«Ila ibni» (A mon fils) de Dhafer El Abidine : Drame familial saoudien

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«Ila ibni» (A mon fils) est le second long métrage de l’acteur Dhafer El Abidine. Tout comme «Ghodwa» (Demain), le film se veut encore une fois une peinture des relations entre un père et son fils. Le film est actuellement sur nos écrans.

Dans ce nouvel opus, Dhafer El Abidine, à la fois co-auteur du scénario, acteur, réalisateur et producteur, raconte l’histoire de Feisal (Dhafer El Abidine), citoyen britannique d’origine saoudienne vivant à Londres avec son fils de 7 ans, Adam (Adam Zahr). Des années après la mort de sa femme Angela, tuée par un délinquant à la sortie d’un restaurant où il l’a invitée pour y fêter son anniversaire, il décide de tout abandonner pour aller vivre avec son fils en Arabie Saoudite au milieu de sa famille, soumise à de strictes normes de conduite d’un père autoritaire et fidèle aux traditions patriarcales.

Feisal n’est pas retourné dans son fief natal Abha, village situé au Sud de l’Arabie Saoudite depuis 12 ans. Son retour au bercail bouleverse l’équilibre de cette riche famille de paysans. Ses deux sœurs Noura et Shahd et Fares son frère cadet trisomique sont heureux de le revoir. Tandis que son père (Ibrahim El Hassaoui) refuse de lui parler. Il ne peut lui pardonner d’avoir quitté sa famille contre son gré pour poursuivre ses propres rêves et une autre vie dans un pays occidental. Mais au fil de l’histoire, la révélation de la grave maladie de Feisal va ressouder les liens familiaux dans leurs fondements sacrés.

La relation de Feisal avec son fils Adam est à la fois tendre et cruelle. L’enfant découvre auprès de ses tantes et son grand-père une autre culture et d’autres mentalités auxquelles il n’a pas de mal à s’adapter sans manifester aucune résistance. Il a même l’air de s’y plaire. Le drame se profile au milieu du  film qui prend une autre tournure. Le malaise s’installe lorsque la famille apprend fortuitement la grave maladie de Feisal. La réconciliation du père avec son fils Feisal ne se fait pas sans peine. Le père, qui n’a pas admis que son fils les a abandonnés voire oubliés, change de ton et d’attitude pour s’attendrir davantage sur le sort de ce fils rebelle mais respectueux des traditions familiales.

Le père intransigeant refuse, au tout début de l’arrivée de son fils à la maison, de se réconcilier avec lui et lui fait des reproches désagréables sur ses choix de vie ; sans compter qu’il impose à ses filles son diktat, notamment la demande en mariage du prétendant de l’une d’entre elles, Shahd, est rejetée sans raison précise d’où le rapport frontal entre le père et le fils. La relation père-fils semble s’adoucir par le lien affectif entre le grand-père et le petit-fils qui fait la joie de toute la famille. La relation conflictuelle ne finit par s’apaiser que lorsque le père découvre lors d’une dispute avec son fils Feisal que ce dernier est atteint d’une grave maladie. C’est alors que la maladie réveille son affection et sa tendresse.   

Omniprésence de Dhafer El Abidine

D’une durée de 112 minutes, « Ila ibni » est un film purement saoudien produit par 03 Medya et Double A Productions. Dhafer El Abidine maîtrise les rênes du film depuis le scénario jusqu’à la production, la réalisation en passant par l’interprétation. Il marque sa présence dans quasi tous les plans du film. «Ila ibni » révèle l’aspect psychologique d’un père autoritaire qui cache ses sentiments mais aussi de cet autre père Feisal, qui refuse de se remarier à cause peut-être de sa maladie. Sentant sa fin proche, il laisse à son fils un journal intime dans lequel il exprime par les mots ses sentiments affectifs envers ce fils qui prendra la relève et suivra un chemin sans doute différent du sien. La transmission des traditions et des us et coutumes par le grand-père à son petit-fils se fait sans heurts, ni désapprobation de l’enfant.

Sur le plan artistique, les images sont bien léchées notamment les panoramiques représentant les décors naturels d’une région montagneuse verdoyante de l’Arabie Saoudite détrompant ainsi l’imaginaire des spectateurs pour qui le pays est dominé par un désert recouvert de sable. Des paysages dont on ne soupçonnait pas la beauté et dans lesquels Feisal se réfugie pour apaiser ses souffrances et réfléchir sur sa condition. Dhafer El Abidine nous fait découvrir une autre facette de l’Arabie Saoudite, en particulier ce patelin perché en haut d’un flanc de montagne. Le décor de l’intérieur de la demeure familiale est moderne et ne reflète pas la vie paysanne.

Ibrahim El Hassaoui, Summer Shasha, Ida Alkusay, Khairia Nazmi, Sarah Alyafei, l’acteur jordanien Adem Abu Sakha, le jeune acteur libanais Adam Zahr et la comédienne britannique Emilia Fox n’ont pas démérité. Ils ont bien rempli leur contrat particulièrement le grand Ibrahim El Hissaoui dont le jeu contraste avec le reste de l’équipe. La mise en scène, quant à elle, est sans relief. Elle exprime une vie paisible, chahutée certes par le retour de Feisal, mais retrouve son calme dès la disparition de ce dernier. Dans cette famille où règnent ordre, calme et volupté, les bonnes mœurs sont respectées, la religion aussi avec une psalmodie d’un verset du Coran sur l’inévitable retour de l’être auprès du Créateur. Un film très clean qui met en valeur l’Arabie Saoudite comme une destination touristique émergente dans la région du Moyen-Orient et qui s’ouvre progressivement au cinéma et à la modernité.

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