Accueil Culture Dhafer Abidine, acteur et réalisateur de Ila Ibni (A mon fils), à La Presse: «Je raconte une histoire humaine et universelle»

Dhafer Abidine, acteur et réalisateur de Ila Ibni (A mon fils), à La Presse: «Je raconte une histoire humaine et universelle»

Star tunisienne et internationale adulée, Dhafer Abidine mène une carrière artistique foisonnante. Il porte plusieurs casquettes à la fois : acteur, réalisateur, scénariste et producteur. Il a réussi à s’imposer en tant qu’acteur dans plusieurs feuilletons arabes qui lui ont valu des récompenses dans les festivals et participé à des productions britanniques, américaines et françaises. «Ila Ibni» (A mon fils) est son deuxième long métrage en tant que réalisateur. Plus de détails sur cette production dans l’entretien suivant.


Qu’est-ce qui vous a donné envie de réaliser un film en Arabie Saoudite ?

Les producteurs m’ont proposé l’idée après la réussite de mon premier long métrage «Ghodwa» aux Emirats arabes unis, Qatar et l’Arabie Saoudite. «Ila Ibni» raconte l’histoire d’une famille sur trois générations. J’ai accepté l’idée de pouvoir présenter quelque chose de nouveau. Bien que l’histoire soit saoudienne, elle reste une histoire humaine et universelle. Le conflit de générations, les liens entre un père et son fils existent partout dans le monde avec forcément des degrés différents.

Le début du film se déroule à Londres, puis à Abha au Sud de l’Arabie Saoudite. Cela a été un défi d’aller tourner dans un pays qui a ses traditions particulières. C’est une grande responsabilité de montrer une réalité sociale différente de la nôtre. Je suis resté une assez longue période dans cette région pour prendre connaissance des relations familiales, les us et coutumes et le dialecte utilisé dans cette région. A sa sortie en Arabie Saoudite, le film a eu des échos positifs.

Vous maîtrisez tout le processus de production du film, de l’écriture du scénario jusqu’à l’interprétation en passant par la réalisation et la production. Pourquoi ce choix ?

J’aime bien écrire, jouer et réaliser des histoires à ma manière. Ma carrière d’acteur professionnel me permet de toucher à la réalisation pour proposer mon propre point de vue. A mes débuts, j’ai fait de l’assistanat sur le film de Moncef Dhouib. Je ne suis pas le seul acteur à faire de la réalisation. A titre d’exemple, il y a Woody Allen, Clint Eastwood, Mel Gibson. Il y a 14 ans, j’ai écrit un scénario que je n’ai pas pu réaliser faute de moyens. Aujourd’hui, je peux réaliser mon rêve et sortir de la zone de confort et prendre le risque de m’aventurer dans des projets différents soit en Tunisie, en Angleterre ou en Arabie Saoudite.

Pensez-vous quitter un jour le métier d’acteur et vous consacrer uniquement à la réalisation ?

Ce n’est pas impossible. Mais, il se trouve que j’écris moi-même des histoires qui me touchent sur des personnages de mon âge. Je continue donc à être devant la caméra.

Le décor a-t-il influencé l’écriture du scénario ?

Il y a un contraste entre Londres, une grande métropole avec ses gratte-ciel et Abha avec ses montagnes et sa verdure et une famille de paysans dont le père a des ambitions pour son fils qui consiste à prendre en charge la ferme. Par contre, le fils qui a fait des études de marketing s’est construit une vie différente. Le lieu est tout à fait propice pour cette histoire. Je suis resté trois mois à Abha pour la préparation du film qui a nécessité trois semaines et demie de tournage.

Le retour au bercail de ce fils qui vit dans un pays occidental devait être accompagné d’une révolution au sein de cette famille conservatrice ?

Feisal a aidé sa sœur à se marier avec l’homme qu’elle a choisi alors que son père était opposé formellement à cette union. Feisal a réussi à faire changer l’avis de son père sur cette question.

La question de l’identité est fortement ancrée dans le film ?

Toutes les traditions ne sont pas bonnes à jeter. Il y a une certaine fierté à s’habiller du costume traditionnel qui représente l’identité de la région et de le transmettre à son fils ou encore de partager un repas à même le sol. Mais cela n’empêche qu’il y a une ouverture d’esprit manifeste. La femme saoudienne travaille à des projets d’avenir, peut conduire une voiture, etc. Feisal ne renie pas son identité, au contraire, il en est fier.

Le film met en valeur la culture et les traditions de l’Arabie Saoudite.

Certes, les traditions et les coutumes sont essentielles pour un pays. Elles participent à son identité. Il faut les respecter et laisser tomber les préjugés.

Vous abordez la condition de la femme saoudienne qui essaie d’imposer sa personnalité mais elle a besoin d’être épaulée par un homme, ici en l’occurrence Feisal, le frère bienveillant.

Dans le film, les deux sœurs, l’une est affranchie, l’autre porte le voile intégral (Khimar). La transition est en train de se faire en douceur. On remarque un progrès significatif chez les familles saoudiennes qui permettent à leur fille de sortir seule dans la rue et de conduire une voiture.

Comment avez-vous procédé pour le choix du casting ?

A l’instar de «Ghodwa», mon premier long métrage, le choix du casting s’est fait en fonction des personnages et leur place dans le film. Ils doivent correspondre à la nature et au caractère du personnage. Le travail en groupe entre les acteurs est essentiel pour créer une harmonie. Le concept de l’équipe, comme au football, est important pour la réussite de l’œuvre.

Quel message voulez-vous faire passer à travers ce film ?

Ce qui m’intéresse au plus haut point, ce sont les relations humaines avant tout, notamment la famille qui est le socle de la société. Si on résout les problèmes au sein de la famille, la société peut aller mieux.

Dans «Ila Ibni», le père perd de son autorité envers son fils. Le frère aide sa sœur dans ses choix de vie. Mais le film parle aussi de la maladie, la solitude. Au fait, c’est une traversée personnelle dans un environnement en pleine mutation.

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