiques d’effectuer des transactions plus aisément en devises étrangères pourraient renforcer l’attrait de la Tunisie en tant que destination touristique et améliorer la santé financière du secteur.
Mokrani a expliqué, par ailleurs, que les investissements étrangers dans le pays seraient stimulés grâce à une politique de change plus libérale. Cela ouvrirait la porte à des flux de capitaux étrangers plus importants, essentiels pour le développement de secteurs tels que l’immobilier, l’énergie et les infrastructures.
Les investisseurs étrangers seraient plus enclins à investir en Tunisie si les procédures pour le rapatriement des bénéfices et la gestion des investissements étaient simplifiées.
Enfin, le secteur financier et bancaire se transformerait avec la modernisation du système de change manuel et l’intégration des cryptoactifs. Cela offrirait aux banques et autres institutions financières de nouvelles opportunités de services et de produits financiers, leur permettant d’être plus compétitives à l’échelle internationale.
En conclusion, une refonte du code des changes serait une étape cruciale vers la modernisation de l’économie tunisienne, offrant des avantages substantiels à une variété de secteurs.
En améliorant l’accès aux marchés internationaux, en favorisant les investissements étrangers et en adoptant les dernières innovations financières, la Tunisie pourrait accélérer sa croissance économique et renforcer sa position sur la scène internationale.